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5 juillet 2014: ajout de la saison 3
14 janvier 2015: ajout de la saison 4
Homeland, série multi-récompensée met une pression énorme sur qui tente de la regarder tant on en a parlé, tant on a dit qu'elle est formidable.

Elle l'est. Carrie Mathison travaille pour l'anti-terrorisme à la CIA, elle apprend d'une source qu'un Etats-unien, prisonnier des talibans, a été "retourné". Au même moment Nicholas Brody, soldat prisonnier des talibans depuis huit ans est libéré, Carrie est rapidement convaincue qu'il est cet Etats-unien "retourné". Il ne faut pas aller plus loin dans le synopsis au risque de dévoiler une information de trop, cette série reposant sur le deus ex machina perpétuel.

La plongée dans la lutte contre le terrorisme est totale et frise l'immersion, on suit au fil des épisodes l'évolution des enquêtes, les enjeux politiques et diplomatiques qui se mettent en travers de ces enquêtes. On ne nous épargne pas non plus les luttes de pouvoir et les conflits d'intérêts au sein même de la CIA et au plus haut niveau de l'état.

Il faut le reconnaître, la série débute lentement, le temps de bien ancrer les personnages dans leur quotidien et surtout dans leur passé. Puis arrive un petit événement dans le garage du soldat Brody, qui accroît d'un coup notre intérêt, on nous donne enfin une piste pour comprendre la direction que va prendre la série. Plusieurs thèmes sont alors abordés, qu'il s'agisse de la réinsertion du soldat dans sa vie et dans la société, le rapport qu'entretien Carrie avec Saul, son mentor, l'utilisation du héros libéré à des fins politiques, le rejet que suscitent les USA dans le monde arabe, les terroristes agents dormants, le rapport à la religion. C'est dire si cette série est riche est enrichissante, tout ces thèmes sont abordés fort heureusement sans aucun manichéisme, ce qu'on peut reprocher parfois à NCIS.

Au service de cette histoire, on trouve une brochette d'acteurs (trois surtout) en état de grâce. Claire Danes, si elle n'était pas convaincante dans le Roméo Et Juliette de Baz Luhrmann est ici une révélation, campant avec brio une agent de la CIA handicapée par le fait d'être bipolaire, elle est souvent instable et exubérante, ce qui ne lui simplifie pas la tâche. Damian Lewis, transfuge de Band Of Brothers, est toujours aussi énigmatique, son jeu, son faciès font de lui un acteur à part, qui sait rendre les émotions qu'il fait passer très ambigües, grande qualité qui démontre un grand talent chez un acteur. Mais la vraie révélation de cette série est sans doute possible Mandy Patinkin, mentor de Carrie, protecteur au risque de perdre sa place, autorité naturelle dans le domaine du contre-espionnage, il protège sa "fille" spirituelle et prend parfois les coups à sa place. Son jeu est fabuleux, tout en retenue, passant de l'autorité stricte au paternalisme protecteur, il rappelle fortement le travail de Patrick Bauchau.

Cette série est pleine de promesses de soirées crispantes jusqu'à en tomber de sommeil. Le genre de série dont on se dit encore longtemps après que, décidément, elle est une des meilleures qu'on a vu.

Saison 3:

Etonnant de voir à quel point cette troisième saison d’Homeland a été acueilli plutôt froidement par une partie du public qui lui aurait trouvé, paraît-il, une baisse de régime. Pourtant, tous les ingrédients des deux saisons précédentes sont toujours bien là et n’ont rien perdu de leur redoutable efficacité, cette troisième saison tenant toutes les promesses qu’elle avait faites, jusqu’à un incroyable et inattendu dénouement dont on a toujours du mal à revenir. Homeland garde donc sa place au milieu des meilleures séries actuelles, de celles qui sont en train de modifier le paysage télévisuel aux Etats-Unis, mais aussi le nôtre, avec quelques années de retard.

Le final de la saison deux voyait Brody obligé de prendre la fuite suite à un dramatique attentat, dont il devenait le suspect numéro un, il est maintenant planqué à l’étranger, Carrie a été écartée et Saul est en position délicate à la tête de la C.I.A. dont il est devenu directeur. Tout cela maintient la tension presque physique des deux premières saisons, qui reste toujours l’ingrédient essentiel d’Homeland qui se rapproche beaucoup de 24 sur la forme. D’ailleurs, le twist totalement imprévisible du milieu de saison le confirme, les scénaristes Alex Gansa et Howard Gordon entre autres, ont un immense talent créer les ressorts du rythme d’une série au développement assez lent.

Le montage savant de la série permet tout autant que le scénario, de maintenir ce fameux rythme, tout en prenant le temps de développer une histoire. D’autant que dans cette saison, le téléspectateur voyage encore plus, puisqu’en-dehors des pays arabes et de Etats-Unis, il va devoir faire un tour en Amérique Latine où il assistera à la déchéance de Brody. Mais depuis sa création, Homeland a forgé son identité dès son générique, qui en plus d’être une réussite esthétique, plante le décor en retraçant l’histoire moderne du terrorisme depuis les attentats du 11 septembre 2001 jusqu’à aujourd’hui. D’un point de vue esthétique et formel, Homeland est une série pour laquelle la technique est entièrement au service de la thématique.

Tout comme les acteurs qui sont peut-être le plus beau casting du paysage audiovisuel actuel, d’autant plus que cette saison trois voit débarqué l’immense F. Murray Abraham (Inside Llewyn Davis) en plus des déjà excellents Mandy Patinkin (Princess Bride), Damian Lewis (Band Of Brothers) et bien sûr Claire Danes (Romeo & Juliette), toujours bluffante dans ce personnage d’analyste de la C.I.A., torturé par ses problèmes psychologiques. Tous forment une troupe véritable, qui prend plaisir à jouer ensemble, visiblement ravie de participer à l’aventure Homeland et de contribuer à sa réussite. Car même si la qualité globale des séries made in U.S.A. s’est bien améliorée ces dernières années, Homeland parvient à se hisser encore un ton au-dessus.

Même si ce n’était que pour le dernière épisode de cette troisième saison, il est impératif de la voir, car si cette série est née du traumatisme des attentats du WTC et qu’elle ne cache pas par moments ses opinions républicaines, elle reste d’une efficacité redoutable, ménageant un suspens qui ne faiblit à aucun moment des douze épisodes. Elle est une très belle vitrine de ce qui apparaît désormais comme un « savoir-faire » américain en la matière car, même si chez nous une chaine tente de hausser le niveau des séries hexagonales, il faut bien admettre que le Français moyen a du mal à se sortir de ces séries très politiquement correctes que produit notre système audiovisuel.

Saison 4:

On la disait à l’agonie, cette série d’un nouveau genre qui avait tant fait parler d’elle à sa sortie. Il y avait du vrai pour les saisons 2 et 3, dans lesquelles les sous-intrigues sans réel intérêt avaient tendance à venir combler quelques vides scénaristiques. Mais il y avait aussi un brin d’exagération de la part de quelques fans quelque peu extrémistes, trop heureux d’apparaître plus puristes que les puristes, incapables deprendre ce qui venait, à savoir une légère baisse de régime d’une série qui avait commencé à un rythme épuisant.

On l’attendait quand même, cette saison 4, d’autant que s’il y a une chose qu’on ne peut pas reprocher aux sept scénaristes, c’est de ne pas savoir terminer une saison. Du coup, même avec une baisse de régime, on attend la suivante sinon avec angoisse, du moins avec impatience. Impatience récompensée avec cette quatrième saison, qui conserve les atouts des précédentes : acteurs extraordinaires, stress permanent, atmosphère de danger, de terrorisme international et magouilles au sommet des états protagonistes.

Pourtant, on commence en douceur, si l’on excepte le lynchage du début, la suite (sans manquer d’intérêt), sert à mettre en place une gradation incroyable de maitrise, qui amène sans que l’on puisse s’en rendre compte, à l’apothéose de l’épisode 9. Cet épisode a marqué les fans au fer rouge et reste probablement le meilleur de la série et aller…de toutes les séries en général. Insoutenable est ce qui le qualifie le mieux, pas par la violence des images, mais par un suspens si intense qu’il est difficile à intituler. Le cinéma est un art et ici, le suspens devient un art dans l’art.

Il y a quand même un sérieux bémol, qui peut paraître anodin, mais qui a son importance. Le dernier épisode est, aussi incroyable qu’il paraisse, une véritable catastrophe. Comme un soufflé qui retombe, l’intrigue qui nous avait tenus en haleine, disparaît presque totalement de manière incompréhensible. On s’ennuie ferme, espérant en vain que quelque chose ne se passe et puis…rien ! Rien ne se passe et la saison se termine en eau de boudin, oubliant même de mettre en place cette catastrophe de « dernière minute » qui fait qu’on y reviendra. On croirait presque que les scénaristes se sont trompés, n’avaient de scénarios que pour onze épisodes et se sont retrouvés à « remplir » le dernier. Cette faute n’enlève rien au génie de cette saison…mais ça reste une faute.

Triolisme

Faute à moitié pardonnée face à une Claire Daines qui continue de tutoyer le firmament avec son jeu d’actrice. Il y a du génie en elle, c’est incontestable. Comment expliquer sinon qu’elle soit si convaincante en agent de la CIA bipolaire, aux prises avec une vie privée et professionnelle plus que compliquée ? Elle a été stupéfiante dès le premier épisode de la première saison et son talent ne s’est pas démenti depuis. Et puis non, cette série est une mine à génies car, aux côtés de Claire Danes, Mandy Patinkin et F. Murray Abraham offrent un des plus extraordinaires trios qu’on a vus.

Puis il y a ce générique, aussi soigné que dans la plupart des séries actuelles, qui varie au gré des saisons et au gré des événements géopolitiques mondiaux. Ce générique, qui mélange avec intelligence les tenants et les aboutissants de la menace terroriste et les troubles obsessionnels de Carie. On le sait aujourd’hui, le générique d’une série est devenu le premier contact par lequel le téléspectateur jauge le niveau artistique de ce qu’il va regarder. Plus rien d’étonnant donc à ce que leur symbolique, leur esthétique et leur musique font l’objet d’autant de soins.

Bref, une série qui doit assumer le petit ventre mou que sont les saisons 2 et 3, mais qui vient de donner une gifle magistral à tous les fans qui avaient baissé leur garde. Les deux précédentes manquaient de rythme (difficile d’apprécier les limitations de vitesse quand on a l’habitude de rouler à tombeau ouvert), mais savaient ménager leur dernier épisode, cette fois c’est l’inverse. Espérons que pour la saison 5, les scénaristes parviendront de nouveau à concilier les deux, comme ils l’avaient brillamment fait lors de la première !
Jambalaya
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Créée

le 20 déc. 2012

Modifiée

le 5 juil. 2014

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