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Entre film de gangsters punchy et bleuette sur fond de hip hop, Divines est une belle claque, dont il faut toutefois relativiser la portée politique qu’on tend souvent à lui prêter.



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Premier film de Houda Benyamina et caméra d’or à Cannes, le film suit Dounia et Maimounia, deux ados meilleures amies, qui rêvent de s’extirper de leur banlieue. Dounia choisit le plus court chemin pour y arriver en se faisant engager comme dealeuse par la trafiquante du quartier. S’ensuit alors un classique – d’aucuns diront conservateur – récit de descente aux enfers, Dounia entrainant peu à peu Maimounia dans sa chute.


Disons-le de suite : Divines est un bon film. C’est un bon film avant tout par l’intensité et la richesse du personnage de Dounia : obstinée, entière, enragée, blindée, elle veut tout et tout de suite, sans compromis. De son bidonville sans eau courante, celle-ci voit l’argent en quantité comme la clé de son bonheur : « money, money, money » répète-t-elle comme un mantra tout au long du film. C’est le sens de cette magnifique séquence du début lors de laquelle Dounia confronte violemment sa prof de BEP Accueil, en lui demandant le sens de ces études si c’est pour gagner 1 500 euros par mois. Elle en a bavé et en bave encore. Dès lors la vie a comme une dette envers elle et Dounia refuse à tout prix d’effacer l’ardoise, même si, in fine, c’est à elle que cela va coûter très cher.


Houda Benyamina raconte aussi une belle histoire d’amitié, qui doit beaucoup au talent de ses interprètes, et en particulier d’Oulaya Amamra, qui crève l’écran dans le rôle de Dounia. Entre deux scènes de violence crue, Divines connaît ainsi de nombreux moments de grâce, quand l’humour fuse ou encore lors des scènes de complicité enfantine comme hors tempo, notamment lorsque les deux amies se visualisent au volant de leur Ferrari, transportées dans leur voiture invisible.


Je suis moins convaincue par l’histoire d’amour entre Dounia et le vigile à Carrefour/danseur de hip-hop, donnant lieu à des scènes incroyablement niaiseuses et à des dialogues dignes d’un mauvais téléfilm. Outre le fait de relâcher la tension, cette story line offre toutefois un contrepoint intéressant : contrairement à Dounia, le garçon dont elle est amoureuse est prêt à assumer un boulot alimentaire peu intéressant et à trimer en parallèle pour vivre sa passion.


Cela étant dit, Divines est-il un « film politique » voire même « le renouveau du cinéma politique » comme le titrait Télérama début septembre ? Je ne le crois pas. Le discours cannois de Benyamina (lors de la remise de son prix) était, lui, fortement engagé et politique, mais son film ne l’est pas. S’il n’est évidemment pas totalement neutre, ce n’est pas un pamphlet contre le déclassement, ni même un discours sur la précarité sociale des banlieues. Le fait qu’un film prenne pour décor la banlieue n’en fait pas un film politique pour autant. De même le fait que les personnages principaux (« méchant » inclus) soient des femmes, ne suffit pas à en faire un film féministe.


Halte à la confusion et aux critiques un poil condescendantes et/ou misérabilistes ! Divines est à prendre pour ce qu’il est : l’histoire d’une fille qui ne lâche jamais rien, quitte à mettre sa vie en l’air.


Plus de critiques sur Entre film de gangsters punchy et bleuette sur fond de hip hop, Divines est une belle claque, dont il faut toutefois relativiser la portée politique qu’on tend souvent à lui prêter.


Premier film de Houda Benyamina et caméra d’or à Cannes, le film suit Dounia et Maimounia, deux ados meilleures amies, qui rêvent de s’extirper de leur banlieue. Dounia choisit le plus court chemin pour y arriver en se faisant engager comme dealeuse par la trafiquante du quartier. S’ensuit alors un classique – d’aucuns diront conservateur – récit de descente aux enfers, Dounia entrainant peu à peu Maimounia dans sa chute.


Disons-le de suite : Divines est un bon film. C’est un bon film avant tout par l’intensité et la richesse du personnage de Dounia : obstinée, entière, enragée, blindée, elle veut tout et tout de suite, sans compromis. De son bidonville sans eau courante, celle-ci voit l’argent en quantité comme la clé de son bonheur : « money, money, money » répète-t-elle comme un mantra tout au long du film. C’est le sens de cette magnifique séquence du début lors de laquelle Dounia confronte violemment sa prof de BEP Accueil, en lui demandant le sens de ces études si c’est pour gagner 1 500 euros par mois. Elle en a bavé et en bave encore. Dès lors la vie a comme une dette envers elle et Dounia refuse à tout prix d’effacer l’ardoise, même si, in fine, c’est à elle que cela va coûter très cher.


Houda Benyamina raconte aussi une belle histoire d’amitié, qui doit beaucoup au talent de ses interprètes, et en particulier d’Oulaya Amamra, qui crève l’écran dans le rôle de Dounia. Entre deux scènes de violence crue, Divines connaît ainsi de nombreux moments de grâce, quand l’humour fuse ou encore lors des scènes de complicité enfantine comme hors tempo, notamment lorsque les deux amies se visualisent au volant de leur Ferrari, transportées dans leur voiture invisible.


Je suis moins convaincue par l’histoire d’amour entre Dounia et le vigile à Carrefour/danseur de hip-hop, donnant lieu à des scènes incroyablement niaiseuses et à des dialogues dignes d’un mauvais téléfilm. Outre le fait de relâcher la tension, cette story line offre toutefois un contrepoint intéressant : contrairement à Dounia, le garçon dont elle est amoureuse est prêt à assumer un boulot alimentaire peu intéressant et à trimer en parallèle pour vivre sa passion.


Cela étant dit, Divines est-il un « film politique » voire même « le renouveau du cinéma politique » comme le titrait Télérama début septembre ? Je ne le crois pas. Le discours cannois de Benyamina (lors de la remise de son prix) était, lui, fortement engagé et politique, mais son film ne l’est pas. S’il n’est évidemment pas totalement neutre, ce n’est pas un pamphlet contre le déclassement, ni même un discours sur la précarité sociale des banlieues. Le fait qu’un film prenne pour décor la banlieue n’en fait pas un film politique pour autant. De même le fait que les personnages principaux (« méchant » inclus) soient des femmes, ne suffit pas à en faire un film féministe.


Halte à la confusion et aux critiques un poil condescendantes et/ou misérabilistes ! Divines est à prendre pour ce qu’il est : l’histoire d’une fille qui ne lâche jamais rien, quitte à mettre sa vie en l’air.


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Premier film de Houda Benyamina et caméra d’or à Cannes, le film suit Dounia et Maimounia, deux ados meilleures amies, qui rêvent de s’extirper de leur banlieue. Dounia choisit le plus court chemin pour y arriver en se faisant engager comme dealeuse par la trafiquante du quartier. S’ensuit alors un classique – d’aucuns diront conservateur – récit de descente aux enfers, Dounia entrainant peu à peu Maimounia dans sa chute.


Disons-le de suite : Divines est un bon film. C’est un bon film avant tout par l’intensité et la richesse du personnage de Dounia : obstinée, entière, enragée, blindée, elle veut tout et tout de suite, sans compromis. De son bidonville sans eau courante, celle-ci voit l’argent en quantité comme la clé de son bonheur : « money, money, money » répète-t-elle comme un mantra tout au long du film. C’est le sens de cette magnifique séquence du début lors de laquelle Dounia confronte violemment sa prof de BEP Accueil, en lui demandant le sens de ces études si c’est pour gagner 1 500 euros par mois. Elle en a bavé et en bave encore. Dès lors la vie a comme une dette envers elle et Dounia refuse à tout prix d’effacer l’ardoise, même si, in fine, c’est à elle que cela va coûter très cher.


Houda Benyamina raconte aussi une belle histoire d’amitié, qui doit beaucoup au talent de ses interprètes, et en particulier d’Oulaya Amamra, qui crève l’écran dans le rôle de Dounia. Entre deux scènes de violence crue, Divines connaît ainsi de nombreux moments de grâce, quand l’humour fuse ou encore lors des scènes de complicité enfantine comme hors tempo, notamment lorsque les deux amies se visualisent au volant de leur Ferrari, transportées dans leur voiture invisible.


Je suis moins convaincue par l’histoire d’amour entre Dounia et le vigile à Carrefour/danseur de hip-hop, donnant lieu à des scènes incroyablement niaiseuses et à des dialogues dignes d’un mauvais téléfilm. Outre le fait de relâcher la tension, cette story line offre toutefois un contrepoint intéressant : contrairement à Dounia, le garçon dont elle est amoureuse est prêt à assumer un boulot alimentaire peu intéressant et à trimer en parallèle pour vivre sa passion.


Cela étant dit, Divines est-il un « film politique » voire même « le renouveau du cinéma politique » comme le titrait Télérama début septembre ? Je ne le crois pas. Le discours cannois de Benyamina (lors de la remise de son prix) était, lui, fortement engagé et politique, mais son film ne l’est pas. S’il n’est évidemment pas totalement neutre, ce n’est pas un pamphlet contre le déclassement, ni même un discours sur la précarité sociale des banlieues. Le fait qu’un film prenne pour décor la banlieue n’en fait pas un film politique pour autant. De même le fait que les personnages principaux (« méchant » inclus) soient des femmes, ne suffit pas à en faire un film féministe.


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Camille_Pierrard
7

Créée

le 20 sept. 2016

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