L'Inaudible

Mon titre risque de créer une incompréhension que je vais vite tenter dissiper : l'Inaudible que j'évoque n'est pas ce morceau de Stupeflip, en tout cas pour moi. Quand je l'ai entendu pour la première fois - merci les enfants ! -, et chaque fois que je l'écoute depuis, c'est le même plaisir qui domine. Pourtant, j'ai l'impression que la musique en elle-même n'est pas l'argument principal, même si je suis sensible aux loops répétitifs - probablement un reste de mon époque Krautrock -. Non, véritablement, c'est le texte qui m'a plu, bien que j'ai eu l'impression que je ratais quelque chose. Je comprenais bien qu'il y est question de l'enfance, avec l'abord de cette idée un peu facile, celle de "l'enfant intérieur", ritournelle chère aux mouvements actuels liés aux nouvelles spiritualités tendant à l'épanouissement personnel. J'entendais bien qu'il y avait quelque chose de plus profond et plus j'écoutais ce titre et plus je fronçais les sourcils en me disant : "mais qu'est-ce que je rate !?", car ce n'est à l'évidence pas un texte freudien, ni empreint des nouvelles spiritualités que j'évoquais plus haut. Alors quoi ? Et puis tout récemment, j'ai lu un article sur le philosophe Jean-François Lyotard qui m'a fait l'effet d'un coup de tonnerre. C'est une véritable épiphanie que j'ai vécu, bien que je ne sois bien profane vis-à-vis de la pensée de Lyotard. Donc en substance et probablement excessivement schématisé - mes excuses aux vrais philosophes - Lyotard défini l'enfance comme une voix qui serait pour nous inaudible, sourds à ses cris que nous sommes. Et là, la chanson prend pour moi un tout autre sens et je prends clairement pour moi l'engueulade sévère de Cadillac, qui me demande qu'est-ce que j'attends pour écouter le "p'tiot, la p'tiote qui chiale" et me rappelle que l'enfance n'est pas perdue, mais qu'elle est là, "séquestrée, baillonnée, ligotée".
Donc voilà, avant j'aimais beaucoup ce titre. Maintenant, je le trouve simplement génial.