Gratuit, c'est ce qui caractérise bien ce livre, pas qu'il vous sera offert dans votre librairie, mais les idées de Genet ne sont jamais vraiment justifiées.
Ce roman ne nous raconte dans le fond pas grand-chose : Genet est dans sa cellule, il crée des personnages, des macs, des assassins, des travestis prostitués, grâce à ses souvenirs et les photos qu'il a découpés et accrochés dans sa cellule, nous montre qu'il fait ce qu'il veut avec, les fait interagir un peu, nous les décrits beaucoup, raconte de nombreuses anecdotes vides, dans des tableaux épars qui ne forment pas une histoire.
Les personnages sont très creux, il n'y a pas de psychologie, pas d'intentions, ils n'ont pas vraiment de but, ne vivent rien de très palpitant, en fait ces personnages n'ont rien pour nous intéresser. Ce livre ne crée aucun enjeu, et couplé à ses autres défauts de l'ennui.
On pourrait penser que tous ces tableaux nous décrivent tout de même ce milieu interlope qu'a bien connu Genet, comme peut le faire une Neel Doff dans un registre un peu différent. Et Bien pas vraiment ! En dehors de quelques petits détails, on ne ressort pas de cette lecture plus instruit de ces milieux. Genet patine juste sans raconter grand-chose, donc malheureusement l'intérêt du livre ne se trouve pas ici...
En fait, Genet se pense bon poète, et il a voulu bien écrire et nous retenir par ça, mais c'est un exercice très dur ! Malheureusement le niveau n'est pas du tout au rendez-vous, il oscille entre le mauvais et le passable... Genet semble avoir lu quelques livres, vu que dans un livre on tente d'écrire de belles phrases, il a repéré quelques mots de vocabulaire clichés (Univers, infini, destin, éternel, azur), a vu que l'on fait des jeux d'oppositions (ex : Un ciel souterrain), y rajoute un mysticisme creux, et hop on en met partout dans sa phrase (ce qui donne un résultat très surchargé) ! Et voilà la recette de notre Ersatz de romancier-poète.
Le problème est que toutes ces formules pseudos poétiques ne vont nulle part, elles ne desservent pas vraiment un propos (qui est presque inexistant de toute façon), elles sont juste là, et ne se suffisent vraiment pas à elle-même. Par moment l'on repère tout de même quelques bonnes idées, mais elles demanderaient à être retravaillées de façon évidente, au point où j'ai souvent eu l'impression d'avoir un brouillon en face des yeux.
En lisant ce livre on se demande pourquoi ces choix de narrations, on pense à Diderot par exemple avec Jacques le fataliste, qui comme lui propose quelque chose de très "foutraque" à première vue, où le narrateur fait sentir aussi qu'il fait ce qu'il veut de son histoire, et demande aussi au lecteur de faire des choix, mais chez Diderot cette forme a une raison, et en plus elle crée un intérêt direct pour le lecteur par le discours des personnages, en particulier Jacques qui proclame une sorte de destinée écrite à l'avance. Chez Genet elle ne crée que de l'ennui et de l'indifférence. Une forme artistique qui ne se justifie pas et qui en plus n'est pas suffisamment originale, en plus d'être peu accessible, n'est vraiment pas intéressante... Qu'est-ce qui justifie l'effort du lecteur ?
Certaines personnes pensent que ce livre peut être rebutant pour son côté "crade. Je dois dire que le livre est vraiment très gentil. Je pensais avoir des descriptions de scènes de sexe, de violence, etc, mais en dehors de quelques paroles et de Genet qui nous parle de l'odeur de ses pets il n'y a rien de très choquant (sauf si vous êtes homophobes). À côté d'un livre de Sade, on est vraiment à un niveau ridicule de transgression, avec les justifications et le sens en moins...
On est aussi déçu du manque d'explication de la fascination que Genet semble avoir pour les criminelles, les assassins, etc. On a une bête description de ses goûts au final... Genet pourrait nous dire qu'il aime la compote ou les chiens que l'intérêt serait le même.
Genet a été bien trop ambitieux ! Un roman décrivant ce milieu avec une écriture plus simple mais maitrisée aurait eu beaucoup plus de sens !