Fev 2011:

Malgré la piètre qualité de la copie ou du dvd (j'en sais rien et quelque part je m'en fous, le résultat est le même) et donc des images pas toujours très nettes et des blancs très vifs, sur-exposés, gommant parfois les traits, j'ai assisté là à un très bon film.

Je ne connaissais pas Mauro Bolognini, si ce n'est de nom, c'est donc quelque chose de plus précis que je retiens désormais.

J'ai pu parfaitement profité de la recherche formelle constante du cinéaste avec un sens du cadre non seulement juste mais magnifiquement pictural. Les compositions sont superbes, enrichies par les décors, les lieux et peut-être un travail sur les lumières qui ne m'aura pas complètement échappé.

La mise en scène est étudiée, pleine de significations, comme ces rideaux voilant le regard que pose Antonio (Marcello Mastroianni) sur son jeune épouse, une femme qu'il ne parvient pas à déflorer, forcé d'annuler son mariage par la suite.

Le mystère Antonio demeure. Voilà déjà un point qui reflète un sens particulièrement pertinent du récit. En effet, les questions restent posées, d'où vient cette porno-phobie, une homosexualité latente, une sur-idéalisation de la femme? J'ai longtemps cru à l'homosexualité refoulée du personnage, mais progressivement le doute s'installe, il semble véritablement attiré par les femmes et pas par les hommes et puis enfin, je me suis rendu compte que cette question n'admet pas vraiment de réponse, parce qu'on s'en fout, là encore le résultat est le même.

Et Bolognini de se focaliser sur la souffrance terrible qu'endure le bel Antonio. Le pauvre Antonio, l'homme idéal, la beauté incarnée, celui qui attire à lui tous les regards, toutes les femmes prêtes à se damner pour lui, le pauvre Antonio est impuissant. Quand il tombe sur la photographie de Barbara (Claudia Cardinale), il est subjugué par la grâce de la jeune femme, se persuade que tant de pureté aura raison de son mal, au mieux il pourra enfin lui faire l'amour sans avoir envie de vomir, au pire elle saura vivre sans, elle est son ange, répète-t-il.
Mais les femmes ne sont ni putes ni saintes, ce sont des femmes avec leur corps, leur désir à assouvir. Entouré de sa famille, son père surtout, un mâle ayant bâti toute son existence sur sa virilité (Pierre Brasseur, toujours aussi extraordinaire, j'adore ce mec) et de toute la société, de la ville de Catane, Antonio est écrasé par le poids que l'univers semble vouloir s'acharner à lui mettre sur les épaules.

Le scénario co-signé par Pasolini, Gino Visentini et Mauro Bolognini ainsi que la mise en scène de ce dernier conduisent idéalement les personnages dans une histoire très bien maitrisée, très équilibrée, dans le rythme comme dans l'intensité dramatique.

Les acteurs font un travail remarquable.
Marcello Mastroianni et Pierre Brasseur sont ceux qui m'ont le plus impressionné.
J'ai beaucoup aimé la force et la retenue que livre Rina Morelli en jouant la mère d'Antonio.

Un très beau film sur l'exclusion, la douleur de la marginalité imposée, bien écrit, bien joué, bien filmé.
Alligator
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le 16 avr. 2013

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Alligator

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