La désindustrialisation, la musique et la politique.

Rares sont les occasions où je suis naturellement poussé à évoquer un fait social et économique en guise de critique. Alors oui, ceux qui ne veulent lire qu'une critique sont priés de choisir un écrit plus approprié. Ici, l'objectif est plutôt celui d'un article, ou mieux, une dé-monstre-ation substantielle de la nécessité de présence de Neubauten dans tout l'univers. Rien que ça.

S'il est une polémique récurrente dans le monde de l'indus, c'est bien cette discussion guerrière et légitime entre deux lignes politiques : l'indus provient d'un fait social, à savoir la désindustrialisation.

La désindustrialisation, le chômage a généré une nostalgie d'un temps ancien dans certaines régions comme celle où j'habite. C'est quelque chose de palpable selon que l'on traverse l'Allemagne de l'est, la Ruhr, Liège, Charleroi, le Nord de la France.
C'est logique que les humains, dans leur culture, dans leurs expériences et dans leur ressenti, subissant la violence des ruines, cherche des explications, des raisons à cet état de fait. Neubauten aborde la question sous un jour métaphysique. Mais le jour où cette métaphysique s'entrelace de politique, du vivre-ensemble, c'est tout à coup une métaphysique de l'avenir. Pour moi, on se trouve en dehors de cette recherche de la nostalgie. Dans son rythme brutal, saturé, total et bruitiste, le groupe NON aborde un son clairement protestataire et abasourdissant, mélangé au discours de cette vidéo*, à cette rencontre... Je me prémunis de ce genre de son, je l'exclus parce qu'il ne correspond pas à mes attentes métaphysiques, au-delà de la politique, c'est-à-dire de ce qui est bien ou mal.

Pour ce qui est de la politique, je suis partisan qu'il ne faut rien censurer. Quand je dis "exclure ce genre de son", c'est un non sens si je n'exprime pas de tout de suite après qu'il est "préférable", en revanche, de laisser s'exprimer librement ce genre de courant plutôt que de le reléguer invariablement comme une victime artistique et politique. Je parlais de logique ci-dessus... Cette logique métaphysique, presque physiologique, décompensatoire en tous cas, doit s'exprimer de toute façon (et si j'insiste aussi longtemps sur ce point c'est sans doute parce que les temps récents nous conduisent à (re)penser).

Pour comprendre la pensée Neubauten, j'aime bien voir ce à quoi elle s'oppose :

Boyd Rice et NON en général font partis de ceux qui s'inspirent des ruines et, dans un cynisme noir et particulier, de certaines ruines, des ruines patriotiques, des ruines de la seconde guerre mondiale. C'est une nostalgie que je ne partage pas et, même si les propos sur cette nostalgie sont ou ont été équivoques (terme énoncé au maximum de ma raison), c'est une divergence d'appréhension morale de l'art que je ne confonds pas avec la nostalgie d'un groupe comme Neubauten.
Je ne cherche pas à dire sottement qu'il y a une bonne et une mauvaise nostalgie. Mais plutôt que cette nostalgie ne peut être prise dans le prisme de la nation. Cette considération pour la nation est à mon sens un détonateur et une impasse.

Après, si on veut se la jouer tatillon : non, Boyd Rice, ce Dieudonné croisé avec Chuck Norris, n'a jamais affirmé qu'il faisait des concerts néonazis. Mais a-t-on seulement entendu un jour les partisans du FN dire un jour qu'ils étaient satisfait du travail des chemises brunes ? Mais a-t-on seulement entendu Servier dire un jour qu'il a été responsable de plus de 1600 morts ? Entendra-t-on, en décembre 2013, Jean-Claude Mas regretter son action envers les 30 000 personnes portant des prothèses PIP ?
C'est l'image de la société qui est alors amenée perpétuellement à se questionner sur certains de ces individus, tout ça parce que certains de ces individus ont décrété déléguer leur propre morale aux autres. Si la société est amenée à juger, si je suis amené à juger le groupe NON, ce n'est en aucun cas de l'ordre de ma responsabilité seule puisque cette responsabilité de la moralité a été déléguée.

Donc, j'en viens là où j'ai laissé ma réflexion : la nation est un détonateur. Le désespoir suscité par la désindustrialisation serait du au mondialisme, c'est-à-dire à cet internationalisme qui met en concurrence les différents peuples. De gauche ou de droite, capitaliste ou communiste, certains courants politiques se foutent de savoir comment la richesse est produite ! Ce qui les intéresse c'est : dans quel cadre ? Cet anti-internationalisme me pose problème ; que la musique de NON puisse servir à corroborer pour certains individus le fait qu'il faut protester contre l'internationalisme, protestation qui serait la clé du retour à l'industrie nationale (et donc la fin de cette nostalgie, de ce cynisme autocomplaisant) me pose problème dans la logique. Oui, il faut protester mais avec des questions pertinentes, à commencer par savoir comment fonctionne la richesse, à commencer par incorporer l'idée que les peuples se sont brassés maintes et maintes fois dans l'Histoire de l'humanité qu'il n'y a pas lieu de parler de peuple si on ne veut pas faire de contre-sens historique, économique et culturel (sur ce dernier point, on retrouve chez Neubauten, après 15 ans de noirceur et de colère intériorisée, droguée certainement, on retrouve cette volonté de placer les éléments au-dessus de nous. Quand Neubauten sort sa protestation "Was ist ist" sur l'album Ende Neu, Bargeld commence sa chanson par poser deux postulats : "deux choses sont infinies : l'ignorance et l'espace").

A noter enfin que Boyd Rice est un exemple. J'aurai pu très bien orienter ma critique vers William Bennet ou ces "soupes européanistes nauséabondes, où se mêlent révolution conservatrice, paganisme nordique ou celtique, thèmes guerriers et romantisme noir."**

* http://www.youtube.com/watch?v=--ozbuxSW8A
**http://nksinternational.free.fr/indus.html

Autres liens :
http://www.youtube.com/watch?v=bH7GGg1y88A
http://www.cestentendu.com/2012/04/non-god-beast.html
http://zerez.free.fr/texte/indus/indus.htm et le plus important :
http://zerez.free.fr/texte/indus/duguid.htm
Andy-Capet
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le 11 juin 2013

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