Pose
7.9
Pose

Série FX (2018)

C'est l'histoire d'une famille recomposée, de laissés pour compte, de pauvres et de beaucoup de blacks et de latinos, à New York, dans les 80-90's. Des personnes qui ne sont pas représentées dans la culture, considérées dans la société, aimées, mais humiliées, ridiculisées, battues parce qu'elles s'épanouissent de manière différente dans leur vie affective, sexuelle, identitaire. Elles ne se définissent pas de manière binaire, homosexuelle ou hétéro, blanche ou noire. Elles ne cherchent pas à rentrer dans des cases, elle sont, elles vivent, elles aiment, en particulier lors de ces soirées du vendredi soir, où elles pavanent, brillent et posent. Elles voguent.


Ryan Murphy étant derrière le projet, il n'est pas étonnant que Pose soit glam, rutilante, pleine de couleurs, de personnages bigger than life mais aussi d'artificialité. Ce que j'ai toujours reproché à cet artiste, comme par exemple dans Feud ou dans la deuxième saison d'American Crime Story, c'est ce côté faux, à l'opposé du naturalisme, qui se déploie ici dans les scènes de bal et de défi entre "maisons", souvent répétitives, et filmées avec excès alors qu'elles sont déjà excessives de nature.


Je pense au contraire que la série Pose n'est jamais aussi belle que quand elle s'éloigne du strass, des paillettes et des fourrures. C'est là que se concentrent les émotions se cachant à peine derrière ces yeux blessés qui dévoilent tout. Quand on apprend, au cours d'une confidence, d'où les protagonistes viennent, à quels sacrifices elles et ils ont survécu, combien cela a dû être difficile de vivre dans le mépris et la rue new-yorkaise. Pose n'est jamais aussi juste quand elle laisse vivre les acteurs et les actrices derrière leurs personnages.


Contrairement à It's a sin (dont voici ma critique : https://www.senscritique.com/serie/It_s_A_Sin/critique/244280852), programmée il y a peu, Pose se veut plus sombre, sérieuse, et dépressive. On n'en sort pas toujours le baume au coeur, mais désarçonné par ce monde. Quand on quitte ces balls du vendredi soir, sous l'influence de la vogue puis de Madonna, entre autre, dans ces années 80-90, on découvre leur vie et on partage leurs problèmes de logement, d'argent, d'amitié, de couple et les problèmes liés à la maladie qui se répand alors : le sida. La scène new-yorkaise est rudement touchée. Les hommes et les femmes, meurent à la pelle, chaque semaine, c'est un nouvel enterrement, une fosse commune, une vie qui s'en va. Les gens meurent vite, trop jeunes, les protagonistes réalisent qu'eux aussi, peuvent mourir, et décident de vivre leur vie pleinement.


Malgré le caractère parfois artificiel de certain.e.s (Elektra Abundance en tête, qui s'humanise enfin dans la saison 3), une narration un peu lisse et mélodramatique de temps à autre, Pose nous fait aimer ses personnages et est très attachante lorsqu'elle s'éloigne du story-telling ou du combat entre les différentes maisons, lors des ball, pour entrer chez eux, leur nouvelle maison, et les faire exister. Comment ne pas se sentir ému par Blanca Rodriguez-Evangelista (Mj Rodriguez), mère adoptive de la maison Evangelista, qui s'occupe de ses enfants, Angel Evangelista (Indya Moore), Ricky Evangelista (Dyllón Burnside) et Esteban Martinez dit Lil Papi Evangelista (Angel Bismark Curiel), entre autre, du mieux qu'elle peut, en leur procurant de l'amour et toute sa confiance.


Un des plus beaux personnages reste celui de Pray Tell, interprétée de manière brillante par Billy Porter. Il apporte une dose d'humanité hallucinante, de véracité bouleversante lorsqu'il voit tous ses amis mourir et qu'il doit lui même lutter contre la maladie. D'un autre côté, son énergie de dingue permet de rendre ses scènes de "compétition" lors des balls folles, et à déjouer la routine. Ses paroles et ses punchlines sont explosives. Rien que pour lui, Pose vaut la peine d'être vue. Mais aussi pour la découverte de tout cet univers d'underdogs qui, pour survivre et lutter contre la culture dominante, se sont regroupés en famille pour mieux s'entraider et s'appuyer l'un sur l'autre pour se lancer dans la vie.

Cambroa
8
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le 25 avr. 2021

Critique lue 248 fois

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