Sons of Anarchy
7.2
Sons of Anarchy

Série FX (2008)

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Shakespeare chez les Bikers... [Critique saison par saison]

Saison 1 :


Petite série qui monte, "Sons of Anarchy" se place délibérément au centre de la série TV moderne inventée au cours des 15 dernières années, assez proche finalement du modèle "Sopranos" (nœud de complots shakespeariens dans un univers violent, ici, celui des Hell's Angels). David Sutter se débarrasse d'ailleurs vite des tics hérités de son "The Shield" (l'agressivité permanente et le filmage à l'arraché, caractéristiques, forts mais qu'on aimerait pas voir devenir une recette...) et renonce peu à peu aux "effets coups de poing" pour se consacrer à l'observation attentive et empathique de ses personnages : la dernière partie de la saison, qui s'envole vers la tragédie au sens "antique" du terme, et que consacre une mise en scène plus élégiaque, nous autorise à placer de grands espoirs dans "Sons of Anarchy", qui est de toute manière déjà l'une des séries les plus passionnantes de ces derniers mois. [Critique écrite en 2010]


Saison 2 :


A la seconde saison de "Sons of Anarchy", les similitudes avec le formidable "The Shield" deviennent plus flagrantes : confusion morale qui brouille le jugement du spectateur vis à vis des personnages, célébration païenne d'une virilité brutale (le gang, ou plutôt ici, "le club") avec ses règles et ses codes, qui n'empêche nullement la création de superbes personnages féminins (Gemma est certainement le centre magnétique de cette saison), et au final recherche assez idéaliste d'une éthique qui transcenderait les lieux communs. Moins "shakespearienne" que la première saison, cette suite très réussie trace une ligne très nette à ne pas franchir : la véritable ignominie, c'est la haine de la différence (le racisme des "Aryens") et la recherche du profit au prix de l'amour de sa famille (le remarquable Zobelle, immigré hongrois et requin ultime du Rêve Américain). Pas si mal pour une série qui n'a pourtant pas encore obtenu la reconnaissance qu'elle mérite. [Critique écrite en 2011]


Saison 3 :


Dans la troisième saison de “Sons Of Anarchy”, la série qui monte qui monte, les scénaristes tentent la « délocalisation » de l’intrigue, un procédé qui, s’il permet de renouveler enjeux et ambiance d’une série, a rarement donné de bons résultats, tant il semble que la « magie » des séries qui marchent soit liée à une conjonction de paramètres qui fonctionnent exactement ensemble, la localisation géographique étant souvent essentielle à « l’appropriation / identification » (pensez à "Weeds" ou à "Nip/Tuck", dans les deux cas, on a perdu de la crédibilité...). Et de fait, la partie Irlandaise de cette troisième saison est certainement la plus critiquable : on sent qu’il manque un peu de réalisme à cette description sommaire des mœurs de l’IRA et de ses sympathisants ou militants, et que la dimension « sociale » ou « politique » du terrorisme, complètement ignorée par le script, manque à l’appel. Cependant, ces légères réserves sont littéralement balayées quand on comprend, à la toute fin du tout dernier épisode, où les scénaristes voulaient en venir, et quand, dans un final qui est l’un des plus brillants qu’il m’ait été donné de voir dans une série récente, "Sons Of Anarchy" s’élève bien au-dessus de nos attentes, conjuguant son habituel sous-texte « shakespearien » (la grande affaire de la série) avec un mécanisme de thriller formidablement bien ficelé, qui nous laisse admiratifs. C’est tellement fort qu’on regrette presque la perspective d’une Saison 4 ! [Critique écrite en 2012]


Saison 4 :


Au bout de trois saisons excellentes, "Sons Of Anarchy" semble avoir enfin gagné ses galons de "série classique", et il n'y a rien qui puisse nous faire plus plaisir. Cette reconnaissance se traduit logiquement par plus de moyens techniques et financiers, et nous permet de profiter au cours de cette quatrième saison d'une image en scope constamment magnifique, et d'une mise en scène de plus en plus ambitieuse, nettement plus cinématographique. A noter que ce "nouveau classicisme" rompt désormais franchement avec l'héritage speedé de "The Shield", mais convient tout-à-fait à un sujet plus "shakespearien" que jamais (nombreux sont les commentateurs qui se livrent désormais à l'exercice amusant de la mise en parallèle avec "Hamlet"...). On peut en outre oser prétendre que cette quatrième saison est la meilleure à date, grâce à une excellente construction scénaristique, dosant parfaitement scènes d'action, tensions familiales, humour noir, émotions... tout en travaillant respectueusement sur le sujet de fond de "Sons Of Anarchy", ce sombre passé qui n'en finit pas de revenir hanter le présent. S'il faut chercher les poux, on regrettera un certain nombre de redites et de répétitions, et également la construction pas toujours crédible du réseau de mensonges entre les personnages qui conduit à une catastrophe de plus en plus terrible. L'interprétation reste un gros point fort de "Sons Of Anarchy" - même si Charlie Hunman a ici quelques passages à vide -, et on signalera la remarquable apparition de Ray McKinnon, qui compose un personnage halluciné et hallucinant, tout-à-fait remarquable. A noter que, à la différence des saisons précédentes, le dernier épisode - malgré une surprise de taille - n'est en rien un "grand finale", et n'apporte aucune conclusion véritable à l'intrigue, qui continuera donc assez logiquement pendant la Saison 5. [Critique écrite en 2012]


Saison 5 :


Les deux précédentes saisons de "Sons of Anarchy" étaient tellement réussies qu'on peut trouver légèrement plus faible cette cinquième livraison de la série américaine la moins "politiquement correcte" du moment. Cette fois, l'aspect "soap" inhérent au feuilleton - coucheries, jalousies, drames familiaux, amitiés trahies - semble prendre le pas sur les thèmes shakespeariens qui constituaient jusque là l'essence de "Sons of Anarchy", et surtout sur les manipulations sophistiquées qui en faisaient le sel. Même si l'excellence de la toute dernière partie de la saison lui permet de retrouver la grandeur passée, une poignée d'épisodes nous auront auparavant fatigués à force de faire du "sur place" avec des personnages prenant systématiquement les mauvaises décisions ou s'enferrant dans des mensonges qui semblent surtout nés de la fatigue des scénaristes. On pourra également trouver un peu rapide l'évolution du personnage de Jax vers une monstruosité que les précédentes saisons ne laissaient pas entrevoir, et déplorer des excès d'une violence un peu plus graphique qu'auparavant. Tout ceci reste néanmoins de légers bémols à apporter à notre évaluation d'une série trop sous-estimée malgré son originalité et sa force. [Critique écrite en 2014]


Saison 6 :


"Sons of Anarchy" avait atteint un bon niveau au cours de ses dernières saisons, combinant sa fameuse thématique shakespearienne avec des manipulations et jeux de dupes sophistiqués, pour notre plus grand bonheur. Cette sixième saison s'avère par contre un semi-échec, peut-être parce que Sutter et sa bande veulent faire du destin de Jax, désormais seul maître à bord de Samcro, un nouveau Walter White : motivé par le bien de sa famille et de son club, il prend désormais des décisions de plus en plus radicales (et stupides ?), ce qui a pour effet de multiplier les bains de sang... le problème est qu'on n'y croit pas du tout, du fait de l'interprétation toujours très moyenne de Charlie Hunnam, au registre décidément bien limité... mais aussi de certaines mauvaises décisions des scénaristes, en particulier autour de la "trahison" de Tara, gros point faible de la saison pourtant monté en épingle jusqu'à un épisode final plutôt raté, lent et ennuyeux, et se terminant par une tragédie à laquelle on a beaucoup de mal à croire. Le premier vrai faux pas de notre série chouchou post-The Shield, avant une saison finale qu'on sent assez mal partie ? [Critique écrite en 2015]


Saison 7 :


Maintenant qu'elle est finie, avouons-le, "Sons of Anarchy" a quand même été l'une de nos séries TV favorites depuis 7 ans : ce mélange inédit de violence brutale, de drames shakespeariens, de puérilité touchante (ces grands garçons qui sont finalement encore des tous-petits avec leur club de moto et leur règles stupides...), sans parler du portrait oblique d'une Amérique white trash qui cristallise toute la grandeur et la misérable laideur du pays. Et la saison finale a concentré mieux que nulle autre ce qui était grand - le filmage d'une violence impitoyable, foudroyante, la frontalité d'une cruauté indicible, la peinture colorée du gang des motards, le brouillage des frontières entre la Loi et le chaos, l'absence de manichéisme - et ce qui était minable - les petites intrigues familiales sordides, l'interprétation chaotique de Charlie Hunnam, les personnages souvent mal écrits, les scènes maladroites au point d'en être embarrassantes - dans la série. On l'a commencé furieux (le personnage de Jax était ridicule de bêtise, lui qui avait été dépeint comme subtil et machiavélique avant), on s'est retrouvé emballé (par la noirceur absolue de la spirale de violence qui l'a engloutie), on la quittera un peu déçus sur un final saturé de pathos (les adieux, le père, les enfants, les amis, blabla) et de symboles religieux inutiles (la mort christique, le pain et le sang, l'incarnation, n'en jetez plus !) alors que la sobriété épuisée du final de "The Shield" lui aurait si bien convenu. R.I.P. [Critique écrite en 2016]

EricDebarnot
7
Écrit par

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Créée

le 5 avr. 2014

Critique lue 1.6K fois

6 j'aime

Eric BBYoda

Écrit par

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6

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