Qui aurait cru un jour que Bruno Dumont me surprendrait ? Avec "Jeannette, l'enfance de Jeanne d'Arc" il signe le film le plus hallucinant de la décennie ! Entre rires et consternation, voici quelques une de mes remarques à son sujet :
Début : (comptez quelques spoilers)
Lieu d'action : Domremy-la-pucelle, berceau de la Jeanne. Ses moutons, sa rivière, son climat, ses dunes. Euh... cherchez l'intrus ! Bref ne chipotons pas hein... Gros plan sur une petite sauvageonne qui gesticule et d'un coup se met à chanter en en appelant à son dieu. Ouh là la Jeanne était très catho certes mais ces paroles mystico-expiatoires ne me disent rien qui vaillent. Arrive sa copine, toutes deux devisent sur le malheur de l'homme (en général) perdu pour l'humanité. Circonspect. Les scènes s'enchainent les textes ne sont pas toujours retenus (ça bafouille autant que ça mange les mots).
Et voila t'y pas qu'elles se mettent à chanter (est-ce le terme ?) toutes deux. C'est étrange mais ça devient comique du coup. C'est la kermesse de l'école quoi, le genre de truc que l'on subit en affichant un sourire ou désabusé ou crispé. Et en plus que çà danse aussi. Enfin... elles tentent de nous le faire croire à grand renfort de headbanging et autres pitreries chorégraphiques. Je cherche le sens, peut-être que Dumont tente de se rallier au cercle des analystes qui considèrent la guerrière comme une schizophrène patentée ? J'aimerai le croire la suite prouvera que non ! Elle exprime une foi qui bouillonne en elle et qu'elle exprime à grand renfort de danse de Saint Guy ! Plus possédée que dévote... Insupportable !
D'autant plus que la gamine (c'est pire pour celle qui joue le rôle en adolescente), ne sait ni jouer, ni parler, ni chanter encore moins danser, elle n'est même pas foutue à son âge de faire convenablement une roue ! C'est vrai que Jeanne a longtemps hésité entre la carrière militaire et celle circassienne !
Bref je ne vais pas vous faire tout le film d'autant que la suite est pire encore ! Mais quand même pour vous donner l'eau à la bouche, sachez que vous verrez une nonne bicéphale (jouée par deux jumelles) danser le twist, trois saints (Michel, Catherine et Gabriel) qui eux dansent sur la musique de pulp fiction, un oncle (sympathique Nicolas Leclaire) qui ne peut s'exprimer la plupart du temps qu'en rappant, la copine de Jeanne qui à l'adolescence se déplace le corps arquebouté comme Regan Mc Neal dans l'exorciste... Sincèrement cela vaut son pesant de pop corn !
Bon il y a quand même du bon. Les moutons sont excellents et affichent une belle présence à l'écran et Guillaume Deffontaines restitue à merveille la belle lumière de la Côte d'Opale et les décors sauvages de Wissant. C'est beau le Nord Pas-de-Calais !
Plus sérieusement, je ne suis nullement étonné de voir que Dumont soit un adepte de Peguy. Tous deux affichent une oeuvre ambiguë qui sous des allures de valeurs humanistes n'expriment en fait que mépris pour autrui, dans le sens de ceux qui ne leur ressemblent pas. Les idées (exprimées dans les chansons), sous couvert des bondieuseries, touchent parfois au malsain (homogénéisation des individus notamment, la nation comme salut de l'âme...). On savait Dumont profondément mégalo et imbu de son être, avec Jeannette il lève un peu du voile. Mais qu'importe, la critique se trémousse, le congratule, le porte haut... Arfff décidément, le médias ne sont plus ce qu'il étaient !
Mon dieu qu'est-ce qu'il y a donc ? Dans tous les sens on s'est perdu mais depuis 40 ans hélas on ne fait plus que cela. On ne fait que se perdre. Qu'est-ce qu'il y a donc mon dieu ? Qu'est-ce qu'il y a ? Il y en avait encore qui se sauvait. Il y en avait encore qui en réchappait. Mais maintenant mon dieu qui répondrait qu'il y en a qui se sauvent ? Qui répondrait qu'il y en a quelques uns seulement même, seulement même au moins qui en réchappent (extrait de parole d'une des chansons)