... Hé oui, en refermant ce livre, c'est d'abord ce que vous ressentirez : de la frustration, car Tardi a découpé son histoire en plusieurs tomes.

A partir de trois cahiers dans lesquels son père a retranscrit, avec photos et dessins à l'appui, ses souvenirs de la déculottée de juin 1940 puis ses quatre années comme prisonnier de guerre au Stalag IIB en Poméranie, Tardi reconstitue de la manière la plus fidèle possible le quotidien d'un prisonnier de Stalag. Les appels (jusqu'à 5 par jours), le supplice de la pelote (faire faire de la gymnastique à un gars portant deux musettes remplies de briques, pendant plusieurs heures...), la sous-nutrition. Les combines. La difficulté de connaître les informations de l'extérieur. Les délateurs (y'a quand même eu une amicale pétainiste parmi les prisonniers !). La composition du camp, qui change : d'abord des Polonais, puis des Anglais, des Russes et enfin des Américains...

Tardi se met en scène sous la forme d'un enfant qui questionne son père. Souvent le père ne répond pas, sans doute car ses bulles sont formées du texte des cahiers (dans quelle mesure est-il remanié ? On aimerait savoir...). Il y a des répétitions, des tics, des lubies ("Boy, prononcer "bois"" ; "on ne dit pas un tank, on dit un char"). Tardi ne cherche pas à condenser, à supprimer les répétitions, à faciliter la lisibilité : si tu n'es pas content, va te faire voir.

Pour l'écriture, les esthètes pourront donc repasser. En revanche je suis frappé de la proximité de ce style, toujours très engagé et vachard, avec celui de Jules Vallès. Décidément la Commune... Le résultat est imparfait, car Tardi se veut didactique (les petites définitions insérées dans le texte) mais en même temps garde à son récit un côté assez rugueux. Une volonté d'authenticité farouche, au détriment du parti pris esthétique. Il faut s'y faire.

Au niveau graphique, c'est comme pour "Le cri du peuple". Le trait de Tardi est devenu assez gras, mais son souci du détail est intact. Je conseille de lire les deux courtes préfaces, peut-être après avoir lu la B.D., on comprend certaines choses.
zardoz6704
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le 12 mai 2013

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