Run to the Dragon !

(/ ! \ Cette critique contient quelques SPOILERS, il est préférable d’avoir vu le film ou lu le livre avant de la lire.)

Première question en sortant de la salle obscure, que penser de ce second volet de la trilogie ? Cette réponse ne pourra malheureusement être entièrement résolue que lorsque l’on aura vu où Peter Jackson et son équipe veulent nous emmener avec le dernier chapitre. Sur quels critères doit-on se baser pour juger l’adaptation du livre du Tolkien ?

Véritable amoureux du travail de Peter Jackson, et ayant lu le livre, j’ai vécu cette suite comme un véritable bouleversement, de par son adaptation, son rythme et son scénario plus chaotique qu’à l’accoutumée. Le spectacle est là mais beaucoup de questions et d’inquiétudes persistent quant à la finalité de cette fresque épique.

Tout d’abord, cet épisode transitoire se distingue largement de tout ce que Jackson a pu adapter de la Terre du Milieu, étant donné que les libertés scénaristiques prisent par le réalisateur englobe la plus large partie du film. Malgré quelques modifications apportées dans le premier volet, l’adaptation était plutôt fidèle au livre, ce qu’on ne retrouve pas ici.
La première demi-heure avec la rencontre de Beorn et l’épisode de la Forêt noire est dynamique mais tellement raccourci que cela en devient frustrant pour ceux qui ont lu le bouquin. Le personnage de Beorn est bien trop peu développé et le banquet elfique dans la Forêt mis à la trappe.

Ce qui frappe ensuite, c’est le rythme effréné pris par le film, se distinguant une nouvelle fois du livre. Tout s’enchaine très rapidement, sans véritable temps mort. Ce choix est à double tranchant, car le film ne connaît quasiment aucune baisse de régime, comme les passages avec les Ents dans Les Deux Tours. Cependant, beaucoup de scènes et de personnages auraient mérités d’être plus développés.

Dans la continuité de son prédécesseur, La désolation de Smaug est un film qui se veut très spectaculaire visuellement. Le numérique et les FX ont largement pris le dessus pour émerveiller la rétine. Alors oui, c’est incroyablement beau et bien réalisé, la photo du film est à couper le souffle mais cela donne un côté moins réel à la Terre du Milieu que dans la première Trilogie. Après cela reste de la fantaisie, et selon moi l’aspect « concret » peut laisser place à un aspect plus « féerique ».
L’accent est donc mis sur l’action, de nombreuses scènes de combat avec des orques se faisant littéralement massacrés, l’arrivée de « Legobadass » et de sa pote avec une moyenne de 30 morts à la minute.
Je reste toujours retissent en ce qui concerne l’utilité de la 3D qui rend l’action très brouillon et n’améliore vraiment pas l’immersion.

Côté personnage, passons d’abord par les réussites incontestables. D’abord le Roi Elfe Thranduil interprété par Lee Pace (The Fall), est impeccable, de par son orgueil, sa cruauté et sa grâce créant un personnage ô combien détestable mais charismatique. On regrette même de ne pas voir un peu plus de scène illuminée de sa présence malsaine.
L’évolution de Bilbon est bien traitée et le personnage est toujours aussi intéressant à suivre.
Puis, celui que l’on attendait tous évidemment : S-M-A-U-G. Selon moi la grande force du film, son traitement est quasi parfait. Le travail sur le son de la voix et sur le regard d’une intelligence malveillante et millénaire est époustouflant. La présence du Dragon est réellement hypnotisante, et les dialogues avec Bilbon restent fidèles au livre. Le budget et la technologie permettent de donner vie à cet être et de le rendre spectaculaire.
J’étais assez réticent à l’idée du retour de Legolas, dont sa présence se justifie évidemment par le côté populaire du personnage dans la précédente trilogie. C’est néanmoins une bonne surprise car le personnage a beaucoup plus de corps qu’il y a 10 ans, un côté elfique imbu de sa personne qui le rend plus attractif, ses répliques font mouche et l'on se délecte du dédain qu’il exprime envers les nains.

Avec ces derniers, la difficulté reste la même que dans le premier épisode, le conte comportant de nombreux protagonistes, il est difficile de tous leur donner une profondeur, bien que l’on reconnaisse qu’un effort a été fait pour donner des répliques a chaque nain. Malgré tout, seuls certains sortent véritablement du lot : Thorin, Balin et Bombur en tête.

Passons maintenant à ce qui fâche et je ne suis pas le seul à l’avoir remarqué, c’est l’intrusion dans cette fable d’un nouveau personnage, j’ai nommé Tauriel, l’Elfe femme, camarade de chasse de "Legobadass". Ce n’est pas tant le personnage qui est dérangeant, mais le fait de l’emmener dans une sorte de triangle amoureux bien foireux qui pose problème. Selon moi, c’est un rajout totalement inutile qui vient bouleverser l’intrigue et dont on voit déjà les issues (Sa prévisible disparition dans le 3ème volet affectera durement Legolas qui deviendra plus empathique envers ses amis les nains). Tous ces passages, sont emmenés de manière très maladroite et laisse un sentiment de malaise.
Parmi les hommes du lac, Barde remplie son rôle et reste convaincant, malgré quelques ajouts inutiles (le fait qu’il soit le descendant du Maître de la garde lors de l’attaque de Dale, et qu’il porte tel Aragorn le poids de l’échec dans le sang) et la flèche noire bien trop mise en valeur (donnant trop d'indices sur la suite des évènements). Le rajout d’un personnage pseudo « grima langue de serpent », ne disposant pas de sa profondeur fait pale figure comparé à l’original. On tombe presque dans la caricature grotesque. Le Maître d’Esgaroth, sans être mauvais, reste peu convaincant, rappelant un méchant tel qu’on en voit dans les comédies familiales des années 90.

Les compositions d’Howard Shore se font plus discrètes dans ce volet, aucune mélodie ne frappe vraiment comme celles du Seigneur des Anneaux (Bridge Of Khazam Dum et Concerning Hobbits en tête) et bien encore le transcendant Misty Mountain dans le premier opus. En résumé rien d’anthologique, mais il faut avouer que la musique accompagne convenablement les différentes scènes.

Enfin, on remarque très nettement que le film jongle avec 2 styles difficilement compatibles. D’un côté de l’action burlesque (la scène des tonneaux dans la rivière) et de l’autre un côté Dark Fantasy (Les scènes de Gandalf à Dol Guldur) faisant plus penser a un préquel de la précédente trilogie.
La fin du film reste assez frustrante, la réalisation se permettant un cliffhanger douteux au beau milieu de l’histoire, loin des habitudes de Peter, donnant une réelle impression d’être cruellement abandonné.

Pour conclure, nous avons affaire à une œuvre très inégale dans son traitement et dans sa qualité et au vu des différentes gênes ressenties, il reste en dessous du premier Hobbit. Je pense que le jugement du film ne doit pas totalement se porter sur l’adaptation du livre, car son réalisateur à décidé de s’écarter des sentiers battus afin de livrer un film d’aventure, où les scènes s’enchainent à toute vitesse sans répits. Au vu de son passif, il est également difficile de le considérer uniquement comme un film de divertissement et d’action bien que l’accent soit mis dessus.
7, c’est donc la note faisant office de « compromis » après le premier visionnage, note susceptible de changer, en fonction de la conclusion de la saga.