Les premières minutes du noir générique, ces coups de couteau violents et intrusifs sur fond de tripes qui s'avèrent celles d'une citrouille laissent penser que le film sera sanglant et effrayant.


Il n'en est rien pourtant et l'on revoit vite ces images initiales comme un avertissement: vous venez voir du découpage de chaire humaine ? Raté ! Vous verrez l'abominable meurtre ... d'un cucurbitacé !
Cul-cul, bite, assez !, pourrait-on même corriger, tant la galerie de belles donzelles s'étale sans donner d'épaisseur aux nouvelles venues tout en siphonnant celle de la survivante du volet dernier qui meurt bien vite et assez bêtement ! Miss serviette, Miss Mini-short et Miss Blonde Diablesse contre le Dormeur Masqué (oui, parce que Mike Myers, après avoir joué le Fugitif et les Jason Bourne, somnole quelque 365 jours avant de s'éveiller une petite partie de jambes en l'air. Et de bras, et de bras ! Et la tête, et la tête ! AAAAAAAh ... louette ! Faut pas croire, c'est les nerfs !


Cela dit l'idée d'un lien psychique entre le tueur et sa victime, né d'un contact physique lors du dernier métrage n'est pas inintéressant. Mais le drame, lui, naît du choix artistique de mise en scène des manifestations empathiques de la jeunes Jaimie: des grimaces plus grotesques et agaçantes qu'effrayantes ou touchantes. Dommage !
L'empathie est d'ailleurs le gros problème des personnages de ce film, creuset où se forme le comique involontaire d'Halloween 5. Entendons-nous bien: il existe des situations un brin ridicules dès le film originel de Carpenter où, naïfs, on pouvait encore imaginer voir mourir le tueur d'une série de coups de couteaux que Laurie Strode refuse d'administrer, cause d'un retour plus que prévisible du prédateur au masque blanc avant la fin même du métrage. Il y en a encore dans le Halloween de 2018, dans cette scène où l'amoureux transi rembarré de la petite-fille de Laurie confie ses déboires affectifs au tueur. Il y a toujours ce rémanent problème du silence de Myers, qui le trahit, mais qui n'est pas perçu comme un indice par ses victimes, qui continuent leur causette, comme si de rien n'était. Mais, dans ce cinquième opus, on atteint le summum de l'indifférence des personnages les uns pour les autres ! Entre Miss Tina, la prédatrice qui ne pense que dentelles, satin et fesses, au point de se foutre totalement du destin de son petit copain malgré l'avertissement de la petite voyante, le petit ami nommé Mike (tiens, tiens !), le blouson noir à ce point sûr de lui qu'il prend le tueur pour un simple garagiste masqué à corriger à coups de pied de biche, Jaimie qui joue au Time's up version mime avec ceux et celles qu'elle veut avertir, lesquels n'y entendent rien et tentent toutes les réponses les plus inanes possibles, le pauvre Dr Loomis, toujours impeccablement campé par Donald Pleasance mais desservi par son rôle de vieux barbon qui ressasse les mêmes avertissements et montre ses brûlures pour attester de la véracité de ce qu'il rappelle, quand il ne presse pas la petite Jaimie de façon à ce point invraisemblable qu'il en devient malgré lui soit gênant soit comique, Dupont et Dupond, les deux flics qui préfèrent littéralement jouer aux cartes à courir près le serial killer ("Heureusement qu'on est des minables !" [sic]), des jeunes qui jouent aux tueurs pour narguer ces mêmes flics (" Laisse vivre mon amie: elle est encore vierge!" "Tu as son numéro de téléphone ?" [sic]), des bambins qui se heurtent sur fond sonore de jumpscares, on est assez mal lotis !
La plupart des screamers sont en réalité des farces que se font les uns les autres quand ils ne sont pas occupés à se bécoter (Il y a même un petit instant "Sortez couverts !"). De sorte qu'on assiste à un changement de ton à contre-temps, à un décalage que soulignent quelques belles répliques du Dr Loomis et l'attente créée par la fin du volet précédent. Halloween 5 est déjà un peu un Scream voire un Scary Movie mais reste un chouya encore un Halloween.


Réchappe néanmoins un bon dénouement - avant un final mitigé en fin ouverte - où le bon Dr Loomis, entre ruse et folie, traque, piège Myers pour ce que l'on peut penser un ultime affrontement dans la maison du tout premier assassinat, où Myers traque impitoyablement la petite Jaimie jusque dans un monte-plat qui occasionne un parfait suspens avant l'insoupçonnable mais belle révélation de la dichotomie de l'Homme et du Masque, le temps d'une larme furtive.
Mais cette perle d'une vingtaine de minutes ne suffit pas à redonner à l'ensemble la crédibilité d'un volet tout entier dédié à l'épouvante et/ou à l'horreur. Réchappe aussi - mais la chose est incertaine - cet énigmatique homme en noir, simple McGuffin du film, destiné à surgir dans une suite, à créer l'engouement, par crainte du ridicule, qui parfois tue plus que Michael Myers.


Difficile de s'exprimer face à cet étrange ovni, qui ne sait sur quel pied danser et sur quelle corde des sentiments jouer: doit-on rire ou avoir peur ?

Frenhofer

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