"Ring Shout" est un roman de fantasy écrit par P. Djèlí Clark en 2020.
C'est un chef-d'oeuvre, pour faire simple.
On y suit Maryse, une jeune femme noire des années 1920, dans sa lutte contre les klanistes. A la haine raciale sont venus s'insérer des démons, très lovecraftiens dans l'idée, qu'on nommera les Ku Klux. Hantant par la propagande et se nourrissant de la haine raciale, la lutte passe à une étape supérieure. Et de ce point de vue là, Maryse assure: invoquant régulièrement une épée forgée dans les larmes d'esclaves noires, elle vient répandre le chant de la colère et, naturellement, décapiter un certains nombre de monstres à six yeux.
Franchement, que dire de cette maestria?
1) C'est évidemment une mise au service splendide d'un imaginaire contraint à la ségrégation raciale. Les mots de Clark font systématiquement mouche et sont d'une intelligence rare: cette espèce de réflexion sur la haine, la vengeance et la colère est un tour de force incroyable. Y glisser l'imaginaire vient aborder le propos d'un point de vue inédit jusqu'à présent. Et c'est vraiment très, très riche.
2) On assiste ici à la création d'un univers à la fois parfaitement bien construit et extrêmement original. C'est du Barker à l'état pur. Ces créatures, à commencer par Clyde le boucher, sont à glacer le sang. On découvre véritablement un bestiaire fascinant et profondément nouveau, qui vient trancher avec ces espèces de standard croisés encore et encore dans les rayons imaginaires (zombie, dieux anciens, vampires, lycanthropes...). C'est vraiment, vraiment génial.
3) On est absolument scotché par le souffle épique de ce bouquin (pourtant court). On est vraiment scotché plus d'une fois lors de scènes d'action à couper le souffle de tension et magnifiquement chorégraphiées. Clark sait écrire l'action et c'est un régal.
4) Quel style de l'auteur! On vient mêler le dialecte gullah à des discours plus vrais que nature, faisant jonction avec un anglais plus "moderne" et c'est encore une fois un vrai délice. L'immersion est entière.
Je ne sais pas quoi vous dire d'autre. La vérité, c'est que j'ai été proprement soufflé. Si j'avais encore la fougue d'écrire des critiques aussi longues que mes premières, j'aurais disserté pendant des lignes et des lignes sur l'apport d'un bestiaire barkerien à la thématique de la ségrégation raciale. On aurait exploré la figure des Docteurs de la Nuit; on aurait relié les shout au cri de détresse de cette époque abjecte.
Le message final, en revanche, je l'écris littéralement:
RING. SHOUT. EST. UN. CHEF. D'OEUVRE.