L'histoire des îles Chagos: puissant et percutant!

J’ai été attiré tout d’abord par la couverture. En effet, je trouvais que cette jeune femme ressemblait à Frida Kahlo. Puis j’ai pris connaissance du pitch et celui-ci m’a fort intéressé. Je me suis donc lancée dans ce roman historique avec l’appétit de la découverte. Et je n’ai pas été déçue ! Quelle découverte !
Jusqu’à présent j’ignorais totalement l’existence de l’archipel des Chagos au large de l’ile Maurice dans l’océan indien. J’ai pris connaissance avec intérêt et consternation du destin qui a été réservé à ses habitants. De ce traitement indigne dont ils ont fait l’objet. Cette injustice m’a ulcérée et m’a révoltée. Comment peut-on gommer et rayer de la carte tout un peuple et le priver de son droit de sol au nom d’une stratégie politique et militaire !


Par le biais de la « petite » histoire on aborde la « grande ». Ce roman historique, sous couvert de fiction, à travers l’épopée de Marie-Pierre LADOUCEUR, nous fait découvrir la destinée des habitants des iles Chagos. Les « Îlois ». Ceux-ci vivaient dans leur petit paradis, certes chichement, mais heureux. Quand déboule l’indépendance de Maurice, c’est la vie des Chagossiens qui est mis dans la balance. Ils devront quitter leur ile à jamais. Pas de choix, Big Brother a dit.


Les britanniques (alors colonisateur de l’île Maurice) a tout bonnement « acheté » l’archipel et disposé de la vie des autochtones. Sous couvert de classer le site, « site RAMSAR » (réserve naturelle ! quelle ironie !) alors que celui-ci sera « prêté » aux américains à des fins militaires…


A travers le destin de Marie, nous suivrons son bonheur d’abord, de rencontrer ce Mauricien à la classe folle. Un enfant naîtra : Joséphin. La vie coulera, heureuse, jusqu’à ce qu’ils soient chassés et dépossédés de leur terre, de leur identité, de leur droit de sol. Ils seront « débarqués » à Maurice, sans structure d’accueil, ne leur laissant que le choix de rejoindre un bidonville. Sans papier et la plupart sans travail, ceux-ci sombrent dans la misère. L’argent n’existait pas aux Chagos. Le troc oui. Mais avec la ténacité de Gabriel, le mari de Marie, les Chagossiens se révolteront, Marie sera leur porte-étendard, ils déposeront plainte contre la Couronne Royale. Ils n’abandonneront jamais, c’est leur fierté et leur vie brandie en symbole. C’est un combat symbolique, il n’en est que plus important.


Il est question de la trahison de l’île Maurice, de celle de Rangoolam, celui par qui l’indépendance est arrivée. Quel que soit la couleur politique en lice à Maurice, aucune d’entre elle ne remettra en cause la question de la vente des Chagos. Mais Josephin a repris le relais du combat de sa mère, de tous les chagossiens et le porte à l’ONU.


J’ai été scandalisée par ces exactions. Écœurée mais finalement pas trop étonnée. Des vies, s’achètent, des territoires se prêtent… tout est « normal ». Le reste ? des dommages collatéraux ; a aucun moment il n’est tenu compte du fait qu’il s’agit d’êtres humains… C’est « pot de terre contre pot de fer » ; L’Humanité contre la raison d’état. A ce jour et malgré la résolution de l’ONU, l’Angleterre n’a non seulement pas restitué les Iles à Maurice, mais a renouvelé le prêt de ces iles aux USA pour 20 ans…


Alors, la plume est belle, puissante, parlante ; elle nous fait ressentir le mesclun de sentiments des uns et des autres. On ne s’attache pas à un personnage, mais à tous les protagonistes ; chacun ayant un bout d’histoire, une parcelle de vécu apportant chacun une pierre à l’édifice de l’Histoire. La plus flamboyante est certes Maria ; j’ai vibrée, pleurée, ri et été humiliée avec elle. J’ai bouillonné de rage avec elle. C’est moi qui suis montée sur le bateau de l’exil, c’est moi qui aie atterri dans les bas-fonds de la capitale mauricienne. Plus je tournai les pages (à la vitesse grand V) plus j’étais dégoutée.


Ce livre est une très belle réussite, non seulement au point de vue de l’écriture au vocabulaire recherché et très cinématographique, mais aussi pour le fait d’avoir porter ce bout d’Histoire à la connaissance du plus grand nombre. Merci Mme Laurent !

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le 15 juin 2020

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Krys Aline

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