"Et le tout puissant le frappa et le remit aux mains d'une femme"
Si l'on en croit son avant-dernier film (Carnage) et celui-ci, il semblerait que Polanski soit parvenu à l'épure. Non pas celle des sentiments ou des émotions traduites: celles-ci explosent jusqu'à l'outrance mais celle des décors, des lieux, des déplacements. Parce que c'est dans l'imaginaire, complètement théâtral, que se déplace maintenant les corps et les esprits. Le mouvement ne naît plus d'un changement de lieu mais de ce que le huis-clos entraîne comme délaissement mental, délire métaphysique et transformation des personnages. Polanski a donc misé sur l'épure, pour mieux faire exploser ses acteurs. Surtout son actrice, Emmanuelle Seigner qui visiblement s'amuse beaucoup mais sur-joue parfois beaucoup trop.
Volontairement le mouvement brusque, l'affrontement réel, semble apparaître dans la première séquence du film, un peu convenue,de l'arrivée, en retard, d'une actrice qui n'est même pas sur la liste du casting. Après quelques insistances, elle finit par obtenir de jouer un passage du texte dans son costume "genre 18e", qui recouvre le costume sado-maso dans lequel la tornade Vanda a débarqué. Mais en réalité c'est là que le mouvement et l'affrontement sont les plus forts, d'une mise en abyme plus ou moins habile (parce que trop soulignée), on glisse dans une double joute-oratoire jubilatoire entre texte écrit pour la scène et dialogue cinématographique.
Si je parle de jubilation, c'est qu'elle est réelle, palpable et qu'elle sauve le film, de par l'humour qui est injecté et quelques passages qui relancent un suspens à peine voilé. Le problème majeur restant que le jeu, peu subtil, d'E.Seigner a peiné à me faire entrer dans le film. Et surtout, bien qu'intéressant, je l'ai trouvé sans surprise. Il manquait quelque chose à cet affrontement, une petite saveur en plus qui nous fasse sortir des conventions d'une transformation assez courue d'avance " et le tout puissant le frappa et le remis aux mais d'une femme"... La manipulation qui s'opère dans le "couple" se voulait aussi celle de l'auteur (il est assez clair que le(s) personnage(s) interprétés par Mathieu Amalric sont comme des doubles de Polanski) mais aussi du spectateur. Si Polanski s'amuse beaucoup tout en ayant l'air de dire des choses très profondes, il n'est pas sûr que la manipulation marche bien quand elle est trop visible...