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Amoklauf
3.6
Amoklauf

Film de Uwe Boll (1994)

Chaque jour le même rituel, se lever, boire son café, allez travailler, puis rentrer chez soit se biturer devant des conneries de sitcoms et le journal TV avant de se palucher et d’aller se pieuter pour recommencer la même chose le lendemain. Tous les frustrés ont bien un point commun, c’est celui de canaliser leur névroses par le même rituel quotidien qui tende à les rassurer, mais également à les enfermer dans leur obsessions au point de faire abstraction avec le monde qui les entoure jusqu’au jour où ils finissent par entrer en collision avec la société pour revendiquer leur (in)humanité. La redécouverte d’un film tel que Amoklauf permet de mieux cerner la personnalité décrié de son auteur, qui a fini par cultiver cette réputation de « Master of error » que la presse spécialisé lui a attribué à raison ou à tort. Les journalistes et bloggeurs ont désormais coutume de lui chier dans les bottes au point d’occulter certaines de ses réussites si bien qu’il a fini par prendre son rôle de vilain petit canard à bras le corps. Mais c’est aussi le problème de ce réalisateur clivant qui a toujours cherché à se faire remarquer par ses frasques, plus que par son intelligence et la qualité de son travail qui fût parfois reconnu dans le cas de Heart of America, Stoic ou Rampage. Si Uwe Boll a également pu réaliser autant de films, c’est bien grâce au système de financement allemand, et ce qui l’explique dans son livre Comment faire du cinéma en Allemagne. Et si d’autres confrères du splatter underground allemand (Andreas Schnaas, Jörg Buttgereit ou Olaf Ittenbach) pourraient apparaître bien moins respectable au vu de la teneur et de la violence graphique de leur films, ils s’avèrent finalement bien plus talentueux que lui, puisque le cinéaste n’a malheureusement pas vraiment de « style » pouvant lui permettre de s’identifier comme un véritable auteur si ce n’est quelques thématiques récurrentes, comme la frustration, les massacres, la guerre, la violence et la mort qui semble exprimer un profond mal-être existentiel et une profonde misanthropie.


Comme avec cette vivisection d’un poisson dans un restaurant, il s’agira d’observer le quotidien d’un quarantenaire frustré qui ne croit plus en rien, reclus dans son appartement et exclus de la société même quand celle-ci cherche à lui tendre la main (la voisine devant son porche d’entrée), il préférera l’esquiver en refoulant toutes ses émotions. Son horizon se limitera à des blocs de HLM et un écran de télévision dans lequel il tente de tromper son isolement devant du porno ou bien pour contenter sa fascination morbide pour la mort devant des mondo tel que Face à la mort. Les jeux télévisés lui permettent également de se reconnecter à un semblant de conformisme qu’il se contente donc d’observer comme ce poisson dans son bocal qui ne fait que tourner en rond et avec lequel il partage cette même futilité existentiel. À l’instar de John McNaughton avec Henry Portrait of a Serial Killer, Uwe Boll filme son interprète le plus souvent en gros plan, de manière à pouvoir traduire sa solitude et rentrer dans sa tête. Certaines scènes sont repassés à plusieurs reprises pour en accentuer le grain et le défaut caractéristique de la pellicule surexposé, comme ci le réalisateur avait filmer ses rushs sur un écran de télé, ce qui renforce ce sentiment de confusion psychique et de lassitude, comme si nous avions affaire à la copie d’une autre copie et ce qui participe également à l’inconfort de visionnage.


Le ton est résolument dépressif, le personnage est aussi mutique que monolithique et ce afin de mieux surligner son aliénation. Il n’est pas galvaudé d’attribuer l’appréciation de film d’auteur à ce second essai, quand bien même il se soit beaucoup inspiré de Schramm, ou bien de Angst, le réalisateur a sût insuffler une atmosphère lourde et dépressive grâce à une mise en scène néoréaliste et cafardeuse, ainsi qu’un musique mélancolique qui tend à nous foutre le bourdon. Il n’y a pour ainsi dire aucun effet véritablement gore, mais l’approche n’en reste pas moins malsaine, voir même insoutenable à regarder lorsque la caméra s’attarde sur le regard pétrifié d’une victime agonisant au sol pendant que son bourreau s’agite sur son lit comme un asticot. C’est au moins aussi malaisant que de devoir supporter le regard insistant d’une photo de famille en pleine paluchade. Amoklauf n’est pas pour autant exempt de quelques défaut, inhérent à un faible budget et un rythme indolent, et de nombreuses facilités où le réalisateur se contente de filmer la télévision. Heureusement, la folie finira par culminer lors d’une tuerie dans un parc où le montage se veut bien plus éclaté et elliptique avec pas moins d’une centaine de plans et de répétitions du geste fatidique couplé à un excellent travail sur le son. Inutile d’entendre les victimes crier ou s’effondrer pour être toucher par cette tristesse insondable et ce gâchis qui annonce la carrière en marge d'un cinéaste atypique en quête d’une reconnaissance artistique.

Le-Roy-du-Bis
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le 2 mai 2024

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