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Une cathédrale qui descend et un lac qui monte

Auréolé des ventes fulgurantes de "Veuillez rendre l'âme (à qui elle appartient)" Noir Désir n'avait qu'à s'engouffrer dans la brèche pour s'assurer un succès facile. Mais un groupe ayant sciemment renié le tube le plus populaire, et le plus vendeur, de son répertoire n'est pas un groupe qui aime la facilité. C'est avec cette liberté de ton qui les caractérise désormais que Noir Dez aborde son troisième opus. Dès la pochette rouge sang le ton est donné, dès les premières notes de "No no no" les différences sautent aux oreilles. Le son se fait plus grave, plus rugueux, plus brut, moins calibré. La guitare se fait moins claire, la rythmique plus syncopée, le chant plus expérimental.

La fièvre qui a toujours caractérisé Noir Désir est toujours là mais elle s'exprime différemment. Bertrand Cantat et sa bande avait fidélisé son public grâce à des performances live survoltés où le chanteur entrait littéralement en transe. C'est cette énergie qui transpire de ce troisième album, celle d'un album conçu comme une performance live. Le mixage brut joue beaucoup dans cette sensation mais on observe aussi que les morceaux jouent sur des ambiances plus diffuses, des ruptures de ton plus fréquentes. D'une manière générale les compositions se font plus ample mais ne perdent pas en densité pour autant.
On pense par exemple au "Zen émoi" qui commence comme un coup de poing de punk dans les roustons avant d'embrayer sur des guitares désorganisées et un chant lancinant et étrange. On pense à "The Holy Economic War" avec sa première moitié mélodique avant un final noisy angoissant... du pur génie.
Les textes poétiques se font désormais plus revendicatifs, plus agressifs, plus percutants. Noir Désir se refuse à la demie-mesure. Si "Tout l'or du monde" atteint une certaine efficacité dans cet exercice c'est avec "En route pour la joie" que le groupe frappe le plus fort. Véritable pamphlet anti-bourgeoisie jouissant d'une tension permanente que l'on croit contenue jusqu'à ce qu'elle nous éclate au visage."La Rage" dont nous parlait Noir Désir dans son premier album est ici de tous les instants, même lorsque les guitares se font moins hurlantes comme sur la très belle "Si rien ne bouge", à la rythmique obsédante.
Parfois la machine se grippe lorsqu'elle tente des exercices plus classiques. Avec son harmonica dansant et son chant plus classique "Charlie" semble se poser comme le ticket d'entrée idéal pour le public, malheureusement la chanson ne présente pas énormément d'intérêt. Il en va de même avec "Les oriflammes" trop anecdotique pour marquer les esprits.

Loin de faire un disque conforme à ce qu'on attendait d'eux, Noir Désir fait un disque conforme à ce qu'ils sont. Une audace qui se paye parfois au détour de certaines chansons moins réussies mais qui offre surtout des joyaux tel que "The Holy Economic War", "En route pour la Joie" ou "Si rien ne bouge". Sur la brèche, énergique, entier, brut, parfois bancale, cryptique... "Du Ciment sous les Plaines" est un disque qui fascine autant qu'il déroute.
Plus difficile d'accès que son prédécesseur, l'album a été boudé lors de sa sortie et il reste encore aujourd'hui comme l'opus mal-aimé de la discographie de Noir Désir. Dommage.
Vnr-Herzog
8
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le 19 avr. 2012

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