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Sept à la maison : The Haunting of Hill House, une série familiale

« Tant de choses à faire, et si peu de temps ». L’histoire, le(s) genre(s), la mise en scène, les thèmes, c’est à s’y perdre et à se laisser absorber par la complexité et la minutie de la série. Mais est-ce vraiment nécessaire de parler de tout cela ? Cette série n’a-t-elle pas fait couler suffisamment d’encre depuis sa sortie en octobre 2018 ? Non.
The Haunting of Hill House outrepasse son statut de « série horrifique » jusqu’à s’en affranchir. Elle s’ancre dans le réel et nous montre ce qu’il y a de terrifiant dans notre monde en utilisant une histoire de fantôme comme toile de fond. Il ne faut pas s’arrêter à l’aspect de la série, à ce que le titre et les images promotionnelles dégagent, il faut se laisser transporter, planer et absorber par l’histoire de cette série pour s’en rendre compte.
Un père de famille réveille ses enfants en pleine nuit pour fuir de la maison sans sa femme, voici une ouverture de série d’horreur clichée. Ou est-ce vraiment une ouverture clichée ? Encore une fois, non. C’est plutôt une ouverture de série familiale, où combats familiaux, disputes et réconciliations sont à l’appel. Cela est renforcé par la présence d’événements graves auxquels une famille peut être confrontée parmi lesquels peuvent être relevés la drogue et la mort. Finalement, l’histoire de fantôme n’est pas primordiale. « Ce qu’il y a de bien avec les opinions tranchées, c’est que ça relance le débat. En somme, vous êtes une sorte de provocateur, quoi. ».
Une série d’horreur qui utilise le surnaturel comme ressort horrifique mais dont l’histoire de fantôme n’est pas primordiale semble paradoxal. Cependant, c’est dans ce paradoxe que réside la force de la série. Un spectateur inexpérimenté ne se rendra pas compte que la série ne porte pas sur les fantômes et pensera, au contraire, que ces derniers sont la source de peur dans The Haunting of Hill House. Ce qui n’est, en réalité, absolument pas le cas.
Dans cette série, nous n’avons pas peur pour les personnages, nous avons peur tout court. Cela semble être un point négatif de prime abord, mais en y réfléchissant va parfaitement dans la logique de la série. En effet, la série parle du monde moderne et les moments de peur sont constants passant par l’ambiance générale. Ce dont nous avons peur, ce n’est pas que les personnages fassent un mauvais choix, c’est de vivre la même chose que les personnages. Par exemple,

Luke est un drogué et sa sœur jumelle essaie de l’aider en lui donnant de l’argent pour qu’il retourne en cure. Cependant, il rechute toujours.


Ainsi, dans la scène où Luke marche dans la rue en se retournant de manière répétée car il voit un fantôme le poursuivre, n’est pas en réalité une scène horrifique où un homme est poursuivi par un fantôme, mais une scène où un drogué est stone et vit un bad-trip. Qui n’a jamais vu un homme visiblement drogué ou alcoolisé marcher dans la rue en se retournant tous les trois pas et en marmonnant seul.


Une autre raison pour laquelle cette série n’est pas une série dont l’horreur réside dans les fantômes, est le fait que toute la fratrie en veuille à Steven de les avoir utilisé eux et leur histoire à des fins monétaires malgré sa proposition de rémunération en écrivant un livre. Ici, l’horreur réside dans le rejet par sa famille du personnage de Steven, mais aussi dans les mensonges que l’argent fait exister dans une famille. 

Notamment lorsqu’on se rend compte que le mari de Shirley, et Theodora ont accepté l’argent de Steven en le cachant à Shirley.


La série dénonce les problèmes que l’argent provoque.
Enfin, même si elle est quelque chose de fréquent dans le genre de l’horreur, la mort et le deuil sont abordés de manière différente et fraîche par la série. Dans un film ou une série d’horreur classique, tel que la série Scream ou le film Annabelle, lorsqu’un personnage décède, le héros (ou l’héroïne) pleure trente secondes et passe à autre chose. Ici, le décès de la mère et de Nell affectent les personnages de manière irrémédiable et ils doivent avancer malgré le deuil et la hantise du passé.


D’ailleurs, la série se finit sur l’enterrement de Nell qui donne l’idée que les personnages ont enfin fait leur deuil et sont définitivement passés à autre chose et vont cesser de vivre en restant enfermé dans la maison et le traumatisme d’il y a quinze ans.


D’un point de vue contenu, la série est clairement aboutie, mais ce n’est pas son seul succès, bien au contraire. Même si toutes les critiques l’ont déjà évoqué, les plans séquences et le jeu des acteurs sont bien dosés et bien gérés. Il est difficile dans un film et encore plus dans une série d’avoir des acteurs très justes. Cependant, c’est le cas dans cette série. Il y a un épisode, celui des pompes funèbres, qui est un plan séquence d’une cinquantaine de minutes, il n’y a pas de coupure dans tous l’épisode et pas une seule fois dans tous l’épisode on remarque la coupure de la caméra ni même une erreur dans le jeu des acteurs. Même s’il est évident que ce n’est pas un véritable plan séquence, il faut relever la prouesse technique à la fois des équipes de tournage, de montage, d’écriture et bien évidemment des acteurs qui, tous ensemble, rendent l’épisode passionnant et rythmé autant dans les mouvements de caméra et des chorégraphies de déplacement des acteurs, que dans les sujets dont ils discutent et l’histoire que raconte l’épisode.
Si vous appréciez les séries qui traitent de la famille, tout en cherchant du frisson et du surnaturel, The Haunting of Hill House est une série pour vous. Vous y trouverez tout ce que vous y cherchez. Cependant, si vous n’aimez pas l’angoisse ni le surnaturel, ni les séries sur la drogue et les addictions, « allez vous faire foutre ».

Créée

le 2 avr. 2019

Critique lue 184 fois

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