Hollywood ne finit décidément jamais de surprendre. Dernier rejeton d'une vague «critique» très active ces dernières années outre-Atlantique (Zero Dark Thirty, Green Zone), Good Kill est vendu comme un brûlot corrosif à l'encontre de la politique américaine en Afghanistan, et c'est une véritable prouesse tant le film en est éloigné.

Good Kill, en effet, se voudrait subversif, «important» comme le clame Telerama sur l'affiche, mais il n'en est rien. Car ici, nulle dénonciation de la politique va-t'en-guerre américaine de l'après 11 Septembre, nonobstant une saillie grinçante sur le Nobel d'Obama, mais bien les états d’âme d’un pilote d'élite reconverti en joueur d'Ace Combat dont l'unique regret semble être de tuer des Talibans depuis une cabine à Vegas et non plus depuis son F-16. Un film belliciste en somme, mais adepte d'une bonne guerre, celle à papa, qui appelle du courage, du sang et des larmes. On alterne ainsi entre les séquences de drone, dignes d'un mauvais jeu vidéo, les remords d’Ethan Hawke et les interminables disputes conjugales, vraisemblablement présentes en si grand nombre (comme dans American Sniper) pour attirer les épouses dans les salles.

Bien qu’étant déjà à moitié assoupi, le film à ce moment-là ne fait guère qu'ennuyer. La fin par contre franchit allègrement les limites de la décence et confirme que le talent d’Andrew Niccol semble s’être définitivement envolé avec Lord of War.

Lorsque qu’Egan, assis sur son lit, les mains croisées, crucifix branlant, endosse son costume de chevalier blanc et entame sa rédemption. Seul dans sa cabine, il s’enferme, prêt à racheter sa dignité et celle de l’Amérique toute entière, pour venger cette paysanne afghane violée quotidiennement sous ses yeux impuissants. Ivre de justice, il déclenche son tir sans s’apercevoir que sa protégée est entrée dans la zone de tir ... Le suspens putassier passé, la jeune femme secouée par l’explosion se relève, prend son fils dans ses bras et adresse au ciel, à notre héros, un ultime remerciement avant que celui-ci, meurtri par tant d’horreur, rende son tablier. Ouf, l'honneur est sauf!

Là où American Sniper ne tentait guère de cacher une déférence certaine à ses soldats, Good Kill floue son spectateur et continue de prouver, si ce n’était déjà fait, l’Union Sacrée qui règne aux États-Unis quant à leurs « opérations extérieures ».

LaszloBenedek
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le 13 août 2023

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Bouli

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