Castral Roxx

Un an et demi après être venu à bout d'un premier volume intéressant, mais parfois laborieux, je me suis enfin lancé dans la suite des aventures du Trône de Fer. Et, bien que toujours imparfait, le bilan post-lecture s'avère plutôt réjouissant.

Le plus gros défaut de la première intégrale était pour moi son rythme en dents de scie : cent pages à mourir d'ennui pour commencer, puis des chapitres se finissant sur des cliffhangers résolus trois ou quatre chapitres plus loin. Le temps qu'on y arrive, et on en avait plus grand chose à faire tant l'intrigue avait évolué sur d'autres points pendant ce temps.

Point de cela ici, ce volume 2 impressionne directement par sa mise en place d'un rythme parfait : un prologue plutôt prenant, puis on enchaîne Arya, Sansa, Tyrion (= divers points de vue pour une même situation géopolitique), Bran (loin de l'action, on s'en fiche un peu mais au moins son intrigue avance), Arya (retour là où sont les enjeux), etc.

Ainsi le premier tome français, La Bataille des Rois, passe-t-il à une vitesse époustouflante : très peu de chapitres "annexes" (non vitaux à l'intrigue immédiate) sont présents, et même Daenerys n'en aura qu'un seul, histoire qu'on n'oublie pas son existence (ça serait dommage quand même, des fois qu'elle serve à quelque chose un jour). Bref, un rythme presque parfait et des péripéties intéressantes débutent agréablement ce nouveau volume.

L'intégrale traversera ensuite un passage un peu (trop) lent, qui durera tout le tome de l'Ombre Maléfique. Cette partie n'est là que pour préparer le troisième et ultime mouvement, soit la Bataille annoncée dès le titre, mais cela se ressent trop. Si tout converge astucieusement vers ce point scénaristique unique, c'est sans grande passion qu'on s'y dirige. Et si ce chapitre de l'aventure est toujours agréable à lire, il est donc bien moins passionnant. À la manière d'une guerre des tranchées, la situation stagne et semble presque s'enliser par moments.

La dernière partie, l'Invincible Forteresse, relève le niveau et termine très bien ce volume. La bataille est à la hauteur des attentes qu'elle a su susciter plusieurs centaines de pages durant, et quelques retournements de situation viennent égayer le tout.

Quelques retournements... Beaucoup de retournements, en fait. Et sûrement même un peu trop. À la première surprise, on se dit "ok pas mal, improbable mais bien amené, pourquoi pas" ; au second on a déjà plus de mal à y croire, mais au troisième en trois chapitres stooop. Après un milieu mou du genou et vide d'avancements, trop de twists tuent la crédibilité du récit et en font apparaître les ficelles : "ouais ok donc là George R.R. Martin essaye de nous faire croire qu'on va par ici, mais en fait on va sans aucun doute par là ; je ne sais pas comment on va atteindre ce point mais il va s'arranger pour". Bref, ces trop nombreux événements finissent selon moi par ternir un peu la fin du récit. En matière de twists, tout est une savante question de dosage. Un dosage ici loin d'être toujours au point.

Autre reproche, applicable à l'ensemble du livre : je ne sais pas si je dois l'imputer à l'auteur ou au traducteur, mais certaines scènes d'action sont tout à fait incompréhensibles. C'est très frustrant, car c'est généralement lors de moments critiques où on est scotchés aux mots, buvant les phrases et avalant les pages, que cela arrive. Alors devoir relire 3 fois une phrase pour ne finalement pas capter sa signification, et donc le déroulé précis de l'action sur un paragraphe, c'est un peu frustrant. Le défaut étant vraiment récurrent, j'espère qu'il s'éclipsera dans la suite.

Concernant l'histoire en elle-même, si elle saura passionner et surprendre tout du long, le cas des Lannister me pose toujours un peu soucis : qu'ils saccagent tout ce qui bougent, on a fini par s'y faire, mais qu'ils se trouvent des alliés encore plus facilement des putes et que leur chance soit plus élevée que les comptes bancaires de HBO, ça me laisse légèrement incrédule tout de même. Heureusement que Tyrion est là pour apporter un peu de nuance à cette famille, autrement relativement prévisible et clairement privilégiée par l'auteur. Un choix narratif difficile à tenir, l'artifice n'étant alors jamais très loin... En effet, à force de vouloir montrer que les Stark (= les gentils) peuvent se faire décimer, Martin oublie un peu de rentre lesdits adversaires crédibles.

Au final, A Clash of Kings est un très bon tome, bien meilleur que le premier selon moi. Les pions avancent sur l'échiquier, le rythme est bon, l'aventure intéressante, la lecture prenante. Si j'ai mis trois mois à lire la première intégrale (pourtant bien plus courte) et plus d'un an avant de me mettre à sa suite, j'ai achevé ce second volume en deux mois, et je n'avais alors qu'une envie : enchaîner sur le troisième épisode. Et ça, ça veut tout dire.