Isabelle Flaten donne voix et vie à Charles Bovary
Quelle belle idée que de vouloir sortir Charles Bovary du flou où l’a positionné Flaubert, quel jeu difficile que de vouloir le faire vivre sans copier Flaubert ! Isabelle Flaten y arrive fort bien et son livre, d’une lecture très agréable, éclaire un homme attachant.
C’est le vœu de sa mère qu’il soit médecin, il ne sera qu’officier de santé, mais qu’importe, elle le marie avec une riche veuve plus âgée que lui, revêche pour augmenter le plaisir. Il passe de sa mère à sa femme sans qu’on lui demande son avis. Que voulez-vous, c’est un bon fils ! Mais attention, ce n’est pas un benêt, un niais, un sot… C’est seulement un bon fils qui apprécie la simplicité, une certaine tranquillité et, surtout, qui voudrait être heureux et…. qui laisse faire la vie.
Et puis vient Emma, fille d’un de ses patients. Dès le premier regard, il sait qu’il est amoureux, épris d’elle et que c’est pour la vie. « Au fil de leurs rencontres, cela se confirme, entre Emma et lui les choses se passent à merveille. »Pour une fois, il se sent acteur de sa vie. Il épouse la jeune fille une fois le délai séant passé. Après quelques mois d’un bonheur parfait, il se rend compte, sans se l’avouer, qu’il n’arrivera jamais à contenter son Emma. Il paiera très cher pour cela. Heureusement, partir au galop sur son cheval, visiter ses malades, les recevoir dans son cabinet le remplissent d’une joie pure et simple. Lui qui a embrassé l’état de médecin pour faire plaisir à sa mère, le devient par passion et s’abonne à plusieurs revues pour augmenter son savoir. Oui, c’est un bon médecin.
Lui qui rêvait d’une vie harmonieuse avec femme et enfants, se retrouve avec une seconde épouse bipolaire, des dettes abyssales, alors, qu’en épousant Emma, il pensait reprendre la main sur sa vie réglée par sa mère. La naissance de leur fille ne change rien au programme. Mauvaise épouse, elle sera mauvaise mère
Isabelle Flaten connaît très bien Madame Bovary, elle décortique les mœurs de l’époque, le mariage arrangé auquel Charles se plie parce qu’il ne connaît pas autre chose. Charles fait partie des notable de cette petite ville provinciale. De ce fait, il est suivi par tous les yeux des voisines qui cancanent à cœur joie lorsque tout va mal.
Gustave Flaubert, lorsqu’il écrit Madame Bovary dépeint les mœurs de l’époque avec une joie féroce, mais… en homme de son temps, y semble bien à l’aise.
J’ai aimé cette lecture, cette revisite côté Charles. L’écriture d’Isabelle Flaten est dansante, changeante, légère avec une touche d’ironie. Comme un impressionniste, elle dépeint Charles par petites touches, sans s’appuyer, tout en lui donnant de la profondeur. Elle fait le portrait d’un homme plus complexe, fragile, mais bien campé dans sa campagne normande. Roman miroir dont j’ai apprécié la pirouette finale malicieuse
Un livre, une écriture qui furent un grand moment de plaisir