Tokyo Magnitude 8.0
7.5
Tokyo Magnitude 8.0

Anime (mangas) Fuji TV (2009)

En 1923, un séisme de magnitude 7.9 sur l’échelle de Richter frappe le Kantô de plein fouet. Le nombre de victimes avoisine la somme de 141 720 morts. Dans cette boucherie, un chaos incontrôlable qui ramenait Tôkyô à l’état primaire d’une jungle humaine. L’horizon n’était jamais droit. Une infinité de formes géométriques dessinait la région en ruine. C’était il y a presqu’à un siècle d’aujourd’hui.


Tokyo Magnitude 8.0 remémore cette cruauté de la géologie japonaise. Mais nous voilà quelque part dans les années 2000 (peut-être 2009 au vu de la date de sortie du titre? Pas loin en tout cas). On le sait, le Japon se targue d’une réputation d’être au top de la technologie, surtout dans la robotique.
Tokyo a une population incroyablement dévouée. C’est toujours impressionnant de se souvenir de la vitesse de reconstruction de la capitale après les guerres et les catastrophes. Un record.


Dans ce Tokyo flambant neuf, les Onozawa vivent les durs déboires typiques d’une famille japonaise tokyoïte. J’entends par là l’intérêt que portent les japonais pour leur travail avant tout. Pas vraiment un « intérêt », une fatalité plutôt, qui tend les membres d’une famille à passer moins de temps ensemble.
Papa Onozawa revient tard du boulot. Claqué et puant la sueur, il aime vite s’immerger dans la télé, une bière à la main. Sa maxime favorite : « Le diner n’est pas encore prêt ? Regarde l’heure qu’il est ! » qu’il a l’habite de jeter à sa femme. Maman Onozawa, elle, fait tout pour rentrer avant son mari et s’immerger dans la cuisine. Mirai, la grande sœur, subit cette situation en se tenant à distance. On ne rit que trop rarement chez les Onozawa. Il reste encore Yûki, le cadet, un gamin qui ne sait pas se tenir sur place. Littéralement bon enfant, Yûki essaie toujours de faire plaisir à ses parents et à sa sœur. Qui elle, ne le lui rend pas vraiment.
Mirai remarque qu’elle va encore passer ses vacances d’été à glander à Tokyo. Pas comme ses copines, qui aiment se vanter d’aller au Canada. Naturellement, papa et maman tentent tant bien que mal d’affronter la demande de leurs enfants. C’est non, évidemment. Mais il y a Yûki. Yûki est peut-être encore trop jeune pour se faire appeler ainsi mais… disons qu’il est un otaku des robots, une expression qui reviendra plusieurs fois par la suite. Il les aime au point de pousser sa sœur à l’accompagner à Odaiba voir la dernière expo sur les robots. C’est aussi l’anniversaire de leur maman. Accompagné de sa sœur pas vraiment contente d’être là, il cherche boutique par boutique le cadeau idéal. Mirai, elle, se perd dans son portable, l’équivalent de l’oxygène pour elle.


A un moment, Yûki veut aller au petit coin. Mirai l’attend dehors devant l’entrée. C’est à ce moment-là que les oiseaux quittent subitement les berges et que tout bruit s’estompe. Le pont d’Odaiba se déforme en oscillations, on ne sait plus où se trouve le sol à nos pieds. Un séisme de magnitude 8.0 rase complètement les environs. Ce jour-là, la Mort a un emploi du temps très chargé et use de nombreux outils pour atteindre ses victimes – éboulements, tsunamis, incendies, entre autres.
Je me suis souvenu qu’Odaiba était une île artificielle. Il y avait cette tension permanente de voir l’île finir en enclume au fond de l’eau. Quand les vibrations ont cessée, on assiste à un résultat saisissant.
On suivra Mirai qui cherchera désespéramment son petit frère quelque part dans ce qu’il reste d’Odaiba. Elle rencontrera là-bas Mari, une nana altruiste qui l’aidera à retrouver Yûki.


Et je m’arrête là pour le synop.


J’ai rarement vu des animations traiter des tremblements de terre. Ce coup-ci, Natsuko Takahashi le scénariste tend vers le réalisme. C’est particulièrement bien documenté, surtout l’impact psychologique subit par les victimes. Ce séisme de 8.0 n’est qu’à 0.1 point de plus que le plus puissant de l’histoire sismique du Japon, qui était à 7.9. Malgré ce bond qui semble minuscule, le nombre de morts dépasse les 180.000, soit un bond de plus de 40.000 morts. C’est aussi l’époque actuelle, où les infrastructures japonaises sont toutes contrôlées et améliorées pour supporter au mieux les secousses. Et ces améliorations, bien que très modernes, sont carrément insuffisantes quand on voit l’ampleur des dégâts.


Parlons animation. Le titre a de la gueule. «Tokyo Magnitude 8.0 ». « 8.0 ». Ah oui…
Je m’attendais un peu naïvement à voir de belles choses. Ça parle de séisme, de déformation du décor… de beaucoup de mouvement dans tous les sens. Et puis, on a le sympathique studio Bones qui coproduit l’animation avec Kinema Citrus, les gars (et filles) derrière Eureka Seven.
On se remet dans le contexte – 2009. Une année qui remplit bien le bide animé, avec FullMetal Alchemist : Brotherhood ou Bakemonogatari par exemple. Une année techniquement très propre.


L’animation de ce 8.0 m’a parue un peu mièvre, dans le sens où ça manquait d’effets. Mais je me reprends, je sais que je suis dans un anime qui se veut réaliste. Je n’ai pas trouvé d’effets saisissants qui pourraient accentuer la force de la catastrophe. Je n’ai pas cherché ici à voir du Ufotable ou du Madhouse. Je reste juste un peu sur ma faim. Par contre, ce qui me fait plaisir, c’est qu’il évite l’un des pires fléaux de cette industrie, à savoir – les réutilisations de plans. Cela m’a particulièrement embêté dernièrement avec Zankyou no Terror, que j’ai malgré tout bien aimé. L’image se renouvelle sans cesse. On est perpétuellement en mouvement, suivant le long chemin de croix des trois protagonistes.


C’est l’épisode 8 qui m’a laissé un peu sur le cul. Depuis le début, et ici plus que jamais, on adopte le point de vue de Mirai. Dans cet épisode, quelque chose d’important va interrompre la marche des personnages. Les séquences sont imbriquées intelligemment et l’émotion est bien transmise avec des plans qui soulignent bien l’intensité de la situation. Le réveil de Mirai surtout. Vous comprendrez alors tout après avoir terminé la série. La confusion de Mirai, dans cette situation-là, a impactée la mise en scène même. Elle était confuse elle aussi. Quand Mirai s’est réveillée, je sentais quelque chose qui tremblait, qu’il y a eu quelque chose dans ce dernier cut. Mais quoi ?


C’est à partir de là que j’ai commencé à rester sur mes gardes et à observer plus en détail. Je dégustais cette bonne mise en scène. C’est comme ça que j’ai compris à quoi rimait l’ending. Tout m’était clair. L’épisode 10 a confirmé ce que je pensais. Le « 8.0 » du titre n’est pas anodin, il faut aussi le prendre au sens psychologique. J’ai été, comme beaucoup d’entre nous ici, pas mal touché au bout du chemin.


Tant que j’y suis, sur l’animation, à propos des opening/ending. Fait plutôt rare, vous n’y verrez zéro animation (Ok pour l’ending, mais c’est hyper minimaliste). Les planches sont superbes malgré tout et la musique déchire. Le manque d’anim m’était égal à ce niveau-là. Mais certains pesterons sûrement.


Quand je suis une série courte de 11 épisodes, j’ai parfois tendance à oublier la soundtrack. Cette fois-ci, comme j’ai été tenu en haleine jusqu’au bout, je n’ai pas vraiment prêté attention aux musiques. Mais je n’oublierais pas Tashimada, le réalisateur, qui m’a bien eu en traître. Le salaud a placé cette putain de piste tire-larmes sur la plus tire-larmes des scènes de la série. Ce coup en traître. Je me disais que c’était de l’émotion facile et calculée. Et c’est bien le cas hein, c’est gros comme la Tour de Tokyo. Enfin, ce qu’il en reste. Et je me suis fait avoir.


Le story-boarding est donc assez linéaire, puisqu’il s’agit d’un aller simple depuis un point A vers un point B (des points C apparaîtront plusieurs fois cependant). Mari est le pivot moral du trio. De par sa maturité et de son expérience maternelle, elle parvient à redonner un ton optimiste même devant les moments les plus difficiles. Mais elle aura aussi ses instants de faiblesse, elle n’est pas intouchable.


Et on ne le sait pas tous, moi de même avant mon visionnage, mais il y a un « après-séisme » suivant le premier impact. Je parle des répliques sismiques. Des mini séismes de magnitude un peu moindres, vers les 5.0. Il y en aura sur quasiment tous les dix premiers épisodes, jour et nuit. L’anime est sans pitié, la terre semble constamment affamé de vies humaines. Même quand on connaît le sens du prénom de Mirai (« avenir »), qu’on gardait vis-à-vis de ce sens une sorte d’espoir de la voir elle et ses compagnons atteindre leur but, ces répliques viendront nous rappeler que la mort les guète avec zèle.


Un dernier petit mot sur le chara-design des protas. Il est impeccable selon moi. Vraiment, je ne vois pas mieux pour ce genre d’anime. Mirai est une jeune fille de 12 ans et Yûki est un petit garçon de 9 ans. Et ça s’arrête là. Forcément, il faut tendre vers le réalisme, et ça peut donner ce genre de personnage tout à fait banal. Durant les scènes de raz-de-marée humains, ils sont difficilement repérables. Ils sont pourtant bien là, des japonais parmi tant d’autres.


Je finirais avec la note suivante. Tokyo Magnitude 8.0 n’est pas le meilleur anime qui me soit donné à voir. J’ai d’autres favoris qui prétendent à ce titre. Mais le meilleur anime de 2009 ? Pourquoi pas. Dans les trois meilleurs, je veux. Et je n’aime pas vraiment noter en m’appuyant simplement sur le côté technique et l’ensemble des critères habituels que l’on sort pour critiquer une animation. Si je veux être « objectif », je lui mettrais un 8 ou 9. Mais je ne vais pas m’arrêter à cette formalité. Si l’animation se montre capable de me captiver du début à la fin, sans jamais m’avoir fait décrocher un bâillement, et qu’il sache aussi bien jouer avec mes émotions, je veux bien lui servir son 10 sur un plateau d’argent, livré avec un beau pouce vert. Voilà pour lui.

Mottainai
10
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Créée

le 3 mars 2016

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Mottainai

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