Vieille boîte en ferraille pleine à craquer de photos et d’objets d’enfant, Les Chiens de l’enfer est le premier roman de Tom Spanbauer, et représente, par sa brièveté, la fureur de son écriture et la diversité de ses thèmes, une véritable introduction aux deux œuvres maîtresses qui suivront : L’homme qui tomba amoureux de la lune (1991) et Dans la ville des chasseurs solitaires (2001).


L’histoire se déroule à la fin des années 50 aux États-Unis, dans une commune rurale de l’Idaho où la pauvreté et la ségrégation raciale ne cessent de croître – parallèlement, comme toujours – au fil des saisons et des mauvaises récoltes.
Le jeune Jacob raconte l’histoire, ce qu’il sait, c’est-à-dire pas grand-chose, des interdits surtout, et des péchés mortels au moins autant. Il raconte sa chambre, il raconte la rivière où il n’a pas le droit de se rendre, il raconte l’Indienne Sugar Babe et le nègre, il raconte Harold P. Endicott et ses chiens de l’enfer, il raconte la bannière étoilée qui flotte dans le ciel.
Tout est combat et confrontation, une violence extrême et sans filtre projetée directement de l’œil de l’enfant jusqu’au texte – éclaboussures de sang, de lait et de chocolat à chaque page. Le combat de la nature, symbole de toutes les possibilités et de toutes les infinies, avec la religion, complexe et austère ; le combat de l’enfant avec le père ; le combat de l’indien avec l’Amérique ; le combat de l’illusion avec la réalité…


"C’était la pleine lune du mois de février, celui où il n’avait pas neigé. Je portais mon pyjama de flanelle et j’avais mis mes chaussettes ; j’étais dans la salle de bains en train de me regarder dans la glace pendant que je me lavais les dents après Les gens de chez nous, le feuilleton radiophonique, mais avant de réciter mon rosaire, quand ma mère traversa le vestibule au papier peint décoré de papillons et de dés. Elle passa devant la porte de la salle de bains dans son kimono vert ; elle avait cet air que je lui connaissais bien et son œil gauche louchait. Je crachai – mon sang avait teinté en rose la pâte dentifrice blanche -, puis je me rinçai la bouche et nettoyai le lavabo. Le temps d’aller dans la cuisine et je sentis le goût du sang."


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Julien_Le_Minous
8

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le 12 janv. 2016

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Paon Démon

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