Les gens de la nuit est un roman de la fuite : se perdre dans les méandres de la nuit pour fuir la douleur amoureuse. Le narrateur, Jean Dumont, est un jeune homme de trente ans qui sort d'une rupture douloureuse. Il choisit de se laisser embarquer par la nuit, dans le Paris de la fin des années cinquante, que Déon décrit avec beaucoup d'acuité et de tendresse. Dumont se laisse charmer par des noctambules oisifs, qui vivent en marge, dans un tout petit monde qui va de Montmartre à Saint-Germain des Près, embourbés dans des affaires douteuses, comme la nuit sait en susciter. Le narrateur cherche en vain à surmonter sa douleur, en se laissant surprendre par le désir qu'il éprouve pour Gisèle, créature nocturne qu'il rencontre dans une boite, et avec laquelle il se lie. De fil en aiguille, il rencontrera plusieurs personnages qui forment un écheveau dangereux. Au terme de ce voyage au bout de la nuit, il finira par quitter Paris, conscient de ses fragilités, mûrit par cet apprentissage sur lui-même que la nuit lui aura permit de vivre.


J'ai été sous le charme de ce roman de la première partie de la vie d'écrivain de Michel Déon, écrit bien avant ceux qui l'ont rendu célèbre dans les années soixante-dix (Les poneys sauvage, Un taxi mauve, Le jeune homme vert...). Déon restitue avec beaucoup de sensibilité et d'acuité la dérive existentielle d'une jeune homme en rupture : dans sa vie amoureuse, dans sa vie familiale et dans sa vie professionnelle. C'est la description d'un malaise dans la société parisienne de l'après-guerre, qui ne parvient à trouver sa place que dans le Paris des marginaux de la nuit. C'est aussi une forme de roman d'initiation. La nuit est un apprentissage sur soi-même. La vie nocturne nous met en face des désirs faciles et de situations périlleuses, dont on ne sort pas indemne. Jean Dumont mettra ainsi un terme à son périple pour un nouveau départ.

Zitto
7
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le 25 déc. 2016

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