Death Note
7.9
Death Note

Anime (mangas) NTV (2006)

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Que se passerait-il si un être humain possédait les pouvoirs d'un dieu ? Voici une partie de la réponse à cette question que cet anime tente de formuler. Un dieu de la mort (Shinigami) du nom de Ryuk, s'ennuyant fermement, souhaite s'amuser un peu et laisse volontairement tomber un cahier ayant le pouvoir de tuer n'importe qui dans le monde des humains. C'est un étudiant brillant du nom de Light Yagami dans un monde qu'il juge corrompu jusqu'à la moelle qui le découvre et décide, après avoir vérifié ses effets, de bâtir un monde nouveau. Il s'ensuit alors plusieurs face à face somptueux où le moindre faux-pas se paye lourdement.


(Si vous ne l'avez pas vu, foncez tout de suite voir les cinq premiers épisodes avant d'être spoilé !)


Bien que l'auteur n'ai jamais souhaité y incorporer un quelconque message, Death Note, sous couvert de thriller fantastique, nous questionne d'un point de vue moral, philosophique, religieux ou politique : Quel sens a notre existence ? Quels moyens acceptons-nous d'utiliser pour atteindre notre but ? Qu'est-ce qui différencie le Bien du Mal ? La notion de Justice est-elle réelle ? Quand doit-on s'élever contre les règles de droit commun ? Si l'œuvre se garde bien de nous donner des réponses, elle jalonne son sillage de fragments de réflexion, servis avec une ironie douce-amère.


Les personnages sont, au sein de l'enquête, assez recherchés, chacun possède un sens de la justice qui lui est propre. L'évolution de Matsuda est particulièrement séduisante et L hypnotise le spectateur par son aspect repoussant et enfantin et par ses méthodes tortueuses et percutantes. Cependant, il aurait été intéressant (ne serait-ce que d'une partie d'un épisode) d'accentuer l'action sur Hideki Ide au sein de la police japonaise afin d'être moins dépendant du duel Light/L évitant ainsi une cassure brutale par la suite. À ceci s'ajoute les dieux de la mort, finement ciselés, Ryuk en observateur amusé de la situation tragique (une touche d'humour acide appréciable) et Rem en confidente de Misa, honnête mais écœuré par la nature humaine. Une mention spéciale pour Naomi Misora qui méritait peut-être un peu plus de place dans l'anime.


Petits bémols cependant :
- le héros (ou anti-héros, c'est selon) trop parfait (beau, populaire, intelligent...), qui se tient symboliquement (il est au-dessus de la masse humaine) mais perd en réalité et donc en attachement (à titre personnel, j'ai souhaité sa chute dès le début). Néanmoins, son évolution est cohérente, il sombre dans l'orgueil et perd son humanité en essayant d'accéder au rang de dieu ;
- le personnage de Misa est balayé dans la deuxième partie, perdant le cerveau dont elle disposait pourtant dans la première partie. Il ne sert plus que de personnage comique/sexy (on me dira qu'elle n'aura plus de souvenirs, certes mais pas dans l'entièreté de Death Note). Dommage, un personnage conscient d'être manipulé mais choisissant la voix du cœur, quitte à nier la réalité, était intéressant, le potentiel tragique entraperçu par moments aurait pu être grandiose (d'ailleurs, il n'est pas fait mention du pourquoi d'un attachement aussi fort, bien qu'une piste soit présentée en lien avec son passé) ;


Si Death Note est aussi connu, il le doit également à ses musiques, notamment celle de L qui éclabousse l'anime au point de malheureusement noyer celles de ses successeurs, rendant la perte d'autant plus difficile à digérer pour le scénario. Cette musique nous transporte dans un puzzle géant qui s'assemble devant nos yeux illuminés. La chanson de Misa est un chef-d'œuvre de valse tragique d'une gaieté lugubre, illustration d'un personnage à la destinée dramatique s'enfermant joyeusement dans ses illusions. J'ajouterai une nuance en lien avec les deuxièmes opening et ending qui, s'ils représentent bien le tumulte interne de Light, échappent à l'ambiance générale de l'œuvre.


Un autre aspect de cet anime est à relever : la mise en scène. Elle est, dans bien des cas, parfaitement réalisée, la dualité Kira/L marqué par l'ajout de couleurs, le mouvement obsédant des aiguilles, le contraste clair-obscur, tout y est, et cela devient presque dommageable pour l'intrigue lorsque les symboles se substituent à la réalité. C'est là que Death Note perd parfois son chemin. La fin de Mikami, lourde de sens, devient absurde et même ridicule à cause du traitement irréel de l'hémoglobine (si l'anime nous avait déjà exposé à ces effusions, je ne dis pas...). En revanche, la dernière image de Light est saisissante (ni homme, ni dieu, est-il monstre ou dans le Néant ?), tout comme celle de Misa (bien qu'un peu effacée).


Quelques (très rares, c'est à souligner !) incohérences parsèment parfois l'histoire, je ne m'attarderais que sur la scène entre Kiyomi Takada et Mello. Ce dernier est berné par la première pour une question de pudeur... Le même qui ne s'embarrasse pas des méthodes les moins acceptables moralement. Et si l'on songe qu'il devine précisément la suite des évènements (un même nom pour deux Death Note), il concède alors qu'il n'aura pas l'occasion de montrer qu'il surpasse Near ni L et qu'il s'en contente à titre posthume, ce qui est bien loin de son caractère belliqueux. Cette séquence aurait été plus crédible si Near avait été à la place de Mello, en acceptant un peu de naïveté de sa part.


Parmi les grands instants de tension dramatique, le simulacre d'assassinat de Sôichirô s'élève au rang des plus grands thrillers. Dans certaines scènes, l'ironie n'est pas en reste : le premier clignement d'yeux de L (sait-il ou ne sait-il pas pour Light ? Je pencherais pour la première hypothèse) et le soulagement illusoire du père à sa dernière apparition sont criants d'amertume et d'amusement mêlés, tout comme l'inscription de Ryuk sur son carnet, bouclant le spectacle machiavélique (jusqu'au prochain ?).


Death Note est, à ce jour, l'un des meilleurs animes et mérite amplement son rang. Si le rythme s'essouffle à mi-chemin, les protagonistes que sont M et surtout N valent tout de même le détour, avec une fin en apothéose. Un grand moment de vie à croquer sans modération (n'est-ce pas Ryuk ?) !!

Thalacanthe
9
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le 6 mai 2020

Critique lue 128 fois

Thalacanthe

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