Purity
6.9
Purity

livre de Jonathan Franzen (2015)

Fan de Franzen, ce n’est pas le roman que je recommanderai d’emblée, comparé aux plus accessibles : Les corrections ou Freedom. Les fans eux se régaleront à condition de dépasser quelques évolutions dans le texte de Franzen.


Purity est d’abord un très long roman de 743 pages bien denses. Ensuite Franzen y multiplie les points de vue de différents personnages avec un récit éclaté dans le temps… On avance un peu dans un puzzle dont quelques pièces apparaissent peu liées aux personnages ou au sujet traité. Il faudra parfois alors se creuser un peu pour tenter d’en trouver le lien.


Celui-ci semble souvent plus tenir aux problématiques visées : recherche de pureté personnelle, de transparences sociale et politique…
On est parfois décontenancé par quelques événements un peu abracabrantesques, dont une part de légitimité semble reposer sur le choix de la problématique du roman...
Le tout fait un roman étiré, un peu haché et qui ne se donne pas si facilement.


On retrouve le goût prononcé de Franzen pour l’analyse psychologique et les fans de son puissant psychotage apprécieront. Mais l’ensemble des ressentis pour un même personnage au gré des situations laissent un peu hébété, certaines cohérences psychologiques semblent un peu tirées par les cheveux…


On pourra aussi trouver que le traitement de cette thématique de la pureté, de la transparence appliqué tant à des questions de morale personnelle qu’à celles de la société (les lanceurs d’alerte, les contre-pouvoirs du net…) n’atteint pas dans tous ses aspects ses ambitions, même s’il ménage de très, très belles pages... Franzen avait jusqu’ici le mérite de représenter le questionnement moral de sa génération confronté au développement de l’individualisme libertaire des années 60, 70. Là, il s’attaque à l’esprit de lutte horizontale des contre-pouvoirs apparus dans les années 2000 et à leur possible dérive, poussés par des relents de puritanismes américains et d’ailleurs… Il me semble que le tableau politique et social et les interactions sociétales et individuelles restent ici un peu floues… Ou bien à considérer que ces phénomènes sont surtout le fruit de luttes d’égo.


Les fans de Henry James auront sursauté à l’allusion à sa nouvelle « Le motif dans le tapis ». James est l’écrivain du secret ! Le secret est partout comme ressort d’intrigue, comme style… C’est l’art même jubilatoire de vivre !


J’ai adoré à ce titre une tirade très explicite de Franzen où il décrit le secret comme le premier moment constitutif de soi. Une conception à rebours de la pensée véhiculée par l’époque, celle du rêve libertaire où tout peut/doit être exprimé. Une position peu romantique ou moderne, mais tellement classique, dans laquelle la relation au monde passe toujours non pas une incessante spontanéité mais par une nécessaire mise à distance, une médiation, un travail.
Je vous recommande à ce titre, cet excellent article sur le mythe d'Orphée :
http://www.mezetulle.net/article-orphee-la-violence-de-l-accord-parfait-43176652.html


8,5/10

Azbinebrozer
8
Écrit par

Créée

le 12 août 2017

Critique lue 343 fois

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Azbinebrozer

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