Drôle d’objet hétéroclite, bizarre un peu comme un Lynch style Eraser Head ou Inland Empire, absurde parfois comme le théâtre de Ionesco ou Beckett ou les récits de Kafka, beau à certains endroits comme Les amours d’une blonde de Forman, touchant au début comme le néo-réalisme italien : mélange improbable, mettant du temps à prendre forme, avant de se livrer.


La dédramatisation totale (= l’absence d’action, d’évènements), osée pour l’époque, nous prend d’abord au dépourvu, nous égare, faisant croire à un scénario négligé avant que tout se dévoile. Film de l’attente, du temps vide et inhabité, avec ses personnages eux aussi vides, inhabités, fantomatiques, spectres errant sans le savoir comment dans un monde qu’ils méconnaissent et qui les contrôlent subtilement, personnages dont les émotions sont tues ou somnolent au fond d’eux ou bien personnages sans émotions qui leur appartiennent vraiment, guidés qu’ils sont par des buts extérieurs à leur volonté bien qu’ils soient persuadés du contraire, L’emploi crée en nous des attentes qu’il ne comblera jamais, à l’image de ses personnages attendant que quelque chose arrive alors que rien n’arrive et que tout n’est qu’illusion (obtenir une promotion, se marier/avoir une femme/la promesse de l’amour et du bonheur).


Film désenchanté aussi, malgré le timide mais inamovible sourire du protagoniste, plein d’espoir mais où règne finalement la désillusion, l’attente vaine, le devoir absurde, l’absence de volonté propre, l’aliénation de soi.


D’une austérité rappelant L’arbre aux sabots et d’une lenteur assez soporifique, il se reprend néanmoins avec cette fin plutôt enjouée.


Un étrange amalgame au discours pas toujours clair.

Marlon_B
7
Écrit par

Créée

le 20 sept. 2021

Critique lue 77 fois

1 j'aime

Marlon_B

Écrit par

Critique lue 77 fois

1

D'autres avis sur L'Emploi

L'Emploi
Morrinson
7

"L'avenir vous semble-t-il sans espoir ? Buvez-vous souvent pour oublier vos problèmes ?"

Dans le cadre de cette époque du cinéma italien, on peut se lancer dans L'Emploi en croyant avoir affaire à une forme de néoréalisme plus ou moins classique. Si la toute première partie peut donner...

le 1 mars 2019

6 j'aime

L'Emploi
Reymisteriod2
8

Critique de L'Emploi par Reymisteriod2

Un film tout bonnement extraordinaire ! Extraordinaire, et bouleversant. Sorti en 1961, soit un an avant l'Eclipse, Il Posto m'a beaucoup rappelé le film d'Antonioni, dans sa forme principalement ;...

le 1 mars 2016

3 j'aime

2

L'Emploi
Marlon_B
7

Drôle d’objet hétéroclite

Drôle d’objet hétéroclite, bizarre un peu comme un Lynch style Eraser Head ou Inland Empire, absurde parfois comme le théâtre de Ionesco ou Beckett ou les récits de Kafka, beau à certains endroits...

le 20 sept. 2021

1 j'aime

Du même critique

Call Me by Your Name
Marlon_B
5

Statue grecque bipède

Reconnaissons d'abord le mérite de Luca Guadagnino qui réussit à créer une ambiance - ce qui n'est pas aussi aisé qu'il ne le paraît - faite de nonchalance estivale, de moiteur sensuelle des corps et...

le 17 janv. 2018

30 j'aime

1

Lady Bird
Marlon_B
5

Girly, cheesy mais indie

Comédie romantique de ciné indé, au ton décalé, assez girly, un peu cheesy, pour grands enfants plutôt que pour adultes, bien américaine, séduisante grâce à ses acteurs (Saoirse Ronan est très...

le 17 janv. 2018

26 j'aime

2

Vitalina Varela
Marlon_B
4

Expérimental

Pedro Costa soulève l'éternel débat artistique opposant les précurseurs de la forme pure, esthètes radicaux comme purent l'être à titre d'exemple Mallarmé en poésie, Mondrian en peinture, Schönberg...

le 25 mars 2020

11 j'aime

11