Cela faisait un moment que, embarqué dans d’autres lectures (y compris du même auteur), je n’avais pas poursuivi la saga phare de Brandon Sanderson, Les Archives du Roshar. Du haut de ses 1100 pages (en version poche), cette première partie du deuxième tome présente une suite à la hauteur, et même au-delà.
Les archives de Roshar possède la qualité d’allier modernité et authenticité. Ici la règle s’inscrit de juste, car les caractéristiques, tant de fond que de forme, sont respectées. On explore un univers gigantesque, riche de peuplades aux cultures variées, et on en redemande. Outre l’imagination débordante de son auteur, ce qui m’a frappé était le propre recul critique par rapport aux sociétés bâties. Déjà Roshar, par ses coutumes rigides et codifiées (notamment en matière de séparation des sexes), est remis en question, et l’on constate avec plaisir que des femmes peuvent être guerrières et des hommes lecteurs. D’autre part, notamment grâce au prisme d’Eshonai, Parshendis et autres peuplades plus « sauvages » s’illustrent ici à merveille. Tout manichéisme s’avère détruit puisque, quand bien même certains personnages restent plus secondaires, le point de vue de chacun des camps est expliqué. Les Parshendis sont destinés à acquérir un rôle important dans l’intrigue, en attendant, les mystères se multiplient et la tension monte…
Qu’en est-il des personnages principaux ? Dalinar est plus en retrait ce tome-ci, comme considéré d’un point extérieur, patientant pour son heure. Tout le contraire d’Adolin dont le rôle grandit au fil des pages. Pour l’instant, il s’agit clairement du protagoniste avec lequel j’ai le plus de mal, mais il faut reconnaître que son aspect « jeune prince tête à claque » est assumé et qu’il possède certaines qualités enfouies. Kaladin reste fidèle à lui-même et gagne autant en puissance qu’en prestige au sein de cette vaste armée, et c’est toujours à travers sa vision que l’on observe les discriminations entre sombre-iris et pâle-iris. Son potentiel monte, à défaut d’être encore exploité à son paroxysme.
Mais Shallan est sans nul doute LE personnage de cette partie (et sûrement de la deuxième). Et cette décision me plait beaucoup, puisqu’il s’agissait de mon protagoniste préféré de La voie des rois. Son écriture est finement ciselée sur « deux fronts ». D’une part ses flash-back dévoilent les épreuves qu’elle a subies, et surtout d’avoir grandi auprès d’un père horrible. D’autre part, par succession de mentors, elle s’endurcit, s’affirme, et quitte à jouer un rôle, elle se hisse plus haut que jamais.
Depuis La voie des rois, elle avait gagné de la crédibilité auprès de Jasnah, et s’apprête à découvrir le mystère des Néantifères, qui semblent vouloir revenir si les humains gardent les Parshendis comme esclaves. Et là, à ma grande distance, la cinglante Jasnah semble mourir… Si je reste dans le déni, espérant de tout cœur qu’elle ne soit pas réellement morte, la perte d’un mentor reste une épreuve ardue. Elle en rencontre une autre, Tyn, dure d’une autre manière. Il s’avère hélas qu’elle était commanditaire des assassins de Jasnah. Alors Shallan tue pour la première fois, libérée certes, mais enrichie de ses conseils. Son périple, pour cette partie, s’achève sur sa faculté à s’adapter à la noblesse, à cette complexe famille Kholin. L’un de mes passages préférés, outre ses moments avec Adolin (pas niais pour un sou), était sa joute verbale avec Kaladin.
Une critique d’un demi-livre… D’une saga pouvant devenir une référence du genre ! Il me tarde de découvrir la seconde partie, et au-delà encore.