Friday Night Lights
7.6
Friday Night Lights

Série NBC (2006)

Two years ago, I was afraid of wanting anything

Friday Night Lights est l'une des séries les plus surprenantes qu'il m'ait été donné de voir. Surprenante à tous les stades. Déjà, chose la plus frappante, c'est que l'on se plaît à suivre, avec une énorme tendresse, des historiettes qui nous auraient paru indigestes si on les avait découvertes dans un autre soap lambda. Mais ici, ironiquement, l'on se retrouve plus à réprimer ses sanglots qu'à rouler de l’œil.


Car les différentes intrigues et sous-intrigues n'évitent pas forcément l'écueil du mélodrame teenage (autour des ruptures amoureuses, des premières fois, des relations parents / enfants, de la crise d'adolescence), mais c'est la manière dont elles sont abordées qui fait la différence : avec une affection infinie et palpable pour ses personnages, Peter Berg effectue le tour de force de transmettre une réelle empathie pour ces derniers.


Par ailleurs, l'utilisation d'une shaky-cam, à grand renfort de zooms et de cuts nerveux, qui pouvait rebuter au début, finit par tomber sous le sens, conférant à la série une ambiance semi-documentaire venant pertinemment embrasser son sujet : l'observation à la limite du naturalisme de Dillon, Texas, dans laquelle nous sommes réellement immergés. Parce que le football américain (dont comme beaucoup je ne connaissais quasiment rien), qui tient lieu de pièce maîtresse dans l'intrigue, apparaît vite comme un prétexte à une prise de vue bien plus large.


Finalement, ça n'est pas tant le parcours glorieux d'une équipe de sport qui nous est contée que celui d'une ville paumée de l'Amérique profonde, dont la religion et le foot sont le seul opium. La critique, parfois difficilement décelable tant Peter Berg semble se résoudre à un fatalisme culturel sans y apposer aucun jugement réel (sur les questions du racisme, de la bigoterie ou du traditionnalisme), se lit davantage dans le cul-de-sac face auquel se retrouvent ses jeunes personnages : coincés dans un no man's land économique sans horizon, ils rêvent de devenir les stars sportives de demain ou d'obtenir une bourse universitaire pour quitter leur bled et ne plus jamais y revenir.


Mais tristement, et dans la plupart des cas, le fantasme finit par revêtir l'habit de la réalité et ces-derniers demeurent enclavés par un déterminisme social étouffant qui ne les mènera nulle-part ailleurs que sur la route de leurs parents (le Texas Forever, crédo de Tim Riggings, et bien qu'il soit répété à la fin de la série, finit par se muer en un désir croissant d'ailleurs).


Ce désespoir latent émeut, et Friday Night Lights se fait à fleur de peau, dans son analyse crue des déchirements existentiels de personnages qui sont entraînés au dépassement de soi par un coach déterminé et encourageant, comme le mirage d'un espoir à contenter pour devenir pleinement soi-même. Et ce sans tomber dans un misérabilisme facile ou un larmoyant plombant.


En fait, je dirais que c'est une peinture ambivalente de l'american dream, qui en dénonce les travers sans jamais clairement se détacher de ses ambitions, ayant ainsi recours à un discours américanisant qui peut agacer. Mais encore une fois, Peter Berg ne fait que montrer, sur un ton subjectivant, sans clairement distiller une opinion claire : les appels à Dieu, les valeurs du mariage (icônisées par le couple Tami / Eric), de l'effort et du travail. Aussi, il est complexe de discerner la morale tenue par certains personnages (autour de l'avortement, du sexe avant l'âge légal, de la drogue) de celle du créateur, rendant problématique toute réelle considération politisante ; tout étant énormément subjectivé.


En tout cas, Friday Night Lights fut une expérience réellement dépaysante et émouvante, que je n'aurais jamais cru autant adorer (et Tyra).


Clear eyes, full heart, can't lose !

Lehane
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 7 sept. 2016

Critique lue 586 fois

3 j'aime

Lehane

Écrit par

Critique lue 586 fois

3

D'autres avis sur Friday Night Lights

Friday Night Lights
Nushku
8

"No sir, my eyes were wide open"

Ce qui fait tout le sel mélancolique et coupable de Friday Nights Lights, c'est bien ce mélange entre drama teenage façon Hartley Coeur à vif et football américain. Avec un tel postulat, l'on n'évite...

le 17 févr. 2011

46 j'aime

1

Friday Night Lights
ludovico
10

Ce n’est pas du mouchoir que viennent les larmes

Allez, un peu de sociologie US ! Les américains se sont créé deux sports terriblement anglais, le foot américain (succédané du rugby) et le baseball (un cricket simplifié). Deux sports similaires à...

le 16 janv. 2014

27 j'aime

4

Friday Night Lights
__Clap
9

Critique de Friday Night Lights par __Clap

Très peu connue en France, cette série adulée par les critiques, un peu boudée par les spectateurs, sort pourtant du lot grâce à sa qualité au niveau du scénario et du jeu de ses acteurs, mais aussi...

le 17 avr. 2010

26 j'aime

8

Du même critique

Skins
Lehane
9

Sometimes I think I was born backwards.

Quand t'as treize ans et que t'es mal dans ta peau, une série comme Skins acquiert rapidement le statut de petite révolution dans ta vie télévisuelle, et dans ta vie en générale. D'ailleurs, c'est la...

le 14 juin 2013

166 j'aime

21

The Last of Us
Lehane
10

Lettre à Ellie

Ça fait quatre jours, moins de quatre-vingt-seize heures, et je ne m'en suis toujours pas remise. Oui, j'ai peur, parce qu'il faut que j'écrive à quel point j'ai aimé The Last of Us. Je dois,...

le 26 août 2014

127 j'aime

41

Scream
Lehane
9

Don't kill me, I wanna be in the sequel !

Le hic avec Scary Movie, c'est qu'en parodiant Scream, il parodie une parodie ce qui, forcément, conjure vers une caricature grotesque et grasse d'un genre qu'avait déjà fait renaître Wes Craven en...

le 19 juin 2014

72 j'aime

13