Phase 2 accomplie ! Marvel Studios achève trois années de réussites commerciales insolentes, qu’elles soient le prolongement de franchises connues, mais aussi l’exploitation d’une franchise quasi inconnue du grand public transformée en triomphe critique et public qu’est Les Gardiens de la Galaxie. Comme en 2012, le studio conclut sa phase par un volet des Avengers, la réunion des super-héros sous la caméra une fois encore du prince des geeks, Joss Whedon. Le premier Avengers était un film rempli jusqu’à plus soif de défauts, moche à en pleurer, mais aussi fun et totalement décomplexé, un puits à fantasmes qui a comblé bien au delà des attentes. Qu’en est-il de ce deuxième opus?


Tout à changé. Les héros sont aujourd’hui confrontés à une menace initié malgré lui par Tony Stark, Ultron, une intelligence artificielle redoutable qui n’a d’autre but que de sauver le monde en le purifiant de ses habitants responsables de tous les maux de la Terre. Mais les Avengers devront également lutter contre eux-mêmes, leurs doutes, leurs peurs et leurs divergences d’opinion.


Les héros prennent la pause


Joss Whedon, lors de l’écriture du scénario, avait déclaré avoir comme inspiration première le fameux Empire contre-attaque, le meilleur épisode de la saga Star Wars. Film dantesque, qui développait son univers tout en complexifiant les enjeux et en renforçant les relations entre les personnages et leurs traumatismes fondateurs. Sur ce point, et avec toutes les précautions d’usage, on peut dire sans mal que Whedon réussit à se rapprocher de son illustre modèle. Cet Avengers, du moins dans sa première partie, n’a plus rien à voir avec le premier film, et même semble sortir du moule Marvel Studios. Plus sombre, plus attaché à ses personnages, le film, après une introduction tonitruante, ralentit et pose non seulement ses enjeux mais également le relationnel entre les super-héros, transformant les marques Iron Man, Hulk ou Hawkeye en êtres humains de chair et de sang. Les peurs des héros remontent à la surface, chaque personnage se voit développé sous un angle inédit, sombre. Mention spéciale à Hulk, dont le conflit intérieur et l’interprétation tout en fragilité de Mark Ruffalo émeut, et au duo Quicksilver-Sorcière Rouge, plus touchant qu’on pouvait ne le pensait.


Le réalisateur souhaite développer un vrai propos, aime viscéralement ses Vengeurs mais lutte contre la machine à broyer Marvel. On le sait, Joss Whedon a vécu la conception de ce film comme un vrai cauchemar et ne se prive pas de le confirmer à longueur d’interview. La mécanique qu’il a mise en place pour le premier opus, sorte de célébration jubilatoire d’un fantasme geek absolu, ne pouvait continuer pour ce deuxième opus, censé redonner un souffle plus humain, un tournant plus sombre à l’équipe des Vengeurs. Seulement, Marvel est déjà trois années plus loin, prépare une phase 3 comme un plan marketing indéboulonnable, et Avengers : L’ère d’Ultron semble une étape anodine de plus dans ce rouleur compresseur.


L’ère du trop


Whedon doit terminer tous les développements de la Phase 2 (la fin du S.H.I.E.L.D et Hydra) et amorcer le conflit qui entraînera Civil War et préparer l’arrivée de Thanos avec les pierres de l’Infini (voir les pages Wikipedia correspondantes si vous souhaitez plus de détails sur les 4 prochaines années à venir). Un programme chargé, impossible à caser en plus des volontés de profondeur psychologique dans un film de seulement 2H20. Les rumeurs parlent d’un premier montage de 3H30, une durée excessive qui pourrait malheureusement résoudre tous les problèmes d’un film qui souffre plus des volontés publicitaires de son studio que de maladresses de son auteur.


Tout est présent mais tout est survolé. Ultron, le grand méchant de l’histoire est remarquablement écrit mais trop peu présent pour marquer, à l’instar de Loki. Vision, autre personnage emblématique, là encore fait plus de la figuration et chaque arc narratif, chaque thématique est glissée dans le métrage pour se voir arrêter en plein élan par une scène d’action remarquable, jouissive mais qui à la longue agace.


Le divorce entre Marvel et son auteur chouchou est bel et bien consommé. Joss Whedon avait entre les mains toutes les cartes pour faire d’Avengers : L’ère d’Ultron un épisode marquant de l’univers cinématographique Marvel. Il n’est qu’un rouage de plus dans une mécanique bien huilée mais pour ses ambitions, pour son refus de la facilité, pour ce petit doigt d’honneur dressé timidement à Marvel Studios à travers son navire de proue, votre serviteur ne peut que saluer un chant du cygne salvateur, un film qui parvient à s’attacher à l’essentiel : notre amour immodéré pour les légendes de notre enfance. L’avenir de cette Phase 3 sera probablement encore plus formaté, encore plus badaboum LOL. Profitons d’Ultron pour ce baroud d’honneur incroyable. Bon vent et merci M. Whedon.

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le 23 avr. 2015

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