L'incontournable shôjo gothic fantasy

* Critique originale disponible sur Duotaku no Sora *

C'est un pistolet anti-vampire. Si je perds mon humanité et que je deviens fou... tue-moi. On n'en est pas encore là, mais ce jour finira par arriver. À ce moment-là, finis-en de tes propres mains.

Il y a 10 ans, Yûki se faisait attaquer par un vampire assoiffé de sang puis secourir par un autre vampire pacifique. Il s'agit là de son premier souvenir, elle ne se rappelle de rien avant ce jour.

Aujourd'hui âgée de 16 ans, elle assure la sécurité à l'Académie Cross, une école fondée par son père adoptif où se côtoient la Day Class, les humains qui vont à l’école en journée, et la Night Class, les vampires qui vont à l’école la nuit tout en cachant leur véritable nature aux humains.

Le but de cette école est de faire en sorte que les humains et les vampires puissent cohabiter pacifiquement, mais ce ne sera pas chose aisée car il y aura des dérives non seulement du côtés des vampires mais aussi du côté des humains. Et Yûki ne tardera pas à devenir malgré elle le pont entre ces deux mondes.

Une romance teintée de sang

L'histoire de Vampire Knight se découpera en deux grands arcs.

Le premier arc se passera à l'intérieur de l'Académie Cross où Yûki se retrouve de plus en plus impliquée dans les affaires de la Night Class gérée par son ami, le Président Kaname. La situation viendra encore se compliquer lorsque son camarade de classe Zero va devoir choisir entre devenir Hunter (chasseur de vampire) ou rejoindre la Night Class qu'il déteste. Dans cet arc nous aurons majoritairement affaire à un shôjo assez classique avec l'héroïne un peu naïve prise entre ses deux prétendants opposés. Néanmoins le manga parvient rapidement à se démarquer grâce à son thème des vampires qui lui apporte une part à la fois sombre et plus shônen avec les affrontements contre ceux-ci, mais aussi grâce à ses personnages certes clichés mais plutôt bien travaillés avec les mystères qui entourent leur passé. Ainsi c'est un arc majoritairement school life qui sera dépeint ici, le but étant plutôt de présenter chaque personnage et développer les relations naissantes entre le trio principal, plus principalement entre Yûki et Zero qui vont devoir partager le même secret, mais on appréciera une certaine tension qui règne et une aura de mystère qui entoure les vampires de la Night Class.

Le deuxième arc se concentrera plus sur Yûki et Kaname cette fois-ci puisque le vampire va petit à petit nous livrer ses secrets et nous révéler le passé de Yûki. Mais c'est aussi à partir de ce moment-là que le manga commence a baisser en qualité. On sort complètement de l'école dans cette partie pour partir sur… on ne sait pas trop en fait. Kaname commence soudainement une chasse à l'homme afin d'atteindre son véritable objectif, lançant ainsi Zero à sa poursuite et laissant Yûki derrière lui, ce qui fait que les héros vont passer leur temps à se croiser mais sans se voir. De plus, cet arc aura plusieurs problèmes. Déjà le plot twist du début laisse dubitatif et vient en plus de cela complètement bouleverser les relations établies et la personnalité des différents personnages qu'on a parfois du mal à reconnaître. Mais surtout, on ne comprend pas où l'histoire veut nous emmener. Le rythme est lent, il y a beaucoup des passages à blanc où comme je l'ai dis les personnages ne se confrontent jamais vraiment. Alors certes à mesure que l'histoire avance, elle devient beaucoup plus intéressante et originale, avec une histoire de fond plutôt recherchée et bien plus mature que dans la première partie du manga, certains personnages parvenant également à nous surprendre. Mais tout ça sera au final très mal raconté. Il y a beaucoup de dialogues dispensables et des passages de l'histoire qui restent flous et peu compréhensibles à la lecture, il faudra généralement revenir quelques chapitres en arrière pour remettre tout ça en ordre.

Dois-je vraiment parler de la fin ? Alors le message est joli, oui oui, mais le tout est très très précipité. Mais surtout, le manque de prise de risque de l'auteure est tout bonnement risible, je crois que je n'avais plus vu d'auteur qui n'assumait pas ses idées à ce point depuis FAIRY TAIL.


Vampire Knight démarrait donc bien, voire même très bien pour l'époque, bien qu'aujourd'hui il ait quelque peu vieilli c'est vrai. Mais sa deuxième partie très différente de la première et sa fin sujette à controverses en auront finalement divisé plus d'un.

Perdue entre humains et vampires

Les personnages seront nombreux mais il y en a assez peu qui seront réellement mis en avant.

Yûki est donc l'héroïne du manga. C’est une fille enjouée et dégourdie et avec le coeur sur la main. Si elle a du mal à se faire prendre au sérieux à cause de son côté un peu bonne poire, elle saura néanmoins tenir tête si besoin est. Elle est amoureuse de Kaname et très attachée à Zero avec qui elle a grandi.On peut dire que Yûki est plutôt une bonne héroïne au début de l'histoire puisqu'elle se démarque pas mal des héroïnes habituelles de shôjo avec ses capacités athlétiques et son caractère affirmé. Malheureusement elle perdra rapidement de sa vigueur à partir du deuxième arc où elle affiche un tempérament beaucoup plus mûr et posé mais qui la fera aussi céder à pas mal de choses et à revenir sur ses décisions, ce qui finit par devenir assez agaçant. Je suis donc assez mitigée sur Yûki au final, elle a ses moments mais parfois on aimerait vraiment qu'elle arrête son numéro d'héroïne modèle.

Elle a grandi avec Zero, un garçon lui aussi recueilli par le directeur Cross lorsqu'il était enfant après que sa famille se soit faite décimer par un vampire. Depuis cet incident traumatisant, Zero voue une haine féroce aux vampires et souhaite les voir disparaître. Cela a également fait de lui un garçon taciturne et mal dans sa peau.Là encore, c'est assez compliqué de juger Zero. Si il est un personnage hyper intéressant dans le premier arc centré sur lui de par le dilemme que lui impose l'histoire, il fait malheureusement du surplace total dans la deuxième partie où il devient même quasiment inexistant par moment. Un choix assez peu compréhensible pour un personnage avec un si grand potentiel.

Le frenemy de nos deux protagonistes ne sera nul autre que Kaname, président du dortoir de la Night Class, mais surtout vampire de sang pur respecté de tous. C'est un garçon posé et très mystérieux qui tient beaucoup à Yûki qu'il a sauvé des griffes d'un vampire lorsqu'elle était enfant, une proximité qui n'est pas vue d'un bon oeil par ses congénères. Kaname est un personnage très accrocheur. Perpétuellement entouré d'une aura de mystères, le manga finira par mettre tout son potentiel en avant au fil de l'avancée de l'intrigue et à mesure qu'il se rapprochera de Yûki. Néanmoins cela se fera également de manière assez inégale, certains de ses choix et agissements restant pas mal incompréhensibles par moment du à une narration confuse.

On retrouve donc un trio plutôt classique avec l'héroïne aux grands idéaux, son ami d'enfance rejeté de tous et le beau prince de l'école inaccessible qui fait tourner toutes les têtes. Une rivalité se créera bien évidemment entre les deux prétendants, occasionnant un développement intéressant et plusieurs scènes fortes (et probablement une des plus grosses guerre de fandom jamais créée. Dites simplement « Team Zero ou Team Kaname ? » à quelqu'un, je vous assure qu'il saura quasiment à chaque fois à quel manga vous faites référence !). Le trio est donc efficace, on regrettera cependant que celui-ci finisse par s'effriter à mesure qu'avance l'intrigue, l'évolution de chacun des personnages étant assez mal fichue en globalité.

En dehors de ce trio, on peut noter la présence de plusieurs vampires et humains plutôt intéressants (bien que les personnalités un peu plus vivantes comme celle d'Aidô se fassent vraiment trop rares) mais malheureusement trop peu exploités. Pourtant ils ont du charisme et du potentiel mais à peine sont-ils mis sur le devant de la scène qu'ils disparaissent aussitôt au profit du trio principal. On finit donc par ne plus attendre grand chose d'eux, ce qui est grandement dommage.

Une identité visuelle forte

Le manga possède une très belle patte graphique !

Les grands yeux et les pages chargées typiques des vieux shôjo de cette époque sont légion mais en contrepartie, les dessins d'HINO Matsuri sont magnifiques et les chara designs à la fois simples mais accrocheurs et variés. On notera des personnages aux traits assez androgynes avec des corps aux proportions longilignes bien que possédant des contours assez marqués et carrés au début de la série. Le manga possèdera également une identité visuelle plutôt romantique et féminine qui permettra au manga d'être facilement reconnaissable. Mais l'oeuvre se démarquera surtout par ses plans intelligents avec une grande force dans la mise en scène et un découpage des cases des plus original. J'aime particulièrement l'utilisation des trames faite par l'auteure qui sont assez variées et qui se fondent bien avec le reste, ainsi que l'ambiance assez pesante et gothique du manga qui ne perd pas de charme au fil des tomes.

Le problème vient cependant comme je l'ai déjà dis plus haut de la narration. Si le manga se lit bien et sait être divertissant avec un humour efficace et bien dosé et des scènes fortes particulièrement bien maîtrisées, il ne sera cependant pas rare de ne pas trop savoir sur quel pied danser. Le rythme est particulièrement étrange, parfois trop lent, parfois trop rapide, on s'y perd aussi dans l'intervention des personnages qui semblent souvent surgir de nulle part.

On ne pourra également pas passer outre le côté très emo teenager qui en fait toujours des caisses, avec des personnages qui rajoutent du malheur sur leur malheur pour faire encore plus de drama dans le vent. Car oui, Vampire Knight avouons-le nous, c'est aussi notre petit plaisir coupable. Celui avec toutes les ficelles des shôjo de romance poussés à l'extrême et ses héros bien trop clichés qui se croient trop cool et mature du haut de leur 15 ans. Mais c'est justement bien pour cette raison que ça marche ! Car Vampire Knight sera en fait un savant mélange entre ce qui se fait à la fois de pire mais aussi de mieux dans le genre, sachant vous désillusionner comme jamais, tout comme vous faire vibrer intensément.

Bref, une ambiance très travaillée mais avec une narration parfois assez bancale, notamment sur le deuxième arc qui a tendance à s'étirer en longueur pour pas grand chose. Et surtout, une lecture quand même très orientée adolescent qui, à la manière de la saga Twilight, aura très largement divisée les fans de mangas entre ceux qui adulent l'œuvre et ceux qui la trouve absolument déplorable.

 L'incontournable shôjo gothic fantasy

Vampire Knight est un bon shôjo avec une histoire originale et un univers qui lui est propre. Je le qualifierai même de très bon pour sa première partie qui était vraiment prenante et d'un nouveau genre pour l'époque, bien que le tout soit devenu un peu éculé depuis, notamment avec son côté très mélodrame pour adolescentes et son triangle amoureux archi classique. Malheureusement la deuxième partie se révélera être particulièrement fouillis et souffre de peu de défauts sur le fond mais de défauts trop importants sur la forme pour ne pas être pris en compte, sans oublier la fin très controversée.

Un incontournable du shôjo qui n'aura pas usurpé son succès mais qui aura finalement eu du mal à tenir sur la durée.