Mademoiselle de Maupin par Ellay

De ma misérable culture littéraire, Mademoiselle de Maupin est peut-être le roman français le plus intéressant que j'ai eu la chance de lire. N'aimant pas faire de l'art une question de morale, Théophile Gautier prend beaucoup de libertés dans les thématiques abordées et offre un récit (malheureusement) avant-gardiste pour son temps.

Je commence par cela car c'est selon moi le grand point fort du roman : l'auteur nous donne de belles clés de réflexion sur des sujets comme l'amour, la place de la femme, l'homosexualité ou l'art (ne vous attendez pas non plus à un essai ultra complet, cela reste un simple livre de fiction), comme ils sont vus au XIXe siècle mais il y a toujours matière à débat aujourd'hui.

En effet, le roman met en scène un personnage masculin (d'Albert) à la recherche de chimères de beauté, lassé de la morosité de la vie et de la solitude qu'il vit, ainsi qu'une femme (Madeleine) qui se travestit en homme car elle veut déceler la véritable nature qui se cache derrière la façade que les hommes montrent quand ils font la cour aux femmes (en tout cas ce sont les deux personnages principaux).

Mademoiselle de Maupin alterne entre des lettres envoyées par d'Albert, celles envoyées par Madeleine, et des séquences de récit plus traditionnel avec le point de vue de l'auteur ; cela donne un bon rythme à l'histoire et on ne s'ennuie pas (même si on peut regretter le fait qu'on ne trouve pas de réelle différence dans la manière d'écrire les lettres entre d'Albert et Madeleine).

Le style épistolaire de Gautier ainsi que ses descriptions sont un grand crû, l'écriture est juste très belle, les phrases sont au choix percutantes, pathétiques, formelles, longues, courtes quand il le faut.

Le livre est vraiment dense, et presque tout y est marquant. L'ensemble mêle une intrigue forte, des personnages dignes d'être écoutés, des réflexions intéressantes sublimés par la magnifique écriture de l'auteur, pleinement dans la veine romantique du XIXe siècle. La qualité de l'œuvre est phénoménale.