Auréolé de plusieurs prix, dont celui du Public au Festival du Film Fantastique de Gérardmer et ceux du Meilleur Premier Film et des Meilleurs Effets Spéciaux aux festivals espagnols Saint Jordi et de Catalogne de Sitges, Eva a attisé ma curiosité jusqu'à faire une cinquantaine de kilomètres pour le voir en V.O.S.T.

Bien m'en a pris. En effet, si on admet le parti-pris d'une réalisation assez « contemplative », le scénario science-fictionnesque traitant de robotique et d'intelligence artificielle, thèmes certes déjà bien usés, est très bien construit et le futur proche dépeint dans le film est à la fois relativement crédible et prenant. Ce métrage m'a parfois fait penser à Splice dans cet amalgame de science un peu « dirty », de relations humaines délicates et de recherche d'une création de vie artificielle, mais évidemment dans un univers plus propret, même si on est loin de l'aseptisation de certains films des années 70 sur des sujets similaires. Au contraire même, l'humanité de ce film est palpable tout au long de ses 1h34.

Le jeu des acteurs est d'excellente facture. Si l'allemand Daniel Brühl, déjà aperçu dans Goodbye Lenin et Inglourious Basterds, campe parfaitement un personnage principal tourmenté par ses amours passés mais scientifique de premier ordre doté d'une sensibilité hors norme vis-à-vis des machines, la surprise de ce film est sans conteste la jeune Claudia Vega qui est dans ce film à la fois un régal d'impertinence, de sensibilité et de vie mais qui sait aussi être carrément bouleversante dans certaines scènes. Le reste du casting est plus effacé mais on notera la performance du robot majordome interprété par Lluis Homar (qui a obtenu un Goya – les Césars espagnols – pour le Meilleur Second Rôle Masculin dans ce film) versant tant dans la comédie au départ puis vers le drame sur la fin en passant par une phase plus « robotique ».

Autre point fort du film, l'univers visuel de ce métrage est également très réussi avec un futurisme à mi-chemin entre steampunk et cyberpunk, faisant parfois penser à certains univers d'animes d'Otomo ou de Go Nagaï. Ici se mêlent des androïdes ultra-modernes comme le majordome (apparence humaine, etc), des animaux de compagnie robotisés (mais au caractère bien trempé) et des robots utilitaires presque contemporains face à un cadre de vie relativement actuel. Les maisons sont aussi poussiéreuses et remplies de bibelots que celles que l'on peut trouver de nos jours. Les seuls indices d'ultra-modernité sont alors des ordinateurs modélisant dans l'espace des sortes d'hologrammes malléables et maniables ou des écrans de ci de là servant de clé pour rentrer dans une maison. Les paysages enneigés qui inondent le film ajoutent au calme ambiant et à la différence entre la modernité et la vétusté qui se mêlent assez harmonieusement dans Eva. Les effets spéciaux sont par là même très réussis, à l'exception peut-être de la première apparition du chat de compagnie qui n'est pas totalement bien intégré.

Mais bon, vous l'avez sans doute compris. Eva est un film relativement lent mais c'est surtout une très jolie fable humaniste, plus réussie que de nombreux autres films qui s'interrogent sur la vie artificielle, qui est servie par une réalisation exemplaire, des acteurs crédibles et attachants et un scénario bien construit et qui sait jouer avec les déductions que le spectateur peut faire, au sein d'un univers conçu avec justesse. Un véritable coup de coeur pour ce film de science-fiction franco-espagnol qui prouve qu'avec un bon scénario et un casting adapté, les européens peuvent faire de très bons films « de genre » en 2012.

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Auteur : Eric
LeBlogDuCinéma
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le 28 mars 2012

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