Parmi les nombreux studios d’animation japonais, Studio 4°C est l’un de ceux les plus internationaux, n’hésitant pas à travailler avec des partenaires occidentaux. Son travail se retrouve sur Animatrix et Halo Legends, anthologies de courts animés, et bien sûr pour de nombreuses autres séries et films japonais.
Pour First Squad, la compagnie a été missionnée par une compagnie russe pour mettre en images un script original écrit par Aljosha Klimov et Misha Shprits. Le film sort en 2009, mais dès 2005 un clip du rappeur russe Ligalize en proposait déjà l’esthétique et les personnages. Cette production russo-japonaise ne se laisse pas si facilement approcher, non seulement à cause du manque d’informations à son sujet, mais aussi par son ton volontairement cryptique.
Basée durant les premiers temps de la confrontation entre l’URSS et le Troisième Reich pendant la Seconde Guerre Mondiale, First Squad nous présente bien sommairement Nadjya, jeune fille blonde et frêle, un peu désemparée, dont les talents divinatoires sont utilisés par une troupe ambulante qui va de camps militaires en camps militaires. Pourchassée par deux Allemandes, la jeune fille est retrouvée par son ancienne organisation militaire qui lui rappelle ses engagements passés. Déterminée à venger ses amis camarades morts lors d’une attaque allemande, elle va chercher à les rappeler de l’au-delà pour s’opposer au nouvel allié des nazis, un chevalier teutonique et son armée morts et maudits depuis 700 ans.
First Squad ne cherche donc pas la véracité historique, avec ses personnages aux capacités surnaturelles et ses morts invoqués sur les champs de bataille. Une fois encore, il oublie de rappeler que l’URSS avant de s’opposer aux nazis a été bien opportunément leur allié. Mais il ne glorifie pas la guerre, montrée avec son lot de morts et de désolations, mais aussi, et c’est bien ironique, avec cet esprit russe de résistance et de patriotisme.
L’univers de First Squad ne manque pas de mystères, à l’image de certains pans du passé de Nadjya ou de l’identité de certains personnages, intégrés au récit sans présentations. Même ce qui est révélé au personnage peut sembler sujet à interrogation. Mais c’est cette atmosphère étrange entre guerre et surnaturel, à la fois enjouée et déterminée, très japonaise, mais aussi violente et où l’espoir est fragile qui captive l’attention.
Car le métrage est assez rapide, parfois précipité, dans un sentiment d’urgence désespéré qui nourrit le rythme, mais d’autres fois qui ne laisse qu’encore plus de frustrations. La confrontation avec l’armée teutonne est attendue. Elle est expédiée en quelques plans. La fin semble d’ailleurs accélérée, comme s’il fallait boucler le métrage. Le film dure moins d’1h et cela se ressent, la version française est expurgée de passages faussement documentaires russes avec des vrais acteurs présents sur l’originale. Une drôle d’idée tout de même, mais qui expliquait peut-être mieux le film.
De plus, même si les designs tranchants ont une certaine allure, la petite Nadjya marque l’écran de sa présence, que les couleurs froides marquent bien le ton du film, l’animation est un peu en retrait. En mouvement, le métrage n’arrive que rarement à épater, l’ensemble est fait avec une certaine économie qui traduit peut-être un manque de moyens affectés au projet. Ou un manque d’implication de la part de Studio 4°C.
D’autres films auraient du développer l’univers, ce qui n’a pas été le cas. Un roman aurait été écrit mais il n’a pas été édité chez nous. Par contre son adaptation en BD a été éditée aux États-Unis récemment, en 2021, après un Kickstarter réussi. Il n’est donc pas improbable que First Squad refasse donc encore parler de lui prochainement. En espérant que son retour soit moins frustrant que cet animé, au cadre original avec son mélange soviétique de guerre historique et de surnaturel, assez intriguant mais trop court.