Le Chat botté
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Le Chat botté

Long-métrage d'animation de Kimio Yabuki (1969)

Assez peu connu de ce côté du globe, Le Chat botté de Kimio Yabuki est pourtant considéré comme un classique de l’animation au Japon. Sa renommée est aussi restée vaillante car le personnage félin en question orne le logo de la célèbre compagnie Toei Animation (les séries et téléfilms Goldorak, Dragon Ball Z, Sailor Moon, One Piece et tant d’autres) depuis.

En France, le film est parfois cité de manière annexe, en tant que l’un des premiers travaux d’animateur de Hayao Miyazaki, entré à la Toei en 1963 et qui en repartira en 1971. Son souci du détail et sa perception du mouvement se remarquent dans les scènes qu’il a crée, disposées vers la fin du film. Cela reste un travail collectif, avec d’autres animateurs, parmi les meilleurs de la Toei, contrairement à ce que peut laisser entendre la jaquette du DVD vendu par Wild Side qui met bien en valeur le nom du fondateur du studio Ghibli.

En adaptant le célèbre conte transposé par Perrault, la Toei perpétue une certaine dynamique de sa filmographie qui puise dans les contes et légendes européens, à côté des adaptations de mangas locaux. Cette retransposition prend d’évidentes libertés, pour un récit d’aventure bien plus conforme mais aussi moins cynique.

Pero, le chat botté en question, parle comme un humain et s’habille comme tel. Mais il garde sa malice féline, bien que bienveillante. Condamné à mort par le conseil des chats pour avoir épargné une souris, il sera sans cesse pourchassé pendant le film par trois chats assassins lancés à ses trousses. Bien plus malin qu’eux, il arrive toujours à s’en défaire. Et c’est dans un court moment de répit qu’il fait la rencontre de Pierre, le cadet d’une fratrie de trois, chassé par ses frères qui veulent ainsi conserver tout l’héritage de leur père décédé. Pour aider ce jeune orphelin, il décide de le faire passer pour le Marquis de Carabas, riche prince, auprès du Roi et de sa fille à marier.

A cause de personnages peu engageants, cette première partie, assez proche du conte, n’est guère trépidante. La malice de Pero égaie. Mais Pierre est d’une mollesse assez fatigante, ne trouvant guère à redire à ce chat ou à ses méchants frères. La romance qui se fait autour de la princesse est d’une autre époque, pas si enchanteresse. Les mensonges seront bien suffisants pour faire tenir la romance de deux personnages qui pourtant ne se connaissent que peu. En dehors de l’espiègle Pero, les personnages sont bien vides.

Pourtant le film reprend de la griffe dans sa dernière partie. Lucifer, autre prétendant de la princesse, est un puissant sorcier et qui promet richesses et luxe au roi, un bon parti. Mais le refus de la jeune fille va attirer son courroux et il va l’entraîner de force dans sa forteresse rocheuse. Pierre quittera enfin ses habits de garçon fade et sans caractère pour aller la sauver, accompagné de Pero et de quelques alliés souris.

Cette dernière partie est peut-être trop étirée sur la longueur, mais cette course poursuite entre les différents protagonistes et les nombreux coups d’éclats des uns et des autres représente pourtant le meilleur moment du film. Abandonnant son histoire initiale sans grand intérêt, cette partie du film est plus rythmée, aux doux airs de films d’aventure et même de cape et d’épées par d’autres moments. Les animateurs à l’oeuvre, dont Miyazaki s’en donnent à coeur joie, alors que ce qui précédait était réussi mais plus pépère.

Le film date de 1968, il ne faudrait pas l’oublier, et il garde de bons restes de cellulos. Il faut lui reconnaître un certain charme visuel qui lui a permis de bien passer les âges. Son trait rond de livres d’enfants y joue pour beaucoup. Ses belles illustrations en arrière plan, en belles couleurs proches de l’aquarelle, transposent à merveille le film dans cette Europe médiévale doucement fantasmée avec ses rues aux maisons charpentées ou à son château, plus proche du médiéval rêveur d’un château de Neuschwanstein que d’une forteresse brute.

Le Chat potté reste un divertissement, il a d’ailleurs été produit ainsi, à la fois pour la satisfaction du public mais peut-être aussi pour celle de ses animateurs. Son histoire s’éloigne de la cruauté de la version de Perrault, sa morale ambiguë est remplacée par une leçon d’héroïsme, sans aucune souris avalée pendant le métrage. Même Lucifer est un personnage attachant, grand benêt, amoureux sans retour, mais un grand enfant assez colérique. Si sa plus grande partie reste assez classique, parfois fade, sa reprise en pattes au sein de la forteresse de Lucifer permet de ne pas regretter son visionnage, en dehors de la curiosité devant un film aussi culte au Japon.

En allant plus loin, le reste de sa postériorité et de celle des films de cette époque d la Toei est peut-être encore à découvrir de notre côté du globe. La direction artistique cartoon et flamboyante du culte The Legend of Zelda: The Wind Waker a souvent été comparée aux films de Miyazaki. Mais la forteresse maudite, lieu central du jeu et siège du grand antagoniste, rappelle la forteresse perchée et rocailleuse de ce film. Tout comme le rendu de la mer du jeu est assez proche de celle des Joyeux pirates de l'île au trésor, aux mêmes thèmes maritimes, là encore de la Toei et sorti en 1971.

SimplySmackkk
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le 20 janv. 2023

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