" si les choses avaient un sens, ça se saurait, non ? "

Il y a des choses qui ne s'expliquent pas, des sensations improbables qui se vivent en direct. Image marquante de ce début de saison : un garçon mutique débarque chez une jeune femme qui l'est presque tout autant au départ, féline et, on le sent de suite, écorchée vive (dans tous les sens du terme) : quelque chose d'incohérent, d'incongru se créer entre eux, une chose qui ne s'explique pas, sorte de magnétisme improbable que seuls certains évènements peuvent entraîner.

Et c'est ce magnétisme que l'on retrouve dans les longs plans soignés de cette série aux allures de conte fantastique et finalement très humaine sous ses airs de science-fiction. Un magnétisme qui se joue d'une ambiance : cette ville perdue au milieu de nulle part où la mort a frappé 4 ans plus tôt: un bus, des enfants, tous morts... Comment tout un village se reconstruit-il après cela ? Ensemble peut-être alors que c'est dans la solitude que les morts reviendrons, comme fantômes d'abord avant que très vite ils s'installent avec leur sensibilité et leur volonté presque impossible: reprendre sa place autrefois occupée. Mais rien n'est moins simple: seul refuge un peu "confortable" tout autant qu'effrayant: "La main tendue" où un homme croit dur comme fer à la résurrection. C'est presque un hors temps que construit cette série, où l'on est bloqué dans son passé traumatique, où les morts débarquent comme s'ils n'étaient jamais partis, où les tueurs en série sanguinaires renaissent de leurs cendres et où les petits garçons assassinés se retrouvent devant leur meurtrier !

Tout est douleur et déchirement et autour de cela le passé se décrit, se construit, se dévoile. Au présent ? les questions fusent, mais comme la série prend son temps on n'a pas envie d'en savoir trop et ce trop vite parce qu'on est dans un monde où rien ne se rationalise, où ce sont les réactions humaines bien qu'étranges (parce que la situation l'est tout autant) qui comptent... Les réponses viendront, comme il se doit, le tout est de "se poser les bonnes questions" et d'accepter de se laisser entrainer dans les limbes de cette ville merveilleusement filmée, peuplée par des habitants plus ou moins morts-vivants (qu'ils soient les revenants ou les "restants").

Et on a envie de se souvenir d'une autre série "Les vivants et les morts" où l'on entendait ces mots "il y a le possible, et l'impossible... il y a les vivants et les morts." A savoir que les vivants sont "ceux qui peuvent perdre parce qu'ils se battent" donc cherchent à vivre tout simplement et ce au-delà des déchirures qui les fissurent de l'intérieur, fissures parfois invisibles à l'image de cette eau qui baisse sans raison apparente, nos douleurs, nos fascinations, nos rencontres, nos vies ne tiennent qu'à une fraction de seconde, un souffle, un être et on ne sait jamais vraiment ce qui les maintient, la manière dont nos corps, nos esprits vont réagir face à l'inconnu, l'immédiat...

Bref, cette série me fascine de bout en bout et ses acteurs y sont aussi pour quelque chose (Céline Sallette en tête, Clotilde Hesme, Frédéric Pierrot, Anne Cosigny et j'en passe). Tout autant que cette musique annonciatrice du chaos, celle qui se forme comme nos corps vacille, juste avant la chute quand il est déjà trop tard ... Ma note reste inchangée, non je ne suis pas déçue du final et oui jusqu'au bout je suis restée dedans, je ne sais pas ce que j'attendais, surement juste que ces êtres aillent jusqu'au bout de leur quête qu'ils se retrouvent, essayent même s'ils échouent ... Et, qui sait, les revenants ne sont pas toujours ceux qu'on croit ! A suivre ... (s'il y a d'autres saisons)