Cette fois, c’est vraiment la fin. Mais quelle fin joyeuse! Avec « Notre-Dame-des-Lacs », le neuvième et dernier tome de « Magasin Général », Loisel et Tripp referment définitivement la boutique de Marie Ducharme et clôturent en beauté leur truculente série québecoise. Le moins qu’on puisse dire est que les deux auteurs soignent leur sortie. On peut même parler d’un véritable bouquet final, car en refermant « Notre-Dame-des-Lacs », le lecteur ressent plus que jamais un sentiment de bien-être. Pour ne rien gâcher, Loisel et Tripp réservent une belle surprise supplémentaire à leurs (nombreux) lecteurs puisqu’ils terminent ce dernier volume par un album photo réunissant tous les habitants du village. Du coup, on peut suivre quelques années supplémentaires de la vie de Marie, Serge, Réjean, Gaëtan et tous les autres résidents de Notre-Dame-des-Lacs, cette petite bourgade constituée de quelques cabanes en bois, perdue au beau milieu des forêts du vaste Québec. Depuis le premier épisode, sorti il y a près de dix ans, le tandem Loisel-Tripp (aidé par Jimmy Beaulieu pour l’adaptation des dialogues en québécois) a pris le temps de raconter par petites touches l’évolution étonnante de ce village, dont le mode de vie a été fameusement chamboulé depuis la mort de l’époux de Marie et l’arrivée de Serge. Lorsque ce dernier, un distingué cuisinier moustachu venu de la ville, a ouvert un restaurant, l’état d’esprit des villageois a en effet commencé à changer de manière assez radicale et inattendue… Bien que l’action de la série se situe dans les années 20, Notre-Dame-des-Lacs a vécu une sorte de Mai 68 avant l’heure. D’ailleurs, dans ce dernier épisode, le village n’a plus vraiment de curé, personne ne sait vraiment de qui Marie est enceinte, tandis que les femmes du village ne pensent qu’à (re)séduire leurs maris avec leurs belles robes de Montréal. C’est bien simple: Notre-Dame-des-Lacs semble être devenue une sorte de club de vacances, voire une communauté hippie! Même Serge et Réjean, qui n’est plus que curé à temps partiel, laissent enfin libre cours à leurs sentiments. Un curé homosexuel: Loisel et Tripp n’ont décidément peur de rien! Mais une fois de plus, leur récit et surtout leurs dialogues fonctionnent à merveille. Dans chaque scène, on sent que les deux hommes ont pris un plaisir fou à animer tous ces personnages savoureux. On imagine qu’ils doivent aujourd’hui ressentir un grand vide après avoir vécu à Notre-Dame-des-Lacs pendant toutes ces années. Mais en même temps, on ne peut que saluer leur décision de mettre un point final à leur histoire, car trop de séries ne parviennent pas à s’arrêter à temps et finissent par s’épuiser et sombrer dans la médiocrité. Ce n’est pas le cas de « Magasin général », qui aura su garder son charme jusqu’au bout. C’est sûr: cette saga s’imposera dans les années à venir comme un véritable classique de la bande dessinée.
matvano
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le 1 nov. 2014

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