Une fois n'est pas coutume, saluons un court instant le système français de distribution qui, au regard de cet affreux navet aux forts relents d'amateurisme télévisuel s'est lucidement rendu compte qu'il n'y avait pas de place dans les salles pour des productions aussi visiblement ridicules.

Un bref regard sur les avis surréalistes ici ou là montrera d'ailleurs que cet avis sain et respectable n'est peut-être pas la chose au monde la mieux partagée.

Tous les défauts habituels des films d'inspiration médiévale sont bien présents ici, insistance lourde sur la misère, la torture et les bouches édentées comme caution de réalisme, vision intellectuellement déficiente des rapports sociaux et à la religion et mysticisme fantasmé à tous les étages...

La forme propose ce qu'il peut y avoir de pire, à commencer par un cinémascope parkinsonien qui offre d'entrée un aller simple vers le tribunal de La Haye. Rajoutons à cela des combats illisibles, des ralentis dignes des meilleures docu-fictions et trois bouts de cailloux en guise de décors, histoire de ne pas gâcher l'absence criante d'un chef opérateur digne de ce nom derrière la caméra.

Avec tout cela que reste-t-il de la quête d'un moinillon hideux et d'une bande d'inquisiteurs barbares dans la campagne anglaise pendant la grande peste de 1348 ? Que reste-t-il de la tentative d'un sous-Aguirre médiéval dans les marais brumeux à la recherche d'un village préservé qui aurait renié Dieu ? A peu près rien.

Rien de visible ni d'intelligent en tout cas, des acteurs misérables, un Sean Bean qui tire la tronche, le moine glabre qui se cherche dans l'indifférence générale (en passant, vous ai-je parlé de son infinie laideur ?) et trois scènes de gore pour flatter les plus bas instincts d'un public peu délicat.

Le plus drôle étant la conclusion, tout de même. Devenu a son tour chevalier inquisiteur, le cénobite sans poils passe le reste de son temps à torturer et brûler d'innocentes jeunes femmes pendant qu'une affreuse voix off nous déclare, sans plaisanter particulièrement, qu'il espère que que ça lui apportera enfin la paix...

Alors voilà, à de rares exceptions près, ce film est apprécié honteusement jusqu'à mes éclaireurs les plus respectables, j'imagine que le manque criant de films historiques ambitieux a faussé leurs sens, j'imagine qu'une épidémie quelconque a pu brouiller leur raisonnement à un moment que l'on espère déjà passé et oublié dans les limbes du temps, entre un trop plein d'amour pour La chair et le sang et une nostalgie mal retrouvée pour Le Nom de la rose, mais inutile de chercher plus avant; par tous les côtés possibles, Black Death n'est qu'un abominable navet dont la vanité empêche de s'y attarder le moins du monde.
Torpenn
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le 25 nov. 2012

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Torpenn

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