Dans le feu des possibles...
Lors des bombardements de 1940 en France, la petite Paulette perd sa famille. Elle rencontre alors le jeune Michel Dolle, des quelques années son ainé avec qui elle se noue d'amitié.
Tournée en 1952, Jeux interdits traite d'une époque noire et aujourd'hui révolue et pourtant a fois terriblement intemporelle.
Au travers des deux jeunes acteurs que Georges Poujouly et Brigitte Fossey, René Clément montre la France isolée, finalement peu au fait de la condition Européenne de l'époque mis a part le danger immédiat qui rode au dessus de leur tête.
C'est alors toute l'innocence du monde qui est mis à mal dans le rapport que lie ses deux enfants et les relations de la micro société qui les entourent.
L'ignorance qui les caractérise est tout autant une vive critique des classes populaires que la naissance d'une fraternité touchante et pleine d'humanisme dans un monde qui a faillit sombrer au même moment.
Les deux enfants sont remarquables, a vrai dire, je n'ai jamais vu de film avec des enfants acteurs aussi bons.
La petite Brigitte Fossey est extraordinaire en récente orpheline totalement perdue et le jeune Georges Poujouly en garçon téméraire, près a tout pour rendre le sourire à Paulette.
Le climat qui règne est a la fois sensible et horrifiant; chaque personne entourant le jeune couple faisant preuve d'autant de violence morale que d'égoïsme malgré le pays en Guerre. Les luttes intestinales rongent les deux familles voisines, chacun défendant ses intérêts, autant les parents que les jeunes adultes ou les adolescents, l'innocence ayant disparu de ces anti héros, qui ne luttent ni pour leur patrie, ni pour leur semblable, mais uniquement pour eux et le confort qu'ils réclament.
La caméra est elle assez classique et le film me semble avoir été tourné avec un budget absolument ridicule. Est ce lié a l'époque ou au contraire pour coller a cette image de monde populaire, je ne sais pas, mais il en résulte une forte impression de rudimentaire et poignant a la fois.
Pourtant certaines scènes, comme celle avec le chien au début ou la nuit avec les deux enfants sont époustouflantes et suscitent de vive émotions.
La musique de Narciso Yepes est sublime, comme l'était ce musicien hors pair, qui joue avec sobriété le début de cet air mélancolique et radieux a la fois. Une sorte d'hymne qui colle à l'œuvre même dans l'inconscient collectif d'ailleurs.
Le film a fait l'époque près de 5 Millions d'entrées, et il est absolument dramatique de voir selon moi l'évolution qu'a eu le cinéma populaire depuis 50 ans et ce que sont devenus les films grands publics.
Peu a peu, les auteurs se sont changés en producteurs, la sensibilité a été remplacé par les gags et les dialogues par des "punchlines" bonne qu'a être recyclées sous forme de compilation indigestes sur internet.
Jeux Interdits est autant une ode au temps perdu qu'a l'amour universel.
Mais c'est aussi un rappel acerbe de la couardise dont peuvent faire preuve le gens, même ceux qui souffrent.
Surtout lorsque se lève l'aube des sombres heures de l'humanité.