Avant Aladdin

Bernard et Bianca au Pays des kangourous n'est pas le seul film Disney de 1990 à avoir fait un flop à sa sortie.

Ce fut également le cas de La Bande à Picsou-Le Trésor de la lampe perdue.

Qu'est donc ce film? Un peu de contexte.

Avant que le studio Walt Disney Pictures ne débute le Second Âge d'Or, le studio DisneyToons (appelé MovieToons à l'époque) s'était déjà lancé dans ce qu'on peut appeler son propre âge d'or dans les années 80-90 en produisant des séries tels que Tic et Tac, Rangers du risque, Super Baloo, Myster Mask et bien d'autres régulièrement diffusées sur Disney Channel.

Parmi elles, il y avait aussi une série La Bande à Picsou adaptée de la bande-dessinée éponyme. Série qui fut rebootée en 2017 et diffusée jusqu'en 2021.

Mais restons dans les années 80-90.

Si aujourd'hui, il est fréquent de donner à de nombreuses séries leurs volets dérivés sur grand écran, cela n'était pas chose fréquente lorsque les studios Disney voulurent se lancer dans un film concluant la série La Bande à Picsou 1987. Néanmoins, le projet fut lancé. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, l'animation du film ne se fit pas aux Etats-Unis mais majoritairement en France.

_Cocorico_

Alors quelle est l'intrigue du film?

Alors que Picsou et ses neveux font une chasse au trésor, ils tombent sur une lampe magique libérant un génie pouvant exaucer trois voeux. Mais si son possesseur se montre négligent, la lampe pourrait se trouver entre de mauvaises mains.

S'il est difficile d'imaginer qu'une histoire avec de mignons canards puisse être une aventure épique, La Bande à Picsou-le film prouve que cela est tout à fait possible.

Entre scènes d'action emplies d'adrénaline, passages à suspense, tension, séquences angoissantes et/ou émouvantes, on a le parfait cocktail pour avoir une aventure digne de ce nom.

De plus, il y a également beaucoup de passages assez drôles.

Le seul véritable problème au niveau des péripéties est que, durant le milieu du film, l'intrigue stagne au point que le scénario semble être en pause pendant un certain temps. Néanmoins, quand l'intrigue reprend, le film redevient une aventure parfaite.

Parlons maintenant des personnages.

Picsou est doublé par un Philippe Dumat plus en forme qu'il ne l'était dans la série. Il est tel qu'on l'aime: vache, fourbe, cupide, égoïste...Tout cela lui donne un côté anti-héros sans pour autant le rendre détestable puisque Picsou a beau être radin ou encore vicieux, il garde quand même des principes digne d'un protagoniste Disney. Mais ce qui le rend assez atypique d'autres protagonistes, c'est qu'il n'est pas jeune. En effet, Picsou est un adulte orgueilleux se souciant de son image en société, pas forcément à l'écoute mais a assez de qualités comme le courage, l'intelligence ou encore peut se montrer capable d'affection.

_mais pas d'amour. C'est Picsou quand même, faut pas dé*onner_

Mais que serait Picsou sans ses neveux?

Les célèbres triplés sont toujours aussi en forme et forment un trio d'enfants aventuriers amusants aussi risque-tout que leur oncle. Cependant, il y a une chose à déplorer en ce qui les concernent. En effet, alors que dans la série, ils avaient des personnalités différentes (Riri était le casse-cou, Fifi était l'intellectuel réfléchi et Loulou était le peureux), dans le film, ils sont tous unidimensionnels et sont plus une entité collective que de vrais personnages. De plus, il est également impossible de les distinguer vocalement étant donné qu'ils sont doublés par la même personne; à savoir Martine Reigner. Dommage.

Le, ou plutôt, la seule qui se démarque des enfants, c'est la nièce adoptive de Picsou: Zaza. Mais, malheureusement, pas dans le bon sens. C'est juste la petite fille clichée aimant tout ce qui est mignon. De plus, le film a beau la rendre casse-cou et courageuse par moment, le fait d'en avoir fait la gaffeuse de service la rend rapidement agaçante. Sans compter le fait que Séverine Morizot lui donne une voix suraiguë horrible pour les oreilles. Voix que ne lui donne pas du tout Russi Taylor en VO.

Et pour continuer à parler des personnages féminins, La Bande à Picsou-Le film est très misogyne car entre Zaza, la gaffeuse et Mamie Baba (doublée par Claude Chantal) hurlant ou s'évanouissant durant les situations périlleuses a de quoi agacer voire dégoûter les spectatrices.

Mais revenons aux qualités.

Le pilote amateur Flagada Jones est jouissif à chacune de ses apparitions. De plus, Jean-Claude Donda lui donne un ton benêt hilarant.

Mais le meilleur personnage du côté des gentils est, sans aucun doute, le Génie. William Coryn le rend extrêmement attachant. Il s'agit d'un personnage solitaire prisonnier de sa fonction rêvant de liberté. Tantôt drôle, tantôt émouvant. Les créateurs ont décidé de faire de lui un enfant pour qu'il soit proche des neveux de Picsou ainsi que pour en faire la victimes d'adulte voulant se servir de lui pour arriver à leurs fins. "L'emprisonnement" du Génie est donc une métaphore de l'emprise des adultes sur les enfants n'écoutant pas leurs désirs et l'autorité parentale à remettre en cause est symbolisée par tous les personnages d'adultes que ce soit du côté des gentils ou des méchants.

Ah! Puisqu'on parle d'eux.

Merlock est un excellent méchant. S'il est doublé par Christopher Lloyd en VO, ce n'est, hélas, pas sa voix française officielle, Pierre Hatet, qui joue le rôle en VF. Cela dit, Jean Topart fait un excellent travail dans son interprétation du personnage. Merlock est un sorcier imposant. Rien que le fait qu'il puisse se transformer en animal, qu'il soit existant ou imaginaire, le rend dangereux que ce soit les animaux géants pouvant vous tomber dessus à n'importe quelle occasion ou les animaux plus petits/discrets pour vous espionner à votre insu.

De plus, il peut également être très drôle puisque les scénaristes prennent plaisir à lui infliger des tuiles dans un bon registre de comique de situation.

Par contre, on aurait LARGEMENT pu se passer de son homme de main.

En effet, le film n'est pas que misogyne. Il est aussi raciste. Cela à travers le personnage de Dijon étant une caricature d'arabe insultante se limitant à être un voleur, pas malin et avoir un accent forcé de très mauvais goût. Il énerve aussi bien les personnages que les spectateurs au point qu'on se demande pourquoi il a été créé.

En dehors de ça, on se demande pourquoi Disney+ n'a pas mis un panneau d'avertissement expliquant que le film contenait "des stéréotypes insultants" à travers le personnage de Dijon comme ils l'ont fait pour Peter Pan à travers les personnages des Indiens.

Mais reconcentrons-nous sur les qualités.

La musique du film est excellente. En effet, David Newman nous offre une partition parfaite collant parfaitement à l'ambiance aventuresque du film. Plus particulièrement à travers un thème principal mémorable.

Le film nous offre même furtivement la chanson du générique de la série composé par Mark Mueller. Seule différence, alors que dans la série, elle était chanté par Jean-Claude Corbel, dans le film, c'est Claude Lombard qui l'interprète.

Enfin, c'est bien joli de dire que le film a à la fois des qualités et des défauts mais, même s'il ne s'agit pas de son hic principal, les créateurs du film ont fait une chose n'étant pas du tout à faire lorsqu'on a un budget pour un film prévu pour le grand écran. En effet, visuellement, La Bande à Picsou-le film ressemble davantage à un film Direct-to-Video/DVD/Blu-Ray qu'à un film destiné au cinéma.

Les décors sont plutôt minimalistes et les personnages sont dessinés et animés, ben, comme des personnages de séries. Quant aux effets spéciaux, ils ne sont pas spectaculaires mais font correctement le job en tant qu'effets de magie.

Néanmoins, La Bande à Picsou-le film reste un très bon film, non seulement d'aventure, mais également une réflexion sur l'enfance insouciante, la dangerosité de nos désirs et l'autorité soit n'ayant pas toujours raison et/ou pouvant être toxique.

À voir!