Le christianisme n'est pas légaliste, c'est une relation avec Dieu.

Benedetta est un très beau film, ambigüe, intense et hypnotique. A la fois surprenant, satyrique et caricatural dans la forme, insaisissable et subtil dans le fond, porté par une Virginie Efira plus sensuelle que jamais, et un casting à la hauteur de la réalisation. La seule chose que je lui reproche, c'est qu'il ne soit pas plus long.

Paul Verhoeven offre une vision plus illuminée que blasphématoire d'un puritanisme austère, ignorant et partiellement hypocrite qui n'est en réalité pas du tout représentatif de l'Eglise Catholique mais juste d'une portion infime de ses déviances intérieures et dans ce film les choses sont ce qu'elles sont : ni toutes noires, ni toutes blanches.

J'aime ces réalisateurs qui ne prennent pas les spectateurs pour des ignares à qui il faut tout expliquer, il laisse de la place à l'interprétation du spectateur et chacun met l'emphase sur ce qui l'arrange, ce qui fait de ce film une grande œuvre à lectures multiples.

1 Corinthiens 1:27-29 " Mais Dieu a choisi les choses folles du monde, pour confondre les sages; et Dieu a choisi les choses faibles du monde, pour confonde les fortes; Et Dieu a choisi les choses viles du monde, et les plus méprisées, même celles qui ne sont point, pour anéantir celles qui sont; Afin que personne ne se glorifie devant lui".

Benedetta à la foi, une grande et belle foi. Une foi qui à soif de se prouver elle-même, elle veut être un instrument de miracle, elle aspire au prophétique, elle cherche à entendre Jésus avec ferveur, elle veut le servir corps et âme, et Benedetta à cette sensibilité mystique et profonde des exégètes romantiques. C'est une amoureuse du Christ qui le cherche en chaque chose. Effrontée et exaltée, sans crainte et sans sagesse, elle s'embourbe dans tous les pièges du Diable, mais notre Dieu est un Dieu fidèle et patient. La preuve, il est quand même au rendez-vous quand il s'agit de sauver Pescia parce que Benedetta à la foi et Benedetta a dit avec foi, que Dieu va protéger Pescia de la maladie, au moins pendant un temps. Messieurs, mesdames, je vous présente la Grâce surnaturelle de Dieu. Est-ce que la collaboration de Dieu veut dire qu'il cautionne le comportement de Benedetta et qu'il n'a pas vu qu'entre deux mythos elle aime bien se faire lécher par sa camarade de chambre ? Absolument pas. Ses péchés sont une autre histoire, entre elle et Lui. (Enfin entre elle, Lui et la loi de l'époque, parce qu'elle a pris 35 ans de réclusion IRL. )

Ce qui n'est pas relaté dans le film, c'est que la vraie Benedetta Carlini ne croyait pas uniquement parler avec Jésus et cela change en réalité beaucoup de choses spirituellement. Elle croyait être possédée par un ange nommé Splenditello. (Ça ressemble bien à un blaze qui ferait plaisir à Lucifer ça.)

2 Corinthiens 11:14 :"Et cela n'est pas étonnant, puisque Satan lui-même se déguise en ange de lumière".

Le fait qu'à un moment donné, elle ait ouvert spirituellement la porte aux démons ne la discrédite pas du tout à mes yeux. Elle a pu un temps réellement parler avec Dieu (qui est bien plus bavard pour qui le cherche sincèrement que ce que les gens pensent), puis dévier en cours de route.

La Foi est le canal créé par Dieu pour permettre sur la terre la manifestation de sa puissance surnaturelle. Pas la droiture, pas les bonnes œuvres, pas la perfection, pas la religiosité, la Foi.

Car voilà, la Benedetta du film a un potentiel incroyable mais elle est terriblement immature. Elle n'a pas encore appris à résister à la tentation, elle n'a pas encore observé les fruits pourris du péché, elle n'a pas encore été transformé par le Saint Esprit, et visiblement elle n'a pas encore compris les bienfaits de la chasteté. L'abstinence semble n'être qu'une rigueur de laquelle on doit s'émanciper, elle n'a pas encore compris son but, alors elle ne la respecte pas. C'est le cas de tous les gens qui n'ont pas encore vécu une véritable conversion du cœur concernant une recommandation biblique et en font une loi religieuse, en général, le self-control ne dure pas bien longtemps, on est pas programmé pour ça.

Le contrôle et la maîtrise de soi sont deux choses bien différentes, l'un nous transforme en cocotte minute sous pression, l'autre est un art martial de l'esprit.

Qu'une foi forte se confonde avec la folie n'a rien de surprenant. Il faut être un peu fou pour avoir la foi, et la sagesse du monde n'a rien à voir avec la sagesse de Dieu.

Qu'une âme immature confonde la Foi et l'envie de croire et en vient à se mentir à elle-même n'a rien de surprenant. Qu'une âme avec une foi chaude comme la braise attire toutes les tentations du diable n'a rien de surprenant.

C'est le zèle des débutants et c'est exactement pour cela que les jeunes convertis ne doivent pas se voir confier des postes à responsabilités. C'est pourtant écrit noir sur blanc : Timothée 3:1 et 3:6 : "Cette parole est certaine : si quelqu'un aspire à la charge de responsable, c'est une belle tâche qu'il désire. / Il ne doit pas non plus être un nouveau converti, de peur qu'aveuglé par l'orgueil il ne tombe sous le jugement du diable."

Il est important que jeunesse se fasse, même pour une personne qui a un grand potentiel dans la foi, car le chemin est pavé de ruse, et certaines formes de la sagesse ne s'acquiert qu'avec l'expérience et le temps. Ça, c'est la responsabilité des anciens, pas celle de Benedetta, or elle avance en roue libre, toute entourée qu'elle est de croyants tièdes et assoupis, incapable de l'accompagner dans l'épanouissement de son don par un discernement aiguisé, une autorité et un cadre bienveillant. Elle est promu trop vite au rang d'abbesse, ce qui précipite sa chute.

Que l'exaltation, la ferveur, la vitalité suprême ressenti dans la présence de Dieu puisse éveiller les sens physiques, réveiller la libido et conduire à la débauche une âme vulnérable n'a rien de surprenant. Le désir sexuel est une forme de vitalité, si on s'expose à l'essence de la Vie même, on est tout exalté et Benedetta est une jeune femme en bonne santé, elle déborde de désir, dans un cadre de limitation morale et de frustration, ce qui renforce l'érotisme de la situation. Forcément s'installe alors une dynamique Jezabélienne, babylonienne : communication avec les esprits, relation de pouvoir, manipulation, prostitution sacrée et perversion sexuelle.

Ce que je crois, c'est que Dieu préfère encore quelqu'un qui fait un peu n'importe quoi par immaturité mais qui a une foi brûlante, plutôt que des personnes tièdes qui se croient justes parce qu'ils estiment que leurs œuvres sont bonnes, parce qu'ils ont été bien sages et hyper contrôlant avec eux-mêmes, avec une religiosité légaliste qui ne sert personne et qui ne laisse jamais place à l'action surnaturelle de Dieu. Attention, je ne dis pas que ce n'est pas grave de pêcher, bien sur que la repentance doit suivre et qu'il faut apprendre à résister aux tentations mais c'est un chemin. Je dis simplement que Dieu protège le temps de l'ignorance.

Dieu n'a jamais dit "ta droiture t'a sauvé" mais il a dit " ta foi t'a sauvé".

La foi c'est notre part, puis vient l'obéissance. La sienne est de nous enseigner, de nous former, de nous corriger, de nous parfaire, par l'action du Saint Esprit, par la Saint Eglise universelle, par la communion des saints, par l'étude de la parole vivante que sont les Saintes Ecritures, par nos frères et sœurs qui vont nous reprendre et nous guider, jusqu'à ce qu'on devienne saint, et que notre foi puisse porter du fruit à travers les bonnes œuvres qu'Il a prévu pour nous.

Jérémie 17:7-8 : "Béni soit l'homme qui se confie dans l'Eternel, Et dont l'Eternel est l'espérance!

Il est comme un arbre planté près des eaux, Et qui étend ses racines vers le courant; Il n'aperçoit point la chaleur quand elle vient, Et son feuillage reste vert; Dans l'année de la sécheresse, il n'a point de crainte, Et il ne cesse de porter du fruit."

Est-ce que Benedetta est une diablesse parce qu'elle a menti, qu'elle s'est enorgueillit et qu'elle s'est envoyée en l'air avec une autre femme ? Pour le personnage du film, je dirais que non, c'est une humaine, une femme consacrée qui doit s'examiner, comprendre ses erreurs, se confesser, se repentir et reprendre son chemin avec notre Seigneur tant qu'il est encore temps.

Il n'y a que les accusateurs de l'église, les pas tout à fait athés mais pas tout à fait grand chose d'autres non plus, qui veulent se conforter dans la médiocrité de leur vie spirituelle et l'orgueil de se croire suffisant, pour jubiler qu'on puisse montrer les erreurs, déviances et égarements de l'église catholique en croyant bêtement que c'est une preuve réconfortante dans l'égarement de leur nihilisme anti-Dieu, comme si l'église en tant qu'organisation pouvait être autre chose qu'imparfaite et profondément humaine. J'aimerais leur rappeler ce qui a été prononcé par notre Seigneur et sauveur :

Luc 5:32 : " Je ne suis pas venu appeler à la repentance des justes, mais des pêcheurs"

A contrario, Il n'y a que les hypocrites, les chrétiens du dimanche, pour crier au blasphème dès qu'on ne montre pas le catholicisme sous son meilleur jour.

Qui croit sait que nous sommes tout à fait pécheur et tout à fait juste. Ainsi, l'Eglise est juste, ça ne l'empêche pas de faire n'importe quoi de temps en temps. Nous sommes justifiés par le sacrifice de Jésus Christ à la croix, et non par notre droiture. Mais celui qui a réellement la foi finira tôt ou tard par marcher droit, aucun soucis à se faire pour cela. Les bonnes œuvres sont les fruits de la Foi. La foi déclenche le processus de la sanctification, auquel s'adjoint notre bonne volonté (sinon ça fait plus mal que prévu) et c'est par cette sanctification qui dépasse notre volonté, que Dieu nous émonde et nous transforme peu à peu à l'image de son fils bien aimé.

La relation de Bartolomea et Benedetta illustre très bien ce qu'est, à mon avis, l'homosexualité féminine : une recherche immature de complétude. Cette relation dit : "Je ne suis pas encore une femme complète, donc je cherche ce qui me ressemble pour me compléter, parce qu'au fond ce sont les parts manquantes et bridées de moi-même que je cherche." Ainsi, Benedetta enseigne à Bartolomea à compter, et Bartolomea lui enseigne l'écriture, puis elles expérimentent ensemble le plaisir sexuel.

L'une incroyante a perdu les limites morales à travers l'abus et l'inceste, l'autre à travers l'aveuglement de la folie des grandeurs. De nos jours, ça ne choquera plus personne, ce qui choquera c'est que cela puisse choquer. À l'époque, ça choquait les bien-pensants et les hypocrites.

Dans le fond, je ne pense pas que ce soit qu'elle soit tombée dans cet écueil qui choque. Ce qui choque, c'est qu'étant pécheresse, elle ose croire autant. La foi est bien plus disruptive que l'homosexualité.