Bienvenue au purgatoire des reboot de grands classiques de l’épouvante et du slasher, il y avait eu Vendredi 13, Les Griffes de la nuit, Halloween, La dernière maison sur la Gauche ainsi que La Coline a des yeux, certains pour le meilleur et d’autres pour le pire, voilà que Evil Dead s’invite à la fête. L’adaptation est néanmoins chapeauté par le trio infernal originel Sam Raimi, Rob Tappert et Bruce Campbell afin de s’assurer du respect et de la pérennité de l’entreprise confié à un jeune uruguayen prometteur mais alors totalement inconnu du grand public, j’ai nommé : Fede Alvarez. Cette nouvelle cuvée est un cas d’école si on s’intéresse de près aux raisons qui font la réussite ou bien l’échec de ce type de remake qui tente maladroitement de réinterpréter l’histoire sans la trahir tout en caressant les fans dans le sens du poil. C’est une mission délicate qui implique une justesse scénaristique et une véritable maîtrise technique, tout en sachant que l’on ne pourra jamais s’émanciper du statut culte de l’oeuvre d’origine. Hors Evil Dead transpirait de tous ses pores purulents l’amateurisme et le bricolage alors que ce film possède quant à lui un budget qui lui est presque 50 fois supérieur. Dans ces conditions, il est difficile de restituer l’essence même de ce qui avait son succès. Aussi puissant et esthétique soit cette version, elle marque aussi cruellement le pas lorsqu’il s’agit de se renouveler ce que savait en l’occurrence faire ses illustres aînés avec un degrés de folie bien plus poussé.


Cet nouvelle mouture du mythe n’aura évidemment pas l’impact du choc produit par le film de Sam Raimi. Pourtant en dépit de son formalisme engoncé dans la dernière décennie, Evil Dead est un film méchant, outrageusement gore et sanglant qui prend volontairement le contre-pied humoristique de la saga pour l’emmener dans l’horreur absolue. Fede Alvarez réinvente la légende à sa manière : le viole dans les fourrées, la cabane dans les bois, la cave enchaîné, la morsure contagieuse, l’automutilation, le massacre à la tronçonneuse et même le Nécronomicon. Fini la franche camaraderie, le groupe de jeunes se réunit ici pour des raisons bien moins festives, puisqu’il s’agit de faire décrocher Mia de son emprise pernicieuse pour la drogue une bonne fois pour toute. Pour l’aider à se sevrer, le groupe s’isole dans une baraque abandonné au milieu de la forêt, mais ils vont découvrir par hasard un vieux grimoire maudit dont les incantations vont libérer des forces démoniaques enfouies depuis des décennies. La descente va être raide et les événements vont prendre une tournure absolument cauchemardesque jusqu’à ce qu’il pleuve littéralement du sang lors du final dantesque. Le scénario aborde intelligemment le thème de la dépendance qu’il confronte avec celui de la possession, lorsqu’un ami ou un membre de notre famille en est victime et change brutalement de comportement en raison du manque provoqué par le sevrage et capable de transformer une personne gentille et innocente en bête avide et féroce.


L’approche se veut aussi réaliste que possible tandis que le maquillage et le comportement de Jane Levy fait globalement référence à celui de Linda Blair dans L’Exorciste de William Friedkin (« elle suce des bites en enfer ! »). L’innommable autrefois esquissé par Sam Raimi avec la Shakky Cam que l’on retrouve brièvement ici, prend la forme d’une silhouette féminine celle du double maléfique de la principale héroïne, sa face sombre lié à son passé et à ses addictions. Néanmoins les certitudes réelles et rationnelles voleront en éclat lorsque la junkie se mettra à vociférer comme un démon et à attaquer sauvagement ses compagnons. L’autre réussite du métrage consiste a brosser un portrait bien plus profond de ses personnages notamment celui de Mia qu’interprète donc Jane Levy, la mignonette jolie de Suburgatory qui mordait dans les plaquettes de beurre à pleine dent, et qui lèche désormais les lames de cutter en gros plan. L’actrice aboutit à une prestation réellement remarquable et elle est à n’en pas douter la divine héritière de Bruce Campbell, j’en tient pour preuve le climax où elle y laissera la main gauche, tandis que ce dernier y laissait la droite. Il y a donc indirectement un passage de relais que confirme d’ailleurs la scène post générique de fin où Ash fait une brève apparition devant la caméra histoire d’adouber ce remake d’un « Groovy ». Quant à Jane Levy, elle avait de quoi devenir la nouvelle égérie de la saga, mais le destin lui réservera d’autres desseins. Pourvu qu’elle ne finisse par un jour à demi-comateuse dans le caniveau avec une seringue plantée dans le bras, parce qu’elle mérite sûrement bien mieux que ça.

Le-Roy-du-Bis
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le 20 juil. 2023

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