Pour son premier film, Nicolas Silhol nous raconte l'histoire d'Emilie Tesson-Hansen, une jeune responsable des Ressources Humaines, aussi appelée « killeuse ». Si l'entreprise ne veut plus d'un employé, c'est à Emilie que revient la charge de faire en sorte que ce-dernier démissionne plutôt que de lui verser des indemnités de licenciement (pressions en tout genre, harcèlement moral...). Lorsque justement, l'un des employés se suicide au sein même de l'entreprise, une enquête est ouverte et Emilie se retrouve en première ligne, devant faire face à l'inspection du travail, mais aussi à sa hiérarchie à col roulé, qui lui incombe toute la responsabilité.
Dans la même veine que certains films français comme « La loi du marché » et pas mal d'autres sur le même sujet, Silhol parvient lui aussi à faire ressentir l'ambiance extrêmement froide et déshumanisé du monde de l'entreprise. L'image glacée et le quasi huis-clos n'y sont pas étrangers. Cette atmosphère étouffante est notamment renforcée par une Céline Sallette assez remarquable. L'actrice, toute en intériorité, réussie à être tantôt tout à fait détestable dans son rôle de RH dénuée de sentiments, tantôt touchante lorsque son humanité refait peu à peu surface.
Même si le film n'est pas d'une inventivité folle (à noter quand même l'utilisation de décadrages qui renforcent le côté oppressif, les personnages semblants écrasés par des morceaux de murs en amorce), la forme classique de la réalisation reste cohérente par rapport au propos et à l'ambiance générale. Resserré sur 1h35, le scénario revêt des airs de thriller avec rebondissements et suspens, surtout dans la deuxième partie. Si la durée du film permet à Nicolas Silhol de maintenir l'intérêt jusqu'à la fin, elle est peut-être aussi la raison pour laquelle il ne dépasse jamais son côté théorique. Une fois les enjeux de l'histoire exposés, dommage qu'il ne se libère pas un peu plus du simple constat sociologique.
Malgré tout, le réalisateur réussit à ne pas tomber dans le piège de la caricature et livre une vision assez juste de l'entreprise, quoique parfois légèrement didactique, mais porté par l'ambiguïté de Céline Sallette et la crédibilité des autres acteurs au diapason.

Moltès
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le 17 avr. 2017

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