« Les Gens d’en face » (1933) est le 24e roman (sur 192), écrit, à 30 ans, à Marsilly (Charente-Maritime, au nord de La Rochelle), par Georges Simenon (1903-1989). C’est le 6e de ses « romans durs » (sur 117, c’est-à-dire sans Maigret, héros de 75 autres romans). Doté d’une préface, il est paru, en prépublication, dans Les Annales, entre le 1er septembre et le 13 octobre 1933. Sa rédaction fait suite au voyage du romancier autour de la mer Noire, au printemps 1933, en passant par Odessa (Ukraine) et la Géorgie, avant de revenir à Istanbul (Turquie). Il a fait l’objet d’une adaptation cinématographique, « Los de enfrente » (1993) par L’Espagnol Jesús Garay. L’histoire se déroule à Batoum (ou Batoumi, á 20 km de la Turquie, actuellement en Géorgie, annexée par la Russie en 1878, puis turque de 1918 à 1921, avant de devenir soviétique) qui est un port sur la mer Noire où il y a 3 consulats : turc (Adil bey, 32 ans, né à Salonique, célibataire, qui vient d’arriver), italien (M. Pendelli) et perse (M. Amar). Le consulat turc n’a pas de rideaux, permettant la vue des voisins d’en face [un couple dont le mari Koline, est chef du Guépéou (police d’état) maritime et une jeune femme, Sonia]. Cette dernière, 20 ans, russe, sœur de Koline, est la secrétaire d’Adil bey car elle est un peu turcophone (père concierge à l’ambassade turque). Elle a réponse à tout. Adil bey semble vivre dans un monde absurde, comme dans « Le procès » (1925) de Franz Kafka (1883-1924). La ville est pleine de mendiants avec des échoppes vides. Simenon montre la réalité du régime soviétique (misère, système de surveillance, élimination des opposants et déviants, etc.) avant le voyage d’André Gide (1869-1951) pendant l’été 1936, à l’origine du livre « Retour de l’U.R.S.S. » (1936) où il décrivit son désenchantement et témoigna du culte de la personnalité de Joseph Staline (1878-1953), au pouvoir depuis 1922, et du contrôle de l’information. Cela lui valut les foudres des communistes français (dont Louis Aragon). Plus que la passion amoureuse entre le consul turc et sa secrétaire Sonia, assez banale, c’est le témoignage de Simenon, précurseur et non démenti par l’Histoire, qui donne du relief au roman méconnu.


bougnat44
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le 11 juil. 2025

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