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Il y a énormément de choses à dire concernant The Woman in the Wall tant c'est une œuvre complexe et intelligente.

Il faut tout d'abord saluer le scenario, reprenant une sombre affaire religieuse irlandaise au cours de laquelle l'Eglise catholique exploitait des filles-mères en les privant de leurs enfants. Le fond est donc lourd, poisseux, sombre, et la réalisation sert magnifiquement cette pesanteur. Nous y reviendrons. Car ce cadre juridico-historique est ici renforcé par les personnages évoluant à l'intérieur, notamment celui principal de Lorna, ancienne "pensionnaire" de ce "couvent forcé", rongée par le somnambulisme, les traumatismes béants et les névroses, et qui essaye de faire la lumière sur cette affaire et de retrouver sa fille enlevée à cette époque. Le cadre est donc posé, entre violence, traumatisme, névrose et vengeance. C'est lourd, c'est complexe, et c'est difficile.

Et comme nous le disions, la réalisation joue le jeu et met très justement ces aspects en valeur. On évolue en effet dans l'obscurité, dans des plans généralement très serrés, engoncés dans une atmosphère musicale obsédante, entêtante, presque omniprésente. On en sait presque autant que Lorna finalement : c'est-à-dire qu'on ne sait rien, on ne comprend rien et ce qu'on sait, on n'est jamais tout à fait certain de le savoir. On a les pièces d'un puzzle sans savoir quel dessin on est censé reproduire. On avance sans savoir si on s'enfonce dans sa névrose ou si on marche vers la lumière. Et à l'intelligence du scénario supplée donc l'intelligence de la mise en scène.

A ce petit jeu d'ailleurs, l'épisode dans lequel Lorna confie à Colman l'existence de "la femme dans le mur" est magnifique : cette caméra qui tourne autour de Lorna, ces sons couplés à la musique rendant presque la scène mystique et inaudible, avec cet interrogatoire de Colman qui ne s'arrête pas de n'en plus finir, ignorant à ce moment la détresse de Lorna est d'une maîtrise et d'une puissance redoutable et symbolise à merveille l'état psychologique de ce personnage et l'ensemble de l'ambiance de la série. On a envie que Lorna craque, que la scène s'arrête, qu'elle relâche enfin la pression : on est empathique - au sens propre - du trouble de ce triste et courageux personnage.

Il faut à ce propos souligner la prestation des acteurs jouant Lorna et Colman, qui sont tous deux bourrés de talent et de charisme. Les jeux de regards, de fatigue et de confession sont justes et d'une redoutable contagion. Leurs yeux - magnifiques - expriment parfois (souvent) bien plus efficacement l'état d'âme de leur personnage que ne l'auraient fait des lignes de dialogues - qui sont généralement très courts et unilatéraux, pour rester dans l'oppression du silence, du non-dit, de la violence traumatique. Les yeux parlent en silence et il suffit d'écouter ce qui n'est pas dit.

Pourquoi 7 alors ? Et pas 9 ou 10 ?

On peut, à mon très humble avis, trouver deux défauts majeurs à la série. D'abord la longueur de ses épisodes qui peut parfois devenir un obstacle et nécessiter un effort. Des épisodes d'une heure à partager la folie de Lorna peuvent s'avérer parfois fatiguant, si ce n'est pénible. Et on se dit que l'économie de 5 à 10 minutes aurait pu être rafraichissant. Parce que cela devient lourd, pesant et oppressant. Mais la série le veut.

D'autant que, et c'est là le second défaut, certaines trames scénaristiques auraient pu être éviter.

La mort d'Aoife, par exemple, est quelque peu ridicule. N'aurait-elle pas pu sauter de tout son poids contre un petit mur en placo ou une trappe dans le sol du grenier ?

Le fait que les deux protagonistes mettent deux épisodes à comprendre que les enfants étaient trafiqués, est un autre exemple. Le spectateur, il me semble, le comprend bien plus vite et regarde une enquête trainer sur place et allonger inutilement la durée des épisodes.

Cela montre que le scénario est parfois bêtement complexifié et rallongé. Et c'est dommage. C'est ce qui fait perdre en qualité une série qui en a pourtant beaucoup.

THobbes
7
Écrit par

Créée

le 20 mars 2024

Critique lue 64 fois

1 j'aime

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