Produit par la Nikkatsu et sorti sur nos écrans en catimini durant l'été 2012, dans une version écourtée d'une bonne demie heure pour le marché international, Guilty of romance est le premier film du prolifique Sono Sion que je parviens à voir. J'avais beau connaître la réputation du bonhomme, je ne savais absolument pas à quoi m'attendre. Et c'est peu dire que je ne regrette pas l'expérience.


Le film s'ouvre sur une découverte macabre. Deux mannequins en plastique sur lesquels ont été assemblé des parties du cadavre d'une jeune femme. L'occasion pour Sono Sion de construire, en plusieurs chapitres, le portrait troublant et inconfortable d'une jeune épouse soumise et entièrement dévouée à un mari psychorigide, qui trouvera l'épanouissement dans la pornographie et la prostitution.


Opposant sans cesse la lumière aux ténèbres, l'ambiance feutrée et rassurante de la vie quotidienne au ton bariolé des errances nocturnes, tout en jouant admirablement avec la dualité de ses héroïnes et de leurs univers, Sono Sion signe une oeuvre intense et inconfortable, qui risque fortement de mettre les spectateurs mal à l'aise.


Dans la grande tradition des bandes érotiques de la Nikkatsu, qui permettait à ses auteurs de livrer des oeuvres subversives dès l'instant où elles obéissaient aux règles du marché, Guilty of romance déroule une vision extrêmement critiques de la société japonaise, de son machisme ambiant, de son hypocrisie, de sa schizophrénie, tout en dévoilant crûment les désirs enfouis et inavoués de ses citoyens plus ou moins respectables.


Si l'on pourra regretter que la version internationale sacrifie totalement le personnage de la flic, réduit à un simple pantin (alors qu'il y avait un important effet miroir dans la version japonaise, apparemment), Guilty of romance conserve heureusement toute sa force dans son montage plus court. Formellement abouti, bénéficiant de la mise en scène impeccable de Sono Sion et interprété avec force par ses comédiennes, Guilty of romance, de par son message, son ambiance, ses scènes explicites, bouscule, dérange, interpelle forcément et ne laisse pas indifférent.

Gand-Alf
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le 29 avr. 2015

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Gand-Alf

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