…On peut croire que c’est l’histoire d’un défi fou entre deux potes sortis depuis longtemps des Beaux-Arts, pour faire une œuvre ensemble.

…On peut se dire que c’est le pari, circonscrit dans le temps, d’une exploration homosexuelle qui va durer le temps d’un tournage vidéo.

Pourtant à mesure que le film se déroule, on découvre en fait que « Do not disturb » dépeint plutôt un moment d’hésitation, de doute, d’un trentenaire sur sa vie. Suivant une voie plus ou moins tracée, Yvan Attal lui-même se met en scène dans le personnage conventionnel de Ben. Il a une jolie maison dans l’Est parisien, une femme ravissante Anna (Laetitia Casta), et un boulot sérieux obtenu à l’issue de ses études d’arts.
La manière de filmer est simple et réaliste. Elle facilite l’identification du spectateur, qui transpose son questionnement sur le couple, sur l’amitié, sur la vie à ce qu’il voit à l’écran. Il reconnait des situations ou des sentiments.
On apprécie les images de Paris, et de ses endroits cachés : la maison bucolique de Ben et Anna, ou le bel appartement parisien dans lequel a lieu la soirée.
Bousculant le quotidien, Jeff (François Cluzet), le meilleur ami de Ben, débarque un soir. Artiste et aventurier, il arrive tout droit du Mexique. Sa visite est prétexte à s’essayer à une autre vie, à rencontrer de nouvelles personnes qui sont hors du périmètre social habituel de Ben.

Première soirée et récit exotique. Le champ des possibles est rapidement brossé. Mais pour Ben il ressemble à une carte postale. Une expérience qui ne le touche pas car il ne l’envisage même pas pour lui même. Deuxième soir, tenté par une invitation à une soirée chez une galeriste, (rôle joliment tenu par Asia Argento) Ben se trouve pris dans un dilemme. D’un coté, sa femme prépare le dîner pour eux trois, et de l’autre son ami insiste pour qu’il se détende à la soirée, un brin barrée. Intrigué, curieux et certainement mû par une envie d’autre chose, il choisit la soirée.
On se dit qu’il délaisse ostensiblement Anna, préoccupée par des considérations matérielles : sa période d’ovulation qu’il ne faut pas laisser passer, les courses à faire, l’heure de retour de son mari à la maison. Elle pose les limites de sa liberté immédiate.
A la soirée, il est d’abord surpris par la faune et l’aisance de ses hôtes : Asia Argento en femme fatale qui fricote avec ses invité(e)s et sa compagne Charlotte Gainsbourg étonnante maman qui cuisine en allaitant son bébé. Puis l’ambiance se détend, et lui aussi, épousant l’humeur éméchée des autres. C’est là que prend naissance l’idée de participer à Hump, un festival américain de porno amateur. Mais pour « faire de l’art », il faut innover. C’est ainsi qu’ils concluent que le porno gay joué par des hétéros, c’est du jamais vu.
Défi, preuve d’amitié, ou exploration de ce qui fait peur, ce tournage prend toutes les dimensions possibles sans forcément les développer.
Ben ne se défile pas. Il surprend même par son aplomb : l’acte lui fait peur, mais il tiendra bon, il veut se confronter à l’inconnu. Jeff, en revanche, n’est pas aussi aventurier qu’il le voudrait. Seul son chapeau de cow-boy donne l’illusion. C’est lui le plus conservateur finalement.
Ici, ce sont les femmes qui ont le pouvoir : c’est elles qui retournent les situations. Le couple lesbien, comme la petite femme trentenaire en apparence rangée.
Leurs choix sont assumés. Elles, elles ont fait l’épreuve de la contigence, et savent où elles veulent se positionner : le couple ne se laisse plus utiliser, mais propose à l’homme de l’utiliser ; la jeune femme désireuse de fonder une famille, sait écouter ses pulsions, sait perdre la tête, mais ce qu’elle souhaite c’est la construction de projets avec son mari, qu’elle aime profondément.
Do not disturb est surtout un film sur les relations humaines : le couple, l’amitié, le rapport homosexuel, enfin le rapport qu’on a à soi-même et à son image plus que d’une simple coucherie gay comme le prouve assez étonnamment la fin du film
gagaone
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le 18 déc. 2012

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