Eastwood déçoit, une fois de plus.
Pour son dernier long-métrage, Clint Eastwood a choisi de retracer l'histoire de John Edgar Hoover, créateur et premier directeur du Federal Bureau of Investigation (FBI). Dans l'attente d'un grand film "à la Eastwood", J. Edgar n'est finalement pas à la hauteur des précédents films du réalisateur. Explications.
De ses débuts dans les années 30 de la Prohibition jusqu'à sa mort en 1972, J. Edgar Hoover s'est hissé au rang d'un des hommes les plus puissants d'Amérique. A la tête du FBI qu'il a créé de toutes pièces alors qu'il n'avait que 29 ans, il a participé de près ou de loin à tous les évènements les plus marquants du XXe siècle aux Etats-Unis. Le film retrace l'ascension de cet homme mystérieux, à la vie entachée de zones d'ombre.
Après Bird (1988) et Invictus (2009), Clint Eastwood renoue avec le genre biopic en s'attaquant cette fois-ci à la sombre carrière du premier directeur du FBI. Au grand dam des aficionados du réalisateur, l'un des défauts majeurs de J. Edgar est sans nul doute son manque de "punch" : à l'instar de Nixon (d'Oliver Stone, 1995) le film ne fait que survoler quelques moments de la vie du personnage qui n'apprennent au final pas grand chose de plus aux spectateurs non avertis.
Ainsi, le film nous donne cette fâcheuse impression d'avoir été bâclé, due sans doute à l'erreur d'Eastwood de s'être concentré trop longuement sur des détails de la vie de Hoover qui ne sont pas assez captivants pour constituer une bonne intrigue. Par exemple, la mort du Président Kennedy n'est abordée que lors d'un très court échange entre Hoover et Robert Kennedy, sans rentrer dans les détails qui auraient été intéressants à développer. Il en va de même pour l'arrestation de John Dillinger, très peu évoquée. En bref, Eastwood a choisi d'approfondir la relation qu'Hoover entretenait avec son protégé et second Clyde Tolson, délaissant ainsi les grands évènements historiques dans lesquels le personnage a été impliqué.
Côté casting, la prestation de Leonardo DiCaprio sauve clairement le film à elle seule. Toujours aussi talentueux, l'acteur incarne à la perfection Hoover aux différents stades de sa vie, même sous la tonne de maquillage utilisée pour qu'il paraisse avoir près de 60 ans. Mais question maquillage, il n'en va pas de la même réussite pour Armie Hammer qui interprète Clyde Tolson, dont le masque est tellement flagrant qu'il en devient ridicule. D'autre part, Judi Dench est criante de vérité dans le rôle de la mère possessive qui sacrifierait sa vie pour la réussite de son fils. Enfin, Naomi Watts pâtit malheureusement d'un rôle bien trop discret et pas assez approfondi...à l'image du film.
Si la réalisation d'un point de vue purement technique est quasiment irréprochable (plans maitrisés, belle photographie...), J. Edgar se place au rang des déceptions dans la carrière d'Eastwood derrière la caméra, déjà entachée par le précédent Au-delà qui avait recueilli des critiques acerbes mais néanmoins justifiées. Si le film n'est pas non plus totalement raté, loin de là, il n'est clairement pas à la hauteur de nos attentes. L'homme qui nous a plus d'une fois surpris par le passé avec des œuvres parfaitement maitrisés aurait-il perdu sa veine? L'avenir nous le dira.