Peste
7.5
Peste

livre de Chuck Palahniuk ()

Les dessous du râle - ça spoile et ça se tripote.

Tout plein de spoilers pour parler de mon livre favori de Palahniuk - d'après mes souvenirs !
Donc c'est surement tordu et ça manque peut être de précisions (je peux aussi me tromper) mais voilà quelques ficelles pour remettre en ordre sa prise neuronale !


RÂLE.
Rant est un personnage très charismatique et étrange qui devient une idole. Il est, de base, une sorte de surhumain à l'odorat et au gout particulièrement puissants, rendu accro au poison après une première morsure et donc obsédé par tout ce qui peut lui donner un shoot, ou une expérience assez forte. Il deviendra une nouvelle Mary Typhoïde, et gagnant en popularité, cela amènera certains fanatiques à vouloir avoir se faire contaminer de la rage ou encore mieux, l'attraper à partir de lui ou de Echo.
Sa simple rage va déboucher sur la loi martiale et ses mises en quarantaine. Ceci couplées avec l'existant système de régulation diurne/nocturne, ça renforcera cette discrimination (temporelle). Sa mort violente sous les caméras mixée avec tout le reste, sa biographie orale nous présente une rockstar involontaire, voir mieux : en le liant à Chet et Green, il obtient en filigrane un rôle divin...

RAGE.
L'épidémie de rage établit également l'atmosphère de la 2nde moitié du livre.
Si seulement la VF portait le nom "Rage", tant qu'à faire... Certes, rien ne vaut le nom d'origine mais bon.
La rage est un élément important, que ça soit, pour Rant, sur la nécessite de vivre une vie dans le présent, ou plus subtilement pour le voyage dans le temps (qui nécessiterait de vivre pleinement dans ce temps présent, quasiment méditatif, pour en créer un temps liminial... avec donc la rage permettant de détraquer la prise neuronale, cela aide à se recentrer - du moins dans un monde qui ne jure qu'avec les transferts...).

RÔLE
Tout comme sa mère obligeant les gens à manger trèèèès lentement, Rant vit uniquement dans l'instant présent, et assez intensément.Pour cela il adopte un comportement à risque, comme tous les personnages de Palahniuk : Tyler est sur la voie de l'autodestruction, Victor s'étrangle, Carl détruit des maquettes avec ses pieds nus, Tender pousse les gens au suicide... L'action brute (se shooter) a donc pour rôle de métaphore (vivre une expérience intense au présent "c'est ce qu'on devrait ressentir à l'église").

RITES
La notion de "temps liminal" sert à débattre sur la perception du temps, la manière dont certaines traditions et rites de passage permettent de ressentir que l'on s'échappe d'une timeline droite et traditionnelle qui illustre l'écoulement du temps qui passe. Si le crashing offre ce temps liminale, ça renvoie aussi à Fight Club, qui n'existe qu'entre son début et sa fin, et où le narrateur dit que plus rien n'a d'importance après. On en sort transformé.
Les séances de Fight Club font partie de ces traditions. Si le rite n'est qu'une expérience spontanée qui n'ouvre pas une évolution à sa sortie, de préférence en marge des conventions (Halloween, les carnavals...) c'est en revanche un "tempis liminoïde"
La tradition/rite de passage est un élément crucial de l'évolution d'un être : noël, la petite souris, le mariage (qui sera réutilisé pour thème de certaines nuits crashing). Palahniuk appuie particulièrement la tradition de "la petite souris", cela parle de comment, depuis gosse, on nous apprend à avoir foi en des choses de plus en plus abstraites pour gagner des récompenses de plus en plus matérialistes... Rant veut vivre la réalité "vraie" et invite les autres à faire pareil, c'est pour cela qu'il joue sur le vrai/faux durant son enfance à Middleton : il prend le rôle de la petite souris et donne aux enfants du coin de vraies pièces d'or valant des fortunes lorsqu'ils perdent une dent ; à la fête de Halloween il met les gosses en contact avec du vrai sang et des vraies tripes...
Il veut forcer la réalité, le réel, à exploser par dessus le mensonge des adultes.

CRASH.
Le crashing est une sorte de fight club à l'aide de bagnoles, mais au lieu d'avoir été conçue par un Tyler Durden, c'est le fruit d'une expérience du gouvernement pour gérer le trafic autoroutier. Il a été découvert que l'effet "dévissage de cou" qu'offre un accident ralentit le flux de voitures rapides.
Et surtout, via ces expériences, certains d'entre eux ont découvert le voyage dans le temps au sein des accidents, instant où le conducteur a toute ses chances d'être en état méditatif et pénétrer dans un temps liminal... ce qui n'est bien sûr pas dévoilé publiquement.
On le sait par les souvenirs d'Echo sur sa mère, je crois que c'est Shot qui résume le crashing à secrètement tenter de traverser le temps. Mais encore, personne ne semble d'accord sur le sujet, on doit se référer aux carnets de Simms pour tout relier.


Voilà de simples clés, remettant les idées en place.
(Ces éléments ont déjà utilisés en commentaire de la critique la plus négative du site) Je reste volontairement vague sur les personnalités de Rant, Charles, Chet, Green, sur la timeline (ou timecircle ?) contenant l'histoire de Peste, et l'auto-création d'une divinité sans origine - c'est surement ce qui a de plus remuant dans ce livre.
MKD
10
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Créée

le 12 sept. 2014

Critique lue 953 fois

5 j'aime

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5

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