L'homme qui voulait voir un bon film

J'avais les meilleures intentions du monde en allumant la téloche, ce soir, sur D8. Je ne connaissais rien de cet Homme qui Voulait Vivre sa Vie, hormis, à l'époque, le battage qui en avait été fait, comme pour chaque film français. Parce que c'était français. Que c'était mieux que les ricains pas bien. Eh bien, désolé, mais je sens que je vais continuer à m'abrutir encore longtemps.

Début du film. Duris sourit. Il est content. Sa vie est réussie. Il sourit mais pas longtemps, car sa femme, elle s'ennuie dans sa vie de bourge, le fait cocu et demande le divorce. La salope. Romain Duris, quand même ! Avec les poches pleines de flouze. N'a-t-elle à ce point aucune reconnaissance ? Duris va voir avec qui sa femme le trompe. Le ressentiment déborde et il tue le rival par inadvertance. Même pas le courage de le faire vraiment. Mais bon, cela se laisse suivre et augure d'un film au rythme pas trop mal enlevé, jusqu'à cette succession de gros plans sur sa vedette. Car à partir de ce moment, Duris, il n'a plus que deux expressions à son jeu d'acteur : la "Je vais plus voir mes enfants c'est trop affreux", les yeux rougis et aussi humides que la truffe d'un labrador amorphe, et la "le doute m'habite (encore heureux que ce n'était pas Satan...) sur le sens de ma vie", avec le poing enfoncé dans la bouche et l'oeil noir. Car il doute vraiment.

Et le film prend lentement l'eau. Très lentement. Voyage au bout de l'ennui. Il décide de disparaître, comme le docteur Godard. Bien fait pour sa bonne femme qui le croit mort. Elle n'avait qu'à pas le tromper. Il se balade sur le port. Et il prend des photos. Youpi. C'est la passion qu'il avait abandonnée. Ses enfants ? Il n'y pense plus. Quel bon père. C'était bien la peine de faire tout ce cinoche au début. Mais au moins, on ne reverra plus ses yeux rougis et aussi humides que la truffe d'un labrador amorphe. Mais il troquera cette expression contre une troisième : la "Je suis surpris je contrôle plus rien !" bouche bée. Car ses photos, il les expose et elles deviennent des succès. C'est pas ce que tu cherchais justement, coco ?

Alors que je m'attendais à un film beaucoup plus haletant, je me suis retrouvé avec quelque chose de plat, mou du genou, ennuyeux et aussi surprenant que l'activité cérébrale d'un comateux. Et comme Duris au début de l'oeuvre, qui pense qu'il est passé à côté de sa vie, le spectateur, dépité, triste et amer, doit se rendre à l'évidence : il est passé à côté de sa soirée...